Le 23 novembre 2023 marque un tournant diplomatique significatif pour le Niger avec le départ du Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani, pour Bamako et Ouagadougou. Cette visite de travail et d’amitié revêt une importance capitale, non seulement pour le Niger mais aussi pour l’ensemble de la région du Sahel, en raison des enjeux géopolitiques et sécuritaires qu’elle soulève.
Première sortie internationale post-coup d’État
Le périple du général Tiani, sa première incursion internationale depuis la prise de pouvoir suite au coup d’Etat contre Mohamed Bazoum le 26 juillet 2023, s’inscrit dans un contexte régional tendu. Les rencontres avec ses homologues, Assimi Goïta du Mali et Ibrahim Traoré du Burkina Faso, tous deux arrivés au pouvoir par des voies similaires, traduisent une volonté commune de consolider les relations entre ces États dirigés par des militaires. Cette solidarité manifeste, qui transcende les frontières, est une réponse claire aux critiques et aux pressions internationales, perçues comme des ingérences dans les affaires internes de ces nations souveraines.
Alliance des États du Sahel : un front uni
L’un des piliers de cette solidarité transnationale est l’« Alliance des États du Sahel » (AES), une initiative regroupant nos trois pays. Cette alliance, au-delà de son aspect défensif visant à protéger la souveraineté et l’intégrité territoriale de ses Etats membres, envisage également de renforcer les liens économiques. Face aux pressions extérieures, l’AES incarne une tentative de réponse collective et régionale, illustrant une prise de position commune contre le terrorisme et pour le développement économique, essentiels à la stabilité de la région.
Opérationnalisation de l’AES : vers une coopération renforcée
La visite du général Tiani coïncide avec l’organisation à Bamako de réunions ministérielles cruciales pour l’opérationnalisation de l’AES. Ces assises, s’étalant du 23 novembre au 1er décembre, réunissant d’abord les ministres de l’Économie et du Commerce, puis ceux des Affaires étrangères, sont déterminantes pour l’avenir de l’alliance. Elles devraient aboutir à l’élaboration des textes fondamentaux, la mise en place des structures nécessaires et la définition des modalités de fonctionnement de l’AES, jetant ainsi les bases d’une collaboration plus étroite et structurée.
Ces rencontres ministérielles préfigurent une réunion ultérieure des ministres de la Défense, soulignant la nature multidimensionnelle de l’AES, qui ne se limite pas à la sécurité mais embrasse également le développement économique et la coopération politique. Cette initiative témoigne de la volonté des États membres de se doter d’instruments propres à leur développement et à leur stabilité, dans un contexte où les défis sécuritaires et économiques sont intrinsèquement liés.
En somme, la visite du général Tiani à Bamako et à Ouagadougou est un pas de plus vers l’affirmation d’une solidarité régionale face à des défis communs. Elle symbolise la recherche d’une autonomie accrue dans la gestion des crises sahéliennes et la quête d’une voie propre au développement économique et à la stabilité politique. Cette tournée peut être perçue comme un message fort envoyé à la communauté internationale, signifiant que les nations du Sahel sont désireuses et capables de prendre en main leur destin.
Si l’initiative de l’AES, portée par les rencontres de haut niveau à Bamako, ouvre de nouvelles perspectives pour le Sahel, elle n’est pas sans défis. La capacité de ses États membres à équilibrer leurs aspirations régionales avec les exigences de leurs populations, notamment en termes de développement économique et de stabilité politique, constituera un baromètre crucial de leur réussite ou de leur échec.