Le dossier de l’évasion présumée du président déchu Mohamed Bazoum, intervenue le jeudi 19 octobre 2023 vers 3 heures du matin, est loin de connaître son épilogue. Pour cause, aucun acte judiciaire n’a été posé dans ce dossier. Les vingt-trois (23) personnes arrêtées, des militaires et des civils, continuent d’être gardées sans titre de détention, et ce depuis plus de cinq mois pour certaines d’entre elles. C’est le cas des sieurs Abdourahamane Ben Hameye, présenté comme un journaliste, et Mohamed M’Barek, un commandant de la Douane, détenus tous les deuxdans des locaux de la gendarmerie à Niamey.
Ils sont, comme les autres prévenus, accusés de trahison et complot ayant pour but de porter atteinte à la sûreté de l’État, des faits prévus et punis par des dispositions du code pénal et du code de justice militaire. Or, le même code de justice militaire dit que la garde à vue ne peut pas, dans tous les cas, même en période de guerre ou d’exception, dépasser un délai maximum de trente (30) jours. A l’expiration de ce délai, la personne détenue doit être libérée, sinon sa détention est arbitraire et viole les dispositions des articles 58, 61 et 65 de la loi n° 2003 – 010 en date du 11 mars 2003 portant code de justice militaire. La détention de Ben Hameye et deM’Barek étant donc illégale, leurs conseils ont saisile juge des libertés du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey en assignant en référé l’Étatdu Niger aux fins de constater la voie de fait dont sont victimes leurs clients et d’en ordonner sa cessation par leur mise en liberté. Le 19 mars, les deux avocats et l’État du Niger, représenté par l’Agence judiciaire de l’État (AJE), ont développé leurs arguments de droit devant le juge des libertés.
Le droit est dit
Ce mardi 2 avril, le tribunal a rendu une ordonnance dont voici le contenu : “Le juge des référés, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en premier ressort, reçoit l’exception d’irrecevabilité de la constitution de Maître Maïnassara soulevée par les conseils des demandeurs comme régulière en la forme ; au fond, la rejette comme étant mal fondée ; reçoit l’exception de nullité soulevée par l’État du Niger comme régulière en la forme ; au fond, la rejette comme étant mal fondée ; constate queAbdourahamane Ben Hameye et Mohamed M’Barek sont détenus sans titre de détention à la brigade de recherche de la gendarmerie de Niamey ; ordonne par conséquent leur mise en liberté sous astreinte de 1.000.000 de francs par jour de retard ;condamne l’État du Niger aux dépens ; avis d’appel : 15 jours par exploit d’huissier.”
Que va faire l’État du Niger ?
L’État du Niger va-t-il se plier à cette décision de justice et ordonner la mise en liberté des deux prévenus ? Ou bien va-t-il interjeter appel et ignorer en conséquence l’état de santé des prévenus qui ne serait pas satisfaisant, et à qui le commissaire du gouvernement avait refusé une évacuation sanitaire ?Une chose est sûre, la réaction du pouvoir militaire est très attendue dans ce dossier, lui qui avait claméson attachement au respect des droits et libertés de la personne humaine. Affaire à suivre…