La mendicité, à laquelle est systématiquement associée le nom de notre pays à travers nos compatriotes qui migrent dans les pays de la sous-région pour s’y adonner comme profession fait encore l’objet d’intenses débats, ces jours-ci, sur les réseaux sociaux. L’intérêt soudain pour le sujet est parti d’un ultimatum de 72 heures, qui aurait été donné par les autorités burkinabè à nos compatriotes d’adonnant à cette activité sur leur territoire de quitter. Des vidéos montrant des compatriotes demandant à l’Etat de les assister pour regagner le bercail parce qu’ils n’ont pas les moyens pour assurer leurs frais de transport ont circulé sur la toile.
Certains internautes ont parlé de montage pour brouiller nos relations avec le Burkina Faso dans ce contexte de construction de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) entre les trois pays [Burkina Faso, Mali, Niger], qui n’est pas pour plaire à la CEDEAO encore moins aux partenaires occidentaux, foncièrement hostiles à la lutte de libération du joug néocolonial dans laquelle ils sont solidairement engagés sous l’impulsion de leurs autorités militaires.
‘’Ce sont des images de mendiants nigériens menacés d’expulsion en Côte d’Ivoire, au Sénégal ou encore au Bénin où des opérations similaires ont eu cours ces dernières années, etc.’’, ont opiné des internautes, tentant de décrédibiliser l’information.
Mais admettons qu’il s’agisse bel et bien du Burkina Faso. Où réside véritablement le problème que ses autorités politiques initient une telle mesure et en quoi peut-elle avoir un impact négatif sur le processus de construction de l’AES ? Pour prendre le contrepied de sa dénonciation par des compatriotes, la décision doit même être soutenue par nos autorités politiques de transition, au regard notamment du caractère hautement préjudiciable de la pratique pour l’image de notre pays.
Dans toute la sous-région ouest-africaine voire au-delà, cette image avilissante reflétée par le Niger à travers cette pratique, qui est d’ailleurs loin d’être fausse, est celle d’un pays exportateur de mendiants. Quand des personnes adultes louent de petits enfants avec qui elles vont en exode saisonnier à l’extérieur pour s’adonner à la mendicité de rue, l’activité devient dès lors une profession illicite qui mérite d’être farouchement combattue.
L’opération de rapatriement de plus de 1.000 mendiants nigériens interdits de séjour par les autorités sénégalaises sur leur sol organisée en avril 2022 a donné un aperçu de l’ampleur du phénomène. Suite à cela, on se rappelle que le gouvernement de l’époque avait annoncé un certain nombre de mesures coercitives pour lutter contre la pratique dont sa criminalisation, à travers notamment l’établissement de sanctions contre les acteurs de la filière. Mais visiblement rien de tout ce qui a été annoncé comme mesures n’a été fait au regard de la persistance du phénomène. La mendicité continue à s’exporter au Niger, dans l’indifférence totale des pouvoirs publics. Les compagnies de transport desservant les pays de la sous-région, qui doivent aider à lutter contre le phénomène, ferment les yeux.
Personnellement, nous avons été témoin oculaire de cette situation récemment sur l’axe Cotonou/Niamey, pour avoir emprunté un bus avec une cohorte de mendiants (de jeunes dames majoritairement sans aucun handicap physique) accompagnés de petits enfants en âge d’aller à l’école, en provenance pour certains de Porto-Novo et d’autre de Lomé et dont la plupart n’ont aucune pièce d’état civil.
Du fait de cette situation, au niveau de certains postes de contrôle routier, c’est un temps fou qui est perdu dans des négociations interminables pour surseoir au paiement de l’amende par les mendiants. La mendicité ne peut pas être une profession, les autorités de la transition doivent prendre des mesures drastiques pour y mettre durablement fin.