Dans un entretien accordé mercredi 18 mai 2022 aux journaux français, La Croix et L’Obs, Bazoum Mohamed avait affirmé : ‘’ Ce sentiment antifrançais ne peut pas s’étendre davantage sur les réseaux sociaux…Mais sur le terrain, les populations du Niger comme du Burkina et du Mali n’ont pas ce problème’’. On peut dire sans risque de se tromper que le président de la République fait preuve d’une grande hypocrisie par rapport à cette question. En effet, le sentiment anti-français est bien prégnant au Niger et au-delà dans tout le Sahel et tant même à s’exacerber davantage. Et il est nourri par la duplicité de la politique africaine de la France – la France parle démocratie et droits de l’Homme dans le monde alors que dans les pays de sa sphère d’influence, elle ferme les yeux pour défendre ses intérêts économique et sécuritaire -, le lourd passé colonial de la France et la guerre informationnelle que lui livre la Russie qui ne profite que de la situation.
La France est si consciente du problème qu’elle tente d’ailleurs, sans y parvenir pour le moment, de s’extraire de ce piège, préjudiciable à court, moyen et long terme à ses intérêts au Sahel. Le sommet France-Afrique de Montpellier en 2020 s’inscrit dans ce registre. Un sommet qui était juste une opération de reconquête de la jeunesse africaine qui bombe de plus en plus le torse vis-à-vis de la France. Une jeunesse ultra politisée et ultra connectée qui se sert des réseaux sociaux qui sont de véritables amplificateurs de la contestation. Quant aux ‘’officines mobilisées derrière le courant anti-français’’ auquel fait allusion Bazoum, là aussi, la France a déjà perdu la bataille de l’opinion au Sahel face à la Russsie (puisque c’est d’elle qu’il s’agit). Elle est débordée au Mali, au Tchad et au Niger par les relais du Kremlin. Moscou a su s’implanter grâce à une offre sécuritaire sans pareille, principalement en Centrafrique et au Mali, Et peut-être bientôt au Burkina Faso. Et cela malgré la création en 2020 d’un poste pour la diplomatie publique, chargée de valoriser les actions de la France en Afrique et de riposter aux ‘’attaques informationnelles’’. Une communication de la France devenue inaudible avec tout ce que charrient les réseaux sociaux comme ‘’fake-news’’, qui nourrissent le sentiment anti-français auprès des populations.