Les consommateurs nigériens à la base ont commencé déjà à ressentir durement dans leurs poches la hausse du prix du litre de gasoil à la pompe qui est passé de 538 francs à 668 francs, soit une augmentation de 130 francs d’emblée depuis le 1er août dernier. Le prix de certaines denrées alimentaires comme le lait yaourt en sachet plastique a connu une hausse de près de 25%, les coûts des transports urbain comme interurbain affiche aussi une tendance haussière depuis l’entrée en vigueur de la douloureuse mesure prise unilatéralement par le gouvernement. Dans l’espoir de parvenir à faire avaler la pilule aux Nigériens, celui-ci a avancé des arguments fallacieux qui n’ont convaincu personne. La guerre en Ukraine, le ravitaillement en gasoil des transporteurs de pays frontaliers au Niger ou encore la hausse inévitable du prix du KWh et du gaz domestique, etc., qui ont été avancés par le gouvernement comme arguments pour tenter de convaincre les Nigériens sur le bienfondé de la mesure ont contribué davantage à les braquer contre l’augmentation. Après la rencontre initiée par le président Bazoum Mohamed avec les centrales syndicales et les organisations de la société civile pour échanger sur la problématique, après le protocole d’accord ‘’pirate’’ signé entre l’Exécutif et des représentants non mandatés par des organisations de la société civile, l’on a assisté toute la semaine dernière durant à des déclarations de rejet catégorique de la mesure, assorties de menaces d’actions pacifiques de rue dans les jours à venir. L’Intersyndicale des travailleurs du Niger (ITN), a déclaré, lors d’une sortie médiatique la semaine dernière, ‘’rejeter catégoriquement cette décision d’augmentation du prix du gasoil et exiger sans délai et sans condition son annulation pure et simple’’, appelant ‘’l’ensemble des travailleurs et toutes les forces vives de rester mobilisés pour des actions éventuelles’.
La coordination régionale Niamey du Mouvement ‘’Tournons La Page’’ a aussi exigé du gouvernement ‘’la renonciation immédiate et sans condition de la décision d’augmentation du prix du litre du gasoil à la pompe’’, dans une déclaration publiée le 10 août. Le ‘’M62’’, une coalition d’organisations de la société civile qui vient de voir le jour dans le contexte d’augmentation du prix du gasoil et de la célébration du 62e anniversaire de l’indépendance de notre pays (3 août 1960), a, lui, carrément appelé les Nigériens à une manifestation pacifique de rue, ce mercredi 17 août, pour marquer leur désapprobation de la mesure gouvernementale. Une coalition des syndicats et associations des transporteurs passagers et marchandises a aussi dit niet à l’augmentation du prix du litre de gasoil à la pompe, rejetant en bloc les arguments avancés par le gouvernement pour tenter de le justifier. Lorsqu’on fait le décompte, toutes les structures représentatives de la société civile sont catégoriquement opposées à l’augmentation du prix du carburant parce qu’elle a un impact négatif direct sur le pouvoir d’achat des citoyens à la base. Cette contestation généralisée de la mesure doit être prise au sérieux par le gouvernement. Ne pas le faire est porteur de grave péril sur la stabilité sociale dans un contexte sécuritaire déjà très difficile. Malgré ce concert de protestations, cette levée de boucliers contre la mesure gouvernementale qui touche directement le social, nous n’avons jusqu’ici pas entendu la réaction de l’Assemblée nationale et même de l’opposition.
Les abonnés absents au débat
Les députés sont censés être les représentants du peuple. Ils siègent normalement au Parlement pour défendre les intérêts des populations, pas ceux des partis sous la bannière desquels ils sont élus. Malheureusement ce n’est pas le cas dans notre pays où l’on a totalement dévoyé la fonction parlementaire sous l’ère des renaissants. Cette hausse du prix du litre du gasoil est une affaire purement sociale qui restreint le pouvoir d’achat des citoyens, du fait de la flambée inéluctable des prix des biens alimentaires et non alimentaires qu’il est en train déjà de provoquer. Mais jusqu’ici, ni les députés de l’opposition encore moins ceux de la majorité ne sont sortis pour se prononcer là-dessus. Si la posture des élus de la majorité n’est pas surprenante (ils n’ont pas le courage de contrarier leur gouvernement même lors celui-ci est sur un mauvais chemin), celle des députés de l’opposition, par contre, ne s’explique pas. Ils n’ont pas encore pipé mot par rapport à la hausse du gasoil et le tollé de contestations qu’elle suscite. Comment des élus du peuple peuvent-ils se comporter de la sorte, se murer dans un mutisme, alors qu’il s’agit dans cette affaire d’une atteinte grave au pouvoir d’achat des populations qui est déjà très faible ? Ce comportement des députés s’apparente à une démission totale de leur part, parce que c’est sur ce genre de préoccupations que les électeurs veulent les entendre se prononcer. Il n’y a pas d’ailleurs que l’Assemblée qui est interpellée dans cette crise sociale latente liée à la hausse du prix du litre de gasoil, le Conseil économique social et culturel (CESOC) est aussi interpellé dans l’affaire. Ils doivent sortir pour clarifier ouvertement leurs positions sur cette préoccupation éminemment sociale. Attendre que la bombe sociale explose pour chercher à jouer aux pompiers, c’est faire preuve de mauvaise foi, d’hypocrisie notoire, à l’égard des Nigériens.