Deux hommes, une rencontre
Le socialisme est en chute libre notamment en France comme l’atteste la défaite historique (1,7 % des suffrages exprimés) de la candidate du PS Anne Hidalgo à la présidentielle d’avril 2022. Au pouvoir au Niger depuis 2011, le PNDS-Tarraya peut-il échapper au sort peu enviable que vivent les formations socialistes dans le monde ? La naissance du parti au pouvoir dans notre pays découle de la rencontre entre le directeur d’exploitation de la société des mines de l’Aïr (Somaïr) résidant à Arlit et un jeune professeur de philosophie du lycée Dan Baskoré de Maradi : Issoufou Mahamadou et Bazoum Mohamed. Le 02 avril 2021, le jour de sa prise de fonction en tant que président de la République, Bazoum Mohamed a tenu à rappeler cet épisode marquant de la vie du PNDS-Tarraya. Très vite, grâce à la cagnotte conséquente qu’il a ramenée d’Arlit, Issoufou Mahamadou a pris l’ascendant sur ses camarades ‘’socialistes’’. C’est ainsi que Bazoum Mohamed est resté dans l’ombre écrasante du ‘’minier’’ des décennies durant. Adepte du leadership autocratique, Issoufou Mahamadou a mené ses troupes à la baguette de 1990 jusqu’à son élection à la présidence de la République en 2011.
Entente de façade
À raison, peut-être, les Tarrayistes aiment à rappeler le caractère solide et uni de leur famille politique. « Nous avons eu le bonheur de créer un parti autour d’une vision basée sur des principes et des valeurs solides […] Cette foi militante propre à notre matrice idéologique et les valeurs qui lui sont consubstantielles nous a mis à l’abri des maladies qui vont par la suite miner et ravager toutes les autres formations politiques de la place […] », s’est remémoré Bazoum Mohamed le jour de sa prestation de serment. Il est vrai que beaucoup de partis politiques nigériens ont connu de mauvaises fortunes ces dix dernières années, mais le PNDS-Tarraya n’y est pas étranger. Une fois au pouvoir, Issoufou Mahamadou s’est attelé à désarticuler tous les partis politiques adverses à même de contrarier son règne sans partage. « Votre pire ennemi, aujourd’hui, est sans doute vous-même », c’est par ces mots que le socio-anthropologue franco-nigérien, Jean-Pierre Olivier de Sardan, a mis en garde les Tarrayistes en 2016. Depuis l’élection de Bazoum Mohamed à la magistrature suprême, certains observateurs entrevoient les démons de la division rôder autour du parti au pouvoir. C’est un secret de Polichinelle, le Premier ministre n’est pas le choix de Bazoum Mohamed. Ce dernier n’a eu d’autre alternative que de s’accommoder d’Ouhoumoudou Mahamadou à lui imposé par Issoufou Mahamadou. À cette cohabitation pour le moins difficile, s’ajoutent les guerres de positionnement entre les seconds couteaux dans la perspective du congrès du parti prévu se tenir en décembre prochain.
Apogée et déclin
Pour nombre d’analystes, l’allumette qui mettra le feu au PNDS-Tarraya sera craquée par Issoufou Mahamadou en personne. L’ancien chef de l’État garde toujours le pied à l’étrier du pouvoir et il ne manque aucune occasion de le rappeler à Bazoum Mohamed. Les récentes vacances bling-bling d’Issoufou Mahamadou à Tahoua n’ont pour seul but que de montrer au monde entier qu’il détient encore et toujours les rênes de l’État nigérien. L’unité à toute épreuve dont se targuent les tenants du pouvoir est-elle à bout de souffle ? La goutte d’eau qui fera déborder le vase est-elle proche ? C’est fort possible. Autant Issoufou Mahamadou se complaît dans sa posture monarchique, autant un fort désir d’affranchissement gagne Bazoum Mohamed de jour en jour. Comme tant d’autres partis politiques, aussi bien au Niger que dans le reste du monde, le PNDS-Tarraya ne peut échapper aux dissensions fatales qui mènent très souvent à l’implosion. Après l’apogée, vient inéluctablement le déclin. C’est dans l’ordre normal des choses.