La cohésion n’est pas le fort des adversaires du régime en place. De sourdes dissensions risquent de sonner le glas de l’opposition politique nigérienne déjà rachitique. L’autodestruction guette la CAP 20-21. Un scénario au-delà des rêves de Bazoum Mohamed.
Tel un feu de paille
Le 2 septembre 2020, jour du baptême de leur nouveau bébé, les pères de la Coalition pour une Alternance Démocratique (CAP 20-21) ont juré de se battre contre « toute tentative du régime de se maintenir au pouvoir à travers la fraude électorale et les manipulations de la justice et de l’administration dont il s’est rendu maître ». Le même serment a été pris quelques années plus tôt (par quasiment les mêmes acteurs politiques) au moment de porter sur les fonts baptismaux la Coalition pour l’alternance 2016 (COPA 2016). Ce qui n’a pas empêché à Issoufou Mahamadou de s’adjuger 92,49% des voix au second tour de la présidentielle de 2016. La CAP 20-21, tout comme son ancêtre qui est la COPA 2016, n’a pas pu barrer la route au PNDS-Tarraya lors des dernières élections générales. De la contestation du processus électoral dans son ensemble, à la remise en cause de la « nationalité nigérienne d’origine » de Bazoum Mohamed en passant par le rejet en bloc des résultats de l’élection présidentielle, toutes les récriminations formulées par la CAP 20-21 se sont tassées d’elles-mêmes. Tel un feu de paille, l’élan des adversaires du PNDS-Tarraya s’est éteint subitement. Dans un dernier baroud d’honneur, le candidat du CAP 20-21 a délocalisé le différend électoral qui l’oppose à Bazoum Mohamed devant la Cour de justice de la CEDEAO. Ce dernier ne s’est pas fait du mouron, pas le moins du monde. L’affaire est pliée pour le dauphin d’Issoufou Mahamadou bien avant le début du scrutin.
Un coup de froid
Un peu plus d’une année après l’élection de Bazoum Mohamed, le leader du MPN – Kishin Kassa a quitté le navire de la CAP 20-21. Ibrahim Yacouba a filé à l’anglaise ajoutant ainsi à la fragilité de la coalition dont plusieurs membres gardent prison sans compter l’évacuation sanitaire de Hama Amadou. Mahamane Ousmane, Amadou Boubacar Cissé, Mariama Bayard Gamatié, Amadou Ali Djibo dit Max, pour ne citer que ceux-là, restent débout sur les remparts mais sans grande conviction, il faut le dire. C’est un doux euphémisme de traiter l’opposition politique nigérienne de rachitique. Elle est squelettique face à un PNDS-Tarraya passé maître dans l’art des intrigues. Le sort de la CAP 20-21 ne tient plus à grand-chose, une réalité que semblent ignorer les leaders qui la constituent. Depuis le sceau officiel apporté au statut du chef de file de l’opposition en février dernier, un froid souffle sur les relations entre les membres de la CAP 20-21. Selon des sources bien renseignées, certains caciques de cette coalition n’ont pas apprécié la présence de Tahirou Saïdou (dit Parc n°20) au dîner offert ce 02 mai 2022 par Bazoum Mohamed en l’honneur du Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres.
Sauver les meubles
Le flou entourant la rencontre du 05 août 2022 entre le président de la République et Tahirou Saïdou n’a pas été du goût de plusieurs ténors de l’opposition politique. Comme pour davantage polluer l’atmosphère au sein de la CAP 20-21, le Moden FA Lumana a récemment refusé de cosigner le projet de saisine de la Cour constitutionnelle relativement à plusieurs violations de la Loi fondamentale apparue dans le dernier rapport de la Cour des comptes. Pourquoi le parti de Hama Amadou s’est-il désolidarisé de ses alliés ? C’est la question sur toutes les lèvres au sein de l’opposition politique nigérienne. D’aucuns soupçonnent le Moden FA de faire cavalier seul, de mener un combat autre que celui de la CAP20-21. Une chose est certaine, de sourdes dissensions gagnent les adversaires du régime en place. L’autodestruction guette la coalition formée par Hama Amadou, Mahamane Ousmane et tant d’autres opposants au PNDS-Tarraya. Un scénario au-delà des rêves de Bazoum Mohamed. La CAP 20-21 peut-elle s’éviter le pire ? C’est possible notamment à travers la prochaine réunion du Conseil National de Dialogue Politique (CNDP) programmée pour ce 9 septembre 2022. À cet effet, les leaders de l’opposition se sont évertués à accorder leurs violons lors d’une réunion tenue ce 6 septembre 2022. Au sortir de cette entrevue, la CAP 20-21 a posé deux principales conditions pour sa participation au CNDP : débattre du sort des prisonniers politiques et discuter sur les interdictions systématiques des manifestations publiques. Ouhoumoudou Mahamadou, le patron du CNDP, va-t-il sacrifier aux exigences de l’opposition ou va-t-il jouer sur les divisons qui la minent ? La question reste posée.