La célérité avec laquelle le régime en place a repris les sessions du Conseil National du Dialogue Politique (CNDP) amène à se questionner sur le véritable agenda du président de la République. Bazoum Mohamed n’a-t-il pas des intentions cachées ?
Sûr de sa victoire
Le 20 décembre 2020, en campagne à Magaria (Zinder), le candidat du PNDS-Tarraya à l’élection présidentielle a clairement prédit le camp de la victoire : « […] tout le monde connaît la direction du pouvoir et personne ne peut aller contre la volonté d’Allah », a dit le dauphin d’Issoufou Mahamadou devant une foule acquise à sa cause. Sûr des immenses ‘’pouvoirs’’ de son mentor, Bazoum Mohamed connaît d’avance l’issue du scrutin, et ses prédictions se sont avérées sur toute la ligne. Les dés ont été pipés accusent d’aucuns. Quoi qu’il en soit, Bazoum Mohamed règne sur le Niger depuis le 02 avril 2021. Ce dernier a toujours fait peu de cas de ses adversaires regroupés au sein de la Coalition CAP21-20 : « […] À partir du moment où ils (les opposants) ont dit qu’ils ne me reconnaissent pas comme président de la République, ils m’ont facilité la tâche. Donc, je ne me sens aucun devoir à leur égard (…) Ce n’est pas nécessaire à ce que je les rencontre », a-t-il laissé entendre lors d’une interview qu’il a accordée à l’occasion de ses 100 jours de présidence. Il faut dire que Bazoum Mohamed n’a jamais tenu les adversaires du PNDS-Tarraya en grande estime. Alors ministre de l’Intérieur, il a défendu plusieurs triturations du Code électoral malgré les fortes récriminations de l’opposition politique.
Pourquoi maintenant ?
Dix-sept (17) mois après son élection contestée, le chef de l’État décide de redonner vie au CNDP, une instance qu’il a contribué à désarticuler pendant son passage au ministère de l’Intérieur. Pourquoi maintenant ? Est-ce une réelle volonté de décrisper le climat socio-politique ou un dessein politicien inavouable ? « L’on peut se demander si, sous couvert de la reprise du dialogue politique, le président la République ne viserait pas plutôt principalement une reconnaissance pleine et entière de sa fonction par les plus récalcitrants des opposants de manière à pouvoir disposer de toute la latitude nécessaire pour prendre des mesures fortes en vue d’un autre type de gouvernance […] », a souligné le politologue Souley Adji (voir notre précédente parution). En clair, Bazoum Mohamed aurait un agenda qu’il se garde bien de cacher. Alors, quelles seraient les véritables intentions du chef de l’État ? Selon certaines sources, le chef de l’État chercherait à se prémunir des turbulences vers lesquelles fonce le PNDS-Tarraya en ce moment. Même s’ils ne l’admettent pas, les Tarayyistes s’acheminent bel et bien vers un congrès ordinaire possiblement dévastateur. Depuis l’accession de Bazoum Mohamed à la magistrature suprême, deux clans cohabitent difficilement au sein du parti au pouvoir. Au fil des mois, la brouille s’accentue entre les pro-Bazoum et les fidèles de l’ancien président de la République.
La crainte d’un coup vache
À travers la convocation du CNDP, le chef de l’État voudrait-il élargir le cercle de ses alliés jusque dans les rangs de l’opposition en prévision du clash entre lui et son mentor ? Cette thèse est la plus soutenue dans les milieux politiques. Bazoum Mohamed est bien conscient de sa fragilité, au sens large du terme, face à un Issoufou Mahamadou dont les talents d’intrigant ne sont plus à démontrer. Quelque chose se prépare au sein du PNDS-Tarraya, c’est sûr. Certains leaders (pas des moindres) de la mouvance présidentielle se plaignent du comportement peu amène d’Issoufou Mahamadou. Les soutiens zélés de ce dernier ne s’en cachent pas, ils veulent faire le vide autour de Bazoum Mohamed avant le congrès de décembre. Le chef de l’État a toutes les raisons de craindre un coup vache venant des Zakari Oumarou et consorts, les porte flingues d’Issoufou Mahamadou. Que ce soit à travers le CNDP ou par d’autres voies, Bazoum Mohamed semble se préparer à des temps orageux. Car l’avenir du PNDS-Tarraya s’écrit désormais dans l’incertitude.