Le pays semble bloqué. Les activités économiques sont au ralenti et la vie chère s’installe doucement, durablement, pendant que le pouvoir d’achat des Nigériens connait une baisse significative. Les citoyens se plaignent quotidiennement de ne pouvoir joindre les deux bouts. Les jeunes, même diplômés, et les sans-emploi en particulier sont dans la détresse, tant la création d’emplois, une heureuse promesse présidentielle, tarde à se concrétiser. Les manifestations publiques de protestation, pourtant consacrées par la Constitution, sont bloquées par les pouvoirs publics, comme si la réussite de la dernière avait sérieusement ébranlé les autorités. Un pays sous anesthésie générale frôlant même l’asphyxie pour certaines couches sociales.
Et tout cela, le Président le sait mieux que quiconque. Seulement, après avoir fourni quelques efforts sur le plan de la sécurité des frontières et des communes excentrées, il peine à trouver des réponses fortes pour les problèmes sociaux et la sécurité économique des ménages. Pourtant, il va bien falloir montrer aux Nigériens que sur ce plan également il pourrait trouver à redire. Car, le pire pour un début de mandat pendant que les attentes sont fortes est de passer pour un «roi fainéant», incapable de créer l’espoir, de tenir ses promesses et d’entrevoir des alternatives heureuses. Et pour cette fin, la région de Dosso, la zone de Gaya particulièrement, semble bien indiquée pour redorer son blason et tenter de faire oublier quelque peu les multiples frustrations des couches démunies et des acteurs civiques.
Le déplacement initial du Président dans la vallée de Sakonji Birni a sans doute réchauffé le cœur de l’hôte en voyant un aménagement hydro-agricole réalisé et mis en valeur par 209 producteurs agricoles, dont 9 femmes. Deux structures locales, la coopérative Hawi Dabey et l’association des usagers d’eau d’irrigation s’occupent également de l’exploitation et de l’entretien de ce site de 90 hectares, dont 63 seulement sont actuellement exploités. Sa visite, le lendemain, à Koré Mairoua lui a sans doute aussi mis du baume au cœur en constatant les travaux d’aménagement et de bitumage de la Route Bolbol – Tibiri – Koré Maroua, une entreprise réalisée sur fonds propres de l’Etat, à hauteur de 46 milliards CFA. Autant d’initiatives publiques susceptibles de donner une visibilité à la posture présidentielle et de montrer, non son inaction, mais sa pleine implication dans le développement local. Il n’a pas manqué, à cet égard, de parler de son credo aux populations de la région, en l’occurrence de la scolarisation de la jeune fille et de la création d’internats. D’autres sites ont également fait l’objet de la visite présidentielle, notamment les infrastructures et activités financées par les partenaires au développement, dont bénéficie la population.
Dans l’ensemble, cette visite s’apparente plutôt à une opération de charme dans un contexte de morosité tous azimuts et de déni des droits. Somme toute, il était de son devoir d’aller constater de visu les réalisations financées à grands frais par l’Etat –et même par les partenaires du Niger – sans que cela ne donne l’air d’un présent présidentiel aux populations mobilisées politiquement pour la circonstance par les autorités locales. Quand un président fait son job, il n’y a guère lieu de l’encenser inconsidérément comme on a vu celles-ci s’égosiller, tels des chantres commis pour donner une coloration partisane voire personnelle à une visite inscrite, en principe sous le sceau de l’Etat. Après tout, après s’être rendu dans toutes les autres régions, Dosso demeurait l’ultime zone que le Président n’avait pas encore visitée.