Comme vous le savez, le Comité ad’ hoc mis en place en septembre 2022 pour revisiter le décret 2019-500 du 10 septembre 2019 modifiant et complétant le décret 2004-030 du 30 janvier 2004 portant création du Conseil National de Dialogue Politique (CNDP) ainsi que le règlement intérieur dudit Conseil a remis a remis son rapport général le 18 janvier dernier au Président du CNDP, c’est-à-dire le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou. A cette occasion, le Coordonnateur de la Majorité présidentielle a salué la qualité du travail du Comité ad’ hoc. « Les propositions faites vont contribuer certainement à rendre plus efficace le fonctionnement du CNDP et faciliter les rapports entre les acteurs politiques », a notamment déclaré Kalla Hankourao. Ce dernier a par ailleurs proposé au CNDP une relecture de la charte des partis politiques pour une amélioration de la crédibilité de la démocratie au Niger. « Notre espace politique qui comptait une vingtaine de partis politiques aux premières élections de l’ère démocratique, c’est-à-dire en 1993, en compte aujourd’hui plus de 160 », s’est justifié le nouveau secrétaire général du parti au pouvoir.
Les micro-partis menacés ?
On ne peut guère imaginer le fonctionnement d’une société démocratique sans les partis politiques, dont le rôle essentiel est de participer à l’animation de la vie politique. Mais trop de partis pollue l’atmosphère politique. Au Niger, d’après la Charte des partis politiques, ceux-ci ont « l’obligation d’assurer la sensibilisation et la formation de leurs membres et de contribuer à la formation de l’opinion en vue de la préservation et de la consolidation de l’unité nationale, de la démocratie, de l’état de droit, de la paix, de la sécurité et du développement économique, social et culturel du Niger ». Mais combien sont-ils les partis qui accomplissent ce devoir ? Pratiquement aucun. De nombreux partis n’exercent aucune activité politique. Ils attendent l’arrivée des élections pour s’adonner à des petits calculs pour le marchandage des voix. Sans un réel projet de société et un programme politique, ces partis ne concourent point à l’enracinement de la démocratie. Lors des élections générales de 2020/2021, nombreux sont les partis qui n’ont pu tenir leur congrès ordinaire que grâce aux subsides du parti présidentiel (2.000.000 francs par parti). Lors des présidentielles, seuls 5 partis ont réalisé un score au-dessus de 5% des suffrages exprimés valables. 17 partis ont eu des scores situés entre 0,87 et 0,25%. Aux législatives, sur les 83 partis en lice, seuls 19 ont décrocher au moins un siège de député. 12 partis ont chacun moins de 650 voix. Avec des scores très squelettiques, ces partis ne sont que l’ombre d’eux-mêmes. Plus grave, d’autres partis n’ont participé à aucune élection, y compris municipale. Plus de 160 partis, ça sonne mal !
Les partis non affiliés, une aberration démocratique ?
Il a fallu attendre mai 2019 (avec l’adoption du projet de loi modifiant et complétant l’ordonnance 2010-84 du 16 décembre 2010 portant Charte des partis politiques) pour voir les partis dits non-affiliés, c’est-à-dire ne se réclamant ni de la Majorité présidentielle ni de l’Opposition, être reconnus comme tels. Mais cette existence n’est toutefois pas constitutionnelle. La Constitution de la VIIème ne parle point de partis non affiliés. En matière de gouvernance démocratique, il y a deux camps : on gouverne ou on s’oppose. Quand les suffrages se sont exprimés, il se dégage des gagnants, à qui il revient la prérogative de gouverner, et des perdants, qui s’opposent donc. Ce qui a toujours fait le charme de la démocratie telle que l’avaient conçue les ingénieux Athéniens, c’est cette dialectique ontologique entre majorité et opposition, ce vacillement permanent et perpétuel entre une chose et son contraire.
Ce que dit la charte des partis
En Mauritanie, pour assainir le paysage politique, l’on a dissous les trois-quarts (¾) des partis, jugés insuffisamment représentatifs. Au Niger, il n’est point besoin de procéder à une relecture de la charte des partis politiques. Il suffirait d’appliquer les dispositions pertinentes de cette charte pour éclaircir le paysage politique. L’article 11, alinéa 1, par exemple, dispose : « Tout parti politique agréé est tenu de se faire représenter dans les huit (8) régions du pays dans un délai d’un (1) an. Ce délai court à partir de la date du dépôt du dossier. La représentation régionale suppose nécessairement l’existence d’un bureau régional dont la liste des membres fait l’objet d’un dépôt au chef-lieu de la région ou d’une représentation permanente ». Ils sont rares les partis qui se sont conformés à cette disposition. Pourtant, l’alinéa 2 du même article dit : « Tout parti politique qui ne se conforme pas aux dispositions de l’alinéa premier du présent article est suspendu par arrêté du ministre de l’Intérieur jusqu’à l’observation de l’exigence ci-dessus indiquée ». L’article 40, lui, dispose : « Les partis politiques concourent à l’expression du suffrage et assurent par cette voie une fonction électorale. A ce titre, ils ont l’obligation de prendre part aux différents scrutins, présidentiel ou législatif et/ou local. Tout parti qui ne prend pas part à deux élections générales consécutives est dissous d’office. La dissolution est prononcée par le Ministre chargé de l’Intérieur ». Une loi est faite pour être appliquée.