A l’exception des chefs d’Etat de la CEDEAO qui ont pris sur eux la grave décision d’étouffer le peuple nigérien tout entier, pas uniquement les membres de la junte, les sanctions énoncées par la CEDEAO et l’UEMOA contre le Niger sont décriées même dans les pays qui ont paraphé le document.
C’est d’abord la toute première fois que la CEDEAO se réunit pour prendre immédiatement des sanctions, quatre (4) jours seulement après le renversement du régime civil qu’elle dit défendre, pour décider d’isoler systématiquement un pays membre et le menacer d’intervention militaire.
Et lorsqu’on regarde la batterie de sanctions, on réalise qu’elles visent à bloquer l’approvisionnement du pays en denrées alimentaires et produits non-alimentaires mais aussi à priver les populations de liquidité pour affronter l’adversité.
C’est poursuivant cet objectif que l’UEMOA a été associée par la CEDEAO dans la prise des sanctions, parce que c’est elle qui contrôle la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), principale institution monétaire des 8 pays membres de la CEDEAO et instrument stratégique contrôlé par la France qui tient la monnaie. Toutes les sanctions sont illégales, illégitimes et iniques.
La fermeture des frontières terrestres et aériennes est un acte illégal si l’on s’en tient aux textes fondateurs de la CEDEAO, tout comme ‘’l’établissement d’une zone d’exclusion de la CEDEAO pour tous les vols commerciaux à destination ou en provenance du Niger ; la suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les Etats membres de la CEDEAO et le Niger ; le gel de toutes les transactions de service, y compris les services publics, etc.’’. La liste n’est pas exhaustive, mais ce sont ces dernières sanctions qui paraissent surtout à nos yeux proprement inadmissibles.
Verrouillage des portefeuilles privés
Il a fallu seulement que les sanctions soient prononcées à l’issue du sommet extraordinaire de la CEDEAO du 31 juillet 2023 pour que les institutions en charge de leur application passent à l’action. Sinon comment expliquer cette décision précipitée du président nigérian Bola Tinubu consistant à ordonner aux responsables de la NEPA le débranchement, sans crier gare, de la ligne d’interconnexion en provenance de son pays qui nous fournit une bonne partie de nos besoins en énergie électrique ?
Plus grave encore, comment comprendre cette décision précipitée de la BCEAO consistant à mettre les banques primaires à la diète par rapport aux décaissements même pour les privés qui ne se sont en rien responsables dans le coup d’Etat militaire qui a renversé le président Mohamed Bazoum ?
N’est-ce pas de cela qu’il s’agit à travers ces deux sanctions qui parlent de ‘’suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les Etats membres de la CEDEAO et le Niger et le gel de toutes les transactions de service, y compris les services publics ?’’. Pour sûr, les usagers des banques primaires vivent des moments difficiles depuis que les sanctions drastiques de la CEDEAO et de l’UEMOA contre notre pays sont tombées.
Est-ce une décision émanant du siège de la Banque centrale ou un excès de zèle des responsables de la représentation nationale ? Mystère ! La seule certitude, les clients des banques souffrent énormément pour retirer de l’argent de leurs comptes logés au niveau des banques primaires. Qu’il s’agisse de gros clients comme les usagers ordinaires, c’est la croix et la bannière aujourd’hui pour effectuer un simple retrait d’argent. La grosse somme qui peut être retirée est plafonnée à 500.000 voire 1 million de F CFA/jour dans certaines banques.
Et même pour de petits retraits, c’est le rang, une attente interminable au bout de laquelle le client peut ne pas trouver satisfaction parce que le montant mis par la banque centrale à la disposition de la banque primaire est souvent épuisé. Ce calvaire imposé aux clients privés des banques primaires est tout simplement inadmissible. Comment peut-on empêcher à une société ou un prestataire privé qui fait des transactions avec des partenaires étrangers d’accéder à son argent qui transite par la banque centrale dans le cadre de sanctions visant à restaurer des institutions démocratiques renversées par une junte militaire ? En quoi sont-ils responsables dans le coup d’Etat pour payer un tel prix ?
Cela prouve tout simplement que les mesures de rétorsion de la CEDEAO et de l’UEMOA ne visent pas seulement la réhabilitation de Bazoum dans ses fonctions, il s’agit pour Tinubu et son club de ‘’Somaliser’’ le Niger et sa population pour permettre aux Occidentaux, la France en tête, de venir piller allégrement les immenses ressources naturelles du pays sous le manteau humanitaire.