Alors que la question de la levée de l’immunité de l’ancien président Mohamed Bazoum n’est pas tranchée, le dossier de l’évasion de l’ex-chef de l’État connait aussi une stagnation surprenante. Comme vous le savez, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) a affirmé avoir déjoué une tentative d’évasion du président déchu Mohamed Bazoum jeudi 19 octobre 2023 vers 03 heures du matin. Vingt-trois (23) personnes ont été arrêtées, des militaires et des civils.
C’est le cas notamment des sieurs Abdourahamane Ben Hameye, présenté comme un journaliste, et Mohamed M’Barek, un commandant de la Douane, interpellés respectivement le 19 octobre et le 7 novembre, par des éléments de la Garde présidentielle pour le premier et par la section de recherche de la brigade de gendarmerie de Niamey.Depuis ces dates, ils sont gardés à vue, accusés de trahison et complot présumés ayant pour but de porter atteinte à la sûreté de l’État, des faits prévus et punis par des dispositions du code pénal et du code de justice militaire. Malgré la gravité de l’accusation, aucun acte judiciaire n’a été posé dans ce dossier. Les deux accusés, tout comme les autres d’ailleurs, n’ont à ce jour été présentés ni au commissaire du gouvernement ni à un juge de l’ordre judiciaire. Et ce, en violation des dispositions du code de justice militaire dont la procédure a été empruntée pour l’enquête préliminaire. En effet, il ressort qu’en matière d’infractions prévues par ledit code, la garde à vue ne peut pas, dans tous les cas, même en période de guerre ou d’exception, dépasser un délai maximum de trente (30) jours. A l’expiration de ce délai, la personne détenue doit être libérée, sinon sa détention est arbitraire et viole les dispositions des articles 58, 61 et 65 de la loi n° 2003 – 010 en date du 11 mars 2003 portant code de justice militaire.
Les sieurs Abdourahamane Ben Hameye et Mohamed M’Barek sont donc en garde à vue de manière illégale, c’est-à-dire sans aucun titre de détention, depuis pratiquement 5 mois. Aussi, leurs conseils ont saisi le juge des libertés qui est le président du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey afin que les deux accusés puissent être autorisés à assigner en référé l’État du Niger aux fins de constater la voie de fait dont ils sont victimes et d’en ordonner sa cessation par leur mise en liberté. Une autorisation obtenue le 6 mars 2024.Initialement prévue le 12 mars, l’audience de référé a été renvoyée au 19 mars à la demande de l’État du Niger, représenté par l’Agence judiciaire de l’État (AJE). A cette date, les deux parties ont développé leurs arguments de droit devant le juge des libertés. Le jugement a été mis en délibéré pour le 2 avril prochain. Le droit sera-t-il dit ? La justice tiendra-t-elle compte de l’état de santé des deux accusés qui ne serait pas satisfaisant, même si le commissaire du gouvernement, lui, a toujours refusé une évacuation sanitaire ? Affaire à suivre…