Les économistes reconnaissent qu’une bonne gestion de l’urbanisation permet de stimuler la croissance et d’améliorer la qualité de vie. Par contre, une urbanisation mal gérée peut non seulement freiner le développement, mais aussi favoriser l’expansion des bidonvilles. De par son rythme et son ampleur, l’urbanisation de la ville de Niamey s’accompagne de défis considérables. Dans une correspondance datée du 06 février 2023, le Cabinet du Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou instruisait le Ministre de l’Intérieur de « bien vouloir prendre les dispositions urgentes en vue de trouver une solution définitive aux différents problèmes et autres dysfonctionnements liés, d’une part, à la gestion des voies de communication et, d’autre part, aux petits commerces le long des routes dans la ville de Niamey. Aujourd’hui, notre capitale ne reflète plus l’image que les autorités de la 7ème République désirent donner aux grandes villes du Niger ».
Recrudescence des installations anarchiques des kiosques de commerce, occupation illégale des trottoirs et des aires en dessous des échangeurs, défectuosité ou absence de feux de signalisation routière, tels sont, entre autres, les manquements pointés du doigt. Des manquements qui sont autant de signes révélateurs de la difficulté qu’à la ville de Niamey à rester en phase avec les attentes croissantes des citadins pour un avenir durable et prospère. D’où les instructions du Premier ministre à prendre en urgence toutes les dispositions idoines pour « assurer la sécurité et la fluidité de la circulation dans la ville de Niamey ».
Il faut savoir que dans chaque collectivité, c’est l’organe délibérant (conseil municipal, conseil général ou régional) qui décide de l’élaboration des politiques publiques locales. Le Premier ministre, lui, en sa qualité de chef du Gouvernement, dirige, anime et coordonne l’action gouvernementale. Par cette correspondance du 06 février dernier, le premier des ministres a abandonné son rôle. Voudrait-il faire un clin d’œil à l’Agence de modernisation des villes du Niger qui est un établissement public à caractère administratif rattaché au Cabinet du Président de la République ? De par sa mission principale qui est « la conception, la coordination et la mise en œuvre des projets d’aménagement et de modernisation des villes », l’AMV semble avoir été créée pour se substituer aux collectivités territoriales. Ce qui est une négation de la décentralisation. Par ailleurs, la lettre du PM ne concerne que Niamey alors même que les autres grands centres urbains du pays connaissent les mêmes problèmes d’aménagement que la capitale.
Les directives du Premier ministre annoncent, entre autres actions à venir, un déguerpissement des kiosques de commerce des rues de la capitale. Pour que leurs propriétaires aillent où ? Nulle part. Comment dans ces conditions favoriser les activités économiques quand des marchés ne sont plus construits ? Les travers dénoncés se rencontrent surtout aux alentours du « Grand Marché » de Niamey, le seul marché moderne de Niamey, qui date de 1982 et qui n’est pas sous la coupe de la Ville de Niamey. Au même moment, tous les marchés en région sont gérés par la mairie centrale. Si le gouvernement avait pensé à construire des marchés, cela aurait contribué à améliorer le visage de la ville métropole du Niger. Au Bénin voisin, où les dirigeants travaillent sérieusement pour leur pays, le gouvernement du président Patrice Talon a lancé en décembre 2019 un vaste projet de construction de 35 marchés modernes urbains et régionaux. Le premier lot a porté sur 9 marchés tous construits à Cotonou pour un coût total de 32 milliards de francs CFA. Le marché central de Tahoua, inauguré en février 2021, lui, a coûté 23 milliards de francs.
Mais de quoi cette correspondance du Cabinet du Premier ministre est-elle le nom ? Selon les observateurs, cette correspondance se veut un coup de semonce en direction du Conseil de Ville de Niamey, dirigé par un militant de l’opposition. Les actions à venir, pour corriger les manquements décriés plus haut, entreraient-elles dans le cadre d’une stratégie du PNDS – Tarayya pour contrôler Niamey, un fief du Moden – FA Lumana Africa de Hama Amadou ? Une capitale ne se contrôle pas que dans les élections.