La publication, ces derniers jours, d’un document intitulé « Règlement de la cour du Sultan de Dosso » est en train de diviser les Dossolais, les notables de la cour d’abord et leurs partisans. C’est dommage que les Dossolais se focalisent et se divisent autour d’un faux problème qu’est la position de certains notables dans la cour du Zarmakoye, dont la composition actuelle a été introduite de façon circonstancielle et incohérente par le Zarmakoye Seydou qui a régné sur le trône Boukar de 1924 à 1938. Tel n’est pas cependant ma préoccupation aujourd’hui. Je souhaiterais que nous nous mobilisons plutôt sur un sujet qui intéresse tous les quartiers historiques de Dosso, y compris le quartier Sirimbey et même les autres branches de la famille Kossom, à savoir : quelles démarches et actions entreprendre pour une saine application de la loi portant Statuts de la chefferie traditionnelle au Niger ?
Dans cette perspective, qu’il me soit permis de soumettre à la sanction des uns et des autres que le ministère de l’Intérieur soit saisi, le plutôt possible et de la façon la plus appropriée, par une lettre comprenant un préalable et la proposition d’un projet d’arrêté consensuel portant conditions de désignation et de déroulement du processus de désignation du Sultan de Dosso.
- Le préalable : Le Zarmakoye, chef de village de Dosso avant la colonisation ?
Il s’agit de détruire d’abord le mythe le plus dégradant parmi ceux qui réduisent le prestige du Zarmakoytarey, à savoir celui qui rabaisse le Zarmakoye au rang de chef de village avant la colonisation. En d’autres termes, Dosso et ses populations n’étaient rien avant l’arrivée des Blancs au Niger.
Ce mythe est fortement gravé dans l’imaginaire des Nigériens à tel point qu’il pollue même l’environnement du ministère de l’administration territoriale pour une saine application de la loi portant statut de la chefferie traditionnelle au Niger à la chefferie de Dosso.
En effet, dans toutes ses correspondances à l’occasion des recours en justice contre les désignations arbitraires et illégales du Zarmakoye, depuis la disparition du Zarmakoye Abou Aouta, le ministère de l’intérieur a toujours soutenu cette thèse, notamment à travers sa lettre n°0124/MI/AT/DAPJSAC-R du 17 août 2000 par laquelle il demanda l’ « avis de la Cour d’Etat sur la légitimité des candidatures à la succession de la chefferie de la province Dosso », parce que, selon lui, plusieurs réactions lui sont parvenues à propos de la liste des candidats objet de l’arrêté 226/MI/AT/DAPJ/CTAC/DACR du 9 août 2000. Pour éclairer la Cour d’Etat, le Ministre y affirma : « En effet, avant la pénétration coloniale, la province de Dosso n’existait pas. Il s’agissait plutôt d’une chefferie de village… » En d’autres termes, les ayants droits d’une chefferie de village ne peuvent pas prétendre à une chefferie de canton ou de province, comme il l’a explicitement exprimé en conclusion de sa lettre.
Aussi, est-il nécessaire, pour l’honneur des Dossolais, de donner les précisions ci-dessous afin de détruire ce mythe et établir la vérité historique Zarmakoytarey :
- Des Cantons, Provinces et Sultanats :
Qu’il me soit permis de rappeler que les cantons, les provinces et sultanats sont partout au Niger, à Dosso comme ailleurs, des créations de l’administration coloniale et, tout récemment, de la transition politique dirigée par Salou Djibo qui a érigé les provinces en sultanats. Ces notions étrangères à l’environnement de nos chefferies traditionnelles ont été introduites par des actes administratifs coloniaux. En outre, la création de ces entités coutumières n’était pas faite pour les beaux yeux d’un quelconque prince nègre, mais pour répondre aux préoccupations des autorités coloniales d’administrer leur territoire dans des conditions optimales de sérénité, en évitant au maximum des tensions inutiles entre les populations autochtones.
Aussi, ont-ils donné, dans la mesure de leurs intérêts, des limites géographiques arbitraires à des chefferies existantes et créer même d’autres ex nihilo. Rappelons que le canton de Dosso a été créé en 1901, et non en 1902, sous le règne du Zarmakoye Attikou et que, jusqu’en 1946, les Katchinawa de Maradi et les Gobirawa de Tibiri étaient réunis dans une même province, confiée à un certain Assaw, puisant chef de guerre Peulh du Katchina.
En conclusion, ce qu’il faut retenir ici, c’est qu’avant la colonisation, il y avait des chefferies traditionnelles qui ne s’appelaient ni canton ni province ou sultanat : c’étaient des Sarkin Gobir, Sarkin Katchina, Sarkin Damagaram, Sarkin Abzin et bien sûr Zarmakoye etc. Ce qui mérite d’être encore souligné, c’est que toutes ces chefferies que je viens de citer ont été élevées au rang de province ou de sultanat par le colonisateur. Elles avaient aussi leur mode coutumier d’accession au trône qui n’a pas échappé aux rédacteurs de l’ordonnance n°93-28 du 30 mars 1993 portant statut de la chefferie traditionnelle au Niger qui stipule en son article 9 que « —les chefs de province et les sultans, de par leur particularité, sont élus par un collège électoral prévu à cet effet par la coutume. » Cette ordonnance aux stipulations très pertinentes, rédigée avec compétence par des spécialistes bien avisés des questions de la chefferie traditionnelle au Niger, ne fait aucune différence entre les provinces et sultanats, si ce n’est par leurs coutumes respectives de désignation des chefs dont les territoires ont été ainsi arbitrairement limités : mode de désignation traditionnel du Sarkin Gobir, celui du Sarkin Damagara, du Zarmakoye etc. Le hic, c’est que Dosso fait partie des chefferies créées ex-nihilo par le colonisateur selon les détracteurs de la chefferie de Dosso, thèse que défend officiellement le ministère de l’Intérieur devant la Cour Suprême et que nous nous devons de détruire à jamais avec des preuves irréfutables.
- Le Zarmakoye simple chef de village avant la colonisation ?
Réduire le Zarmakoytarey à une simple chefferie de village avant la colonisation, est la plus grossière des insultes que l’on puisse nous faire, nous population de Dosso, car cela suppose que nous ne rentrons dans l’histoire qu’avec la pénétration coloniale et de la façon la plus déshonorante : une histoire de trahison à la cause de la résistance à la colonisation ! « Dosso n’était rien, son prestige est le fruit d’une collaboration exemplaire à l’entreprise coloniale » ! Ce mythe assassin que des Nigériens se plaisent à développer et à entretenir ! Je me limiterai à donner ici quelques repères historiques qui suffiraient, dans des dispositions normales d’esprit, à le faire voler en éclat.
-Sans remonter trop dans l’histoire, Nous dirons simplement que le Zarmakoytarey a été introduit dans l’espace nigérien actuel au 16e siècle par Mali Béro, soit trois siècles avant l’introduction du royaume du Katchina dans le même espace par Dan Kassawa en 1820. Son fils Tagour lui succéda à la tête du mouvement avec le titre fédérateur de tous les Zarma : Zarmakoye. C’est ce titre qu’il transféra à son tour à son fils Bukar avec tous les attributs, notamment le Toubal ou tambour royal, dans les conditions ci-après citées par Boubé Gado dans son livre ‘’le Zarmatarey’’ : « Après que le complot eut avorté, Taguru appela ses enfants : Sediam, Zama-Sega, Bukar, et Hali Koda. Il dit à Sediam : « j’ai vu ce que tu as voulu faire à cause de la chefferie. Tu ne seras jamais Zarmakoye, ni ta descendance. Tu ne commanderas jamais un Zarma ». Il dit à Zama-Sega : « tu ne seras pas Zarmakoye et ta descendance est appelée à disparaître parmi les Zarma ». A Bukar, il fit la prière suivante : « que Dieu te bénisse, qu’Il fasse que tu sois Zarmakoye, le « Kangarou », c’est à dire le « support », la racine des Zarma, leur appui et qu’aucun d’eux ne puisse te contredire, ni toi, ni les Zarmakoye qui descendront de toi » (souligné par nous).
-Comment donc cette chefferie acquise par Bukar à Kobi dans le Tondikanguey depuis environ en l’an 1600, après tant de convoitises et de bénédictions, soit réduite, comme une peau de chagrin, à sa plus simple expression de chefferie de village, une fois sa capitale installée à Dosso ? Il eut certes, au cours des migrations, des communautés indépendantes qui se sont formées avec la distanciation par rapport au centre, mais seuls les descendants de Bukar, installés aujourd’hui à Dosso détiennent la plénitude du titre de Zarmakoye hérité de Mali Béro avec tous ses symboles.
-Même en considérant simplement le groupe des Zarma, installés à Dosso vers 1750 sous la conduite du Zarmakoye Garanké, près d’un siècle avant l’avènement de Dan Kassawa à Maradi, de cette date à l’arrivée des ‘’Blancs’’ dans cette localité en1898, on aurait pu dénombrer une population au moins égale à celle de la province délimitant arbitrairement le territoire actuel du Zarmakoye.
-C’est ce que confirme J.P Rothiot dans son livre « Aouta le conquérant » en se limitant uniquement aux villages issus des quartiers historiques qui se partagent à tour de rôle le Zarmakoytarey. En effet, après avoir cité une trentaine de villages du Dosso Labou (le territoire de Dosso et non le village de Dosso !), il nous dit : « Chacun de ces villages a créé au cours des XVIIIe et XIXe siècles d’autres villages étendant dans l’espace l’influence du Zarmakoye de Dosso. En conséquence, les Koyizé, membres des lignages princiers de ces villages pouvaient aussi accéder à la chefferie : le Zarmakoye Gounabi régnait à Kayan, le Zarmakoye Abdou à Mokko, et Bakar fut Amirou à Tombokire.
Tous ces villages reconnaissaient donc l’autorité du Zarmakoye de Dosso et cette soumission se concrétisait par une série de redevances financières et de droits. Le Zarmakoye touchait des revus—Labu albarka, Zakhat, Ussiri, Kumuss, Suta—contrôlait la nomination des kwarakoye, supervisait la justice, autorisait le forage des puits —. » (cf. page 92).
Quels pouvoirs les autres chefferies traditionnelles, érigées en provinces et sultanats, avaient-elles de plus sur les villages composant leurs royaumes avant l’arrivée des Blancs ?
Le Zarmakoye Guirma, fondateur de la lignée de Sirimbey, régna quant à lui à Fadé Zéno ; et si ce n’est l’irruption du colonisateur, à la mort du Zarmakoye Attiku, Moussa Ouezakournié, le prince héritier, aurait régné à Deygorou. A ce propos, voilà ce que nous dit le colonisateur : « Moussa Ouezakournié, petit-fils du Djarmakoye Abdou—qui habite à Deygorou, effacé et complètement inconnu—avait été éliminé par nous de la succession d’Attikou (en 1901) et d’Aouta en 1913. »
Ainsi donc, les Zarmakoye indépendants de Kayan et de Mokko, dont parlent certains en faisant respectivement allusion à Gounabi (14e de la dynastie) et à Abdou Mokko (17e), ont tous régné sur le trône de Bukar, et pendant leur règne, il n’y avait pas, à Dosso ni ailleurs, d’autres Zarmakoye.
–Selon le Pr. Djibo Hamani, on connaît très peu de choses sur l’histoire précoloniale de Dosso. La seule référence crédible dont on dispose est qu’en 1800, le Kanta de Kabbi, se préparant à attaquer Dosso, a demandé du renfort auprès du Sarkin Gobir qui le lui a fourni. Avant d’engager l’opération, la coalition a pris soin de demander les services « mystiques » d’un grand marabout de la région de l’Ader qui lui a opposé une fin de non-recevoir. Le document, sans évoquer l’issue de cette confrontation, nous dit simplement qu’à leur retour, ils s’en sont pris à l’éminent marabout, acte qui serait à l’origine du déclanchement du djihad d’Ousmane Dan Fodio. (Voir « L’Islam au Soudan central » de Djibo Hamani à la page 230)
Quant à moi, je suis tenté de conclure, sans que cela soit ma préoccupation ici, que cette opération a été certainement un désastre pour ceux qui l’ont initiée et renforce l’image légendaire de Dosso comme cité imprenable.
Ce qui m’intéresse à travers ce récit, c’est de souligner que le Kanta de Kabbi ne s’était pas entouré de tant de précautions pour porter la guerre à une simple chefferie de village, et de conclure que cet épisode de l’histoire de la sous-région constitue une autre preuve irréfutable qu’avant la colonisation, Dosso n’était pas qu’un simple village entouré de villages indépendants, mais bien la capitale d’un Etat puissant et craint même par les plus grands de l’époque.
-La défense du Zarmatarey de l’Est (c’est dire le Boboye et le Zigui actuels) face à l’hégémonie peulh, le repli historique dans le fogha après la défaite de1831 à Zagoré face à une coalition peulh-touareg et Zarma de l’Ouest, l’organisation de la résistance et la vaillante libération du pays, étaient assurés par des populations aussi bien du Zigui que du Boboye, témoignant ainsi un fort sentiment nationaliste et d’appartenance à une entité commune, derrière l’autorité du Zarmakoye qui n’avait jamais été inquiété par un chef de guerre aussi puissant fût-il, contrairement au Katchina où les successions se faisaient essentiellement par coups de force successifs.
A partir des faits établis par des historiens de grande renommée au Niger, nous venons de vous livrer la preuve irréfutable que le Zarmakoye, loin d’être un simple chef de village avant la colonisation, était à la tête d’un royaume certainement plus vaste que la province que le colonisateur lui arbitrairement attribuée en 1936, un royaume puissant et craint même par les plus grands de l’époque, à savoir le Gobir et le Kébi.
II. De l’application de la loi portant statut de la chefferie traditionnelle à Dosso
- Du traitement différentiel de la chefferie de Dosso :
A présent que l’étendu du pouvoir du Zarmakoye est établi dans ses vraies dimensions historiques d’avant la colonisation, qu’il est établi que les Zarma de Dosso n’ont pas acquis leur chefferie par « des poulets et des œufs » comme le proclament avec plein d’ironie nos cousins Sonrhaï dans leurs plaisanteries de mauvais goût, comment justifier un traitement différentiel entre le Sultanat de Dosso et les autres, notamment celui de Maradi et celui de Tibiri (Maradi) ? Comment justifier que le Zarmakoye soit l’unique chef traditionnel du Niger à être nommé par l’administration en violation de l’article 8 de la loi portant statuts de la chefferie traditionnelle au Niger qui stipule que « nul n’acquiert la qualité de chef coutumier, s’il n’a pas été élu par un collège électoral –» ?
-S’agissant du Sultanat de Maradi, rappelons que par l’arrêt n° 5-15 du 15 juin 2005, la Cour Suprême a annulé l’arrêté du Ministère de l’Intérieur portant la liste des candidats à la succession de Bouzou Dan Zambadi ne comportant que trois noms de personnalités dont les parents ont régné sur la province depuis sa création par les Français, pour l’élargir à tous ceux dont les parents ont régné, d’une façon ou d’une autre, depuis l’avènement de Dan Kassaoua, fondateur du royaume du Katsina dans l’espace nigérien actuel vers 1820, en ces termes : «Que la transmission de la chefferie de Katsina se fait aussi bien en ligne directe qu’en ligne collatérale sans qu’il y ait établissement de nuance de degré entre prince ».
S’il y a une chefferie à laquelle colle si bien la disposition de l’arrêt n° 5-15 du 15 juin 2005 ci-dessus citée, c’est bien celle de Dosso. En effet, le long délai qu’exige le système de rotation entre les quatre lignées de base pour le retour de « la louche » dans un quartier donné, fait que personne ne peut prétendre être plus prince qu’un autre. Le choix du prince héritier se faisait donc démocratiquement et sans exclusif entre les candidats descendants du fondateur de la lignée. Cette disposition lui est d’autant plus appropriée que, contrairement à Maradi, la transmission s’y est toujours faite pacifiquement, sans coup d’Etat, suivant une tradition si bien établie qu’il n’arrive à aucun prince guerrier, aussi puissant soit-il, de vouloir prendre le pouvoir par la force : la force de la coutume l’oblige à attendre le tour de son quartier pour briguer le poste. Voilà pourquoi nous ne connaissons pas d’ancien Zarmakoye !
-En ce qui concerne Tibiri, le Ministre de l’Intérieur a pris un arrêté portant liste des candidats à la succession d’Agada Na Gogo comportant une trentaine de postulants dont certains appartenant à des lignées en rupture de règne depuis plus d’un siècle et demi.
A Dosso aussi, le ministère de l’Intérieur doit désormais se référer à la coutume en matière de désignation du Zarmakoye et cesser de violer la loi en la matière.
B-De l’application de la loi portant statut de la chefferie traditionnelle à Dosso
La loi portant statut de la chefferie traditionnelle stipule, en son article 8-alinéa premier, que « nul n’acquiert la qualité de chef coutumier, s’il n’a pas été élu par un collège électoral –». Cette stipulation énonce un principe catégorique, l’article 9 ne fait que préciser la particularité du collège électoral des provinces et sultanats et l’obligation faite au ministre chargé de l’administration territoriale de codifier les conditions et le processus de leurs désignations en ces termes : « Les sultans et les chefs de provinces sont désignés selon le mode de nomination consacré par leur coutume respective. Les conditions de désignation et le déroulement du processus de désignation du sultan et du chef de province sont fixés par arrêté du ministre chargé de l’administration territoriale conformément à la coutume de la communauté considérée. »
A cet effet, qu’il me soit permis derappeler ici la coutume authentique de Dosso en matière de succession au trône de Zarmakoy et même de proposer à l’examen des autorités traditionnelles et intellectuels dossolais compétentes une esquisse de projet d’arrêté à soumettre au ministre de l’Intérieur :
Les principes de dévolution successorale consacrés par la coutume de Dosso sont clairs et fortement ancrés dans la conscience populaire : c’est l’origine de l’expression populaire au Niger, dosso-dosso. Ils reposent sur une rotation entre les quartiers historiques qui sont : Manguékoira, Woudounkoukou, Sirimbey, et Koiratégui. Dossobéri est, quant à lui, le quartier du responsable du sacre.
La procédure retient deux niveaux de collège électoral :
– Le conseil de l’ensemble des quartiers désigne le « kurey Yérima », c’est-à-dire, le quartier à qui revient le droit de désigner le prince héritier ;
– Les chefs de famille du kureyYérima élisent, parmi les postulants ayants droit, un Yérima qui deviendra Zarmakoye à la vacance du trône.
En cas de décès du Yérima (avant le Zarmakoye), il sera demandé au même quartier de procéder une seconde et dernière fois, à l’élection d’un autre. Si celui-ci meurt aussi avant, la désignation du Yérima passe d’office au quartier suivant.
Ce schéma originel mérite bien entendu d’être actualisé pour tenir compte :
- Du statut légal désormais consacré à la chefferie traditionnelle et qui requiert subséquemment l’immixtion de l’autorité administrative dans le processus de désignation : ouverture de la vacance, arrêt de la liste des candidats, nomination de l’élu par arrêtés etc.
- La dispersion des familles issues des quartiers historiques de Dosso dans plusieurs villages du sultanat, rendant difficile leur recensement nécessaire à la constitution du collège électoral pour la désignation du prince héritier.
En conséquence, je propose que les considérations suivantes apparaissent dans le projet d’arrêté portantconditions de désignation et le déroulement du processus de désignation du Zarmakoye,sultan de Dosso :
-Si les postulants au titre de prince héritier doivent être nécessairement issus de la lignée du quartier retenu comme Kurey-Yérima, on peut cependant élargir son collège électoral à l’ensemble des chefs de villages du Sultanat, pour contourner la difficulté de recenser les chefs de famille de ce quartier disséminés actuellement dans plusieurs villages. Presque tous les villages de Dosso sont fondés par des princes issus des quartiers historiques, mais dans chacun d’eux vivent aussi des populations allogènes.
-Rappeler la place et le rôle du Sandi, gardien de la tradition et détenteur du sacre au trône de Zarmakoye, dans ce processus qui sera désormais écrit :
+ en cas de vacance, le Sandi assure l’intérim et la protection des biens du palais jusqu’à l’intronisation du nouveau Zarmakoye ;
+ prévoir une réunion de confirmation du prince héritier au trône de Zarmakoye présidée par le Sandi ;
+ le Sandi peut déclencher un processus de destitution du Zarmakoye ou du prince héritier pour incapacité ;
+ il préside le collège de validation des candidats au poste du prince héritier etc.
+ Nul n’acquiert le titre de Zarmakoye, sans le sacre du Sandi, symbolisé par l’enroulement du turban.
-Prévoir la place de l’autorité administrative dans le processus conformément à la loi : nomination du Zarmakoye par arrêté, ouverture de la vacance du poste de prince héritier, fixation de la liste des candidats au poste de prince héritier, décision administrative portant nomination du prince héritier etc.
Je soumets, ci-dessous à l’appréciation des intéressés, une esquisse de projet d’arrêté portant conditions de désignation et le déroulement du processus de désignation du sultan de Dosso, tenant compte des considérations ci-dessus.
Arrêté n°——–
Portant conditions de désignation et le déroulement du processus de désignation du sultan de Dosso.
Vu-
Etc.
Article 1er : La dévolution successorale consacrée par la coutume de Dosso repose sur un prince de rotation entre les quartiers historiques qui sont : Manguékoira, Woudounkoukou, Sirimbey, et Koiratégui.
Article 2 : Un conseil constitué par les chefs de quartier ou leurs représentants dûment mandatés, désigne le « kurey Yérima », c’est à dire le quartier à qui revient le droit de désigner le prince héritier ;
Article 3 : Le Sandi est le gardien de la tradition et le détenteur du sacre, symbolisé par l’enroulement du turban. Il préside le conseil des chefs de quartier et en cas de vacance assure l’intérim et la protection du palais jusqu’à l’intronisation du nouveau Zarmakoye,
Article 4 : Le Sandi déclenche le processus de destitution du Zarmakoye ou du prince héritier pour incapacité physique ou mentale dûment attestée par un certificat médical.
Article 5 : Tous les descendants du fondateur du Kurey-Yérima peuvent postuler au titre de prince héritier quel que soit leur lieu de naissance ou de résidence.
Article 6 : Le postulant au titre de prince héritier adresse sa candidature au gouverneur de la Région de Dosso revêtue de l’avis conforme du chef de village ou de quartier de son ressort.
Article 7 : Le gouverneur crée par arrêté (ou tout autre acte) un Conseil Consultatif ad hoc présidé par le Sandi, et composé des membres du Conseil des chefs de quartiers et des chefs des villages des postulants.
A l’expiration du délai de candidature, le Gouverneur soumet, pour avis conforme, les dossiers des candidats au Conseil consultatif qui, après enquête préliminaire, lui adresse la liste des candidats légitimes à postuler au poste du prince héritier du trône de Zarmakoye.
Article 8 : Après enquêtes de moralité, le Gouverneur dresse par arrêté la liste des candidats au poste de prince héritier.
Article 9 : Le corps électoral du prince héritier est constitué par l’ensemble des chefs de quartiers et de villages administratifs du Sultanat de Dosso.
Article 10 : Le Gouverneur détermine la date, le lieu et les conditions de déroulement des élections et sanctionne le résultat par un arrêté portant désignation du prince héritier au trône de Zarmakoye.
Article 11 : En cas de décès ou d’incapacité du prince héritier dûment constaté avant la vacance du trône, il sera demandé au même quartier de procéder une seconde et dernière fois, à l’élection d’un autre dans les conditions ci-dessus. Si celui-ci meurt ou est frappé d’incapacité dûment constaté avant la vacance du trône, la désignation du Yérima passe d’office au quartier suivant.
Article 12 : La vacance du trône est prononcée par arrêté du ministre chargé de l’Administration territoriale dans les conditions prévues par la loi et par un handicap mental irréversible dûment constaté par un médecin.
Article 13 : Le Sandi, après réunion de confirmation du Conseil des chefs des quartiers historiques, adresse par voie hiérarchique, le nom du prince héritier qui sera consacré Zarmakoye par arrêté du ministre chargé de l’Administration territoriale.
Article 14 : La vacance du poste de prince héritier est ouverte par le Gouverneur après les cérémonies d’intronisation au cours desquelles le Sandi consacre le titre de Zarmakoye au nouveau Sultan.
Article 15 : La rotation redémarre avec le quartier Woudounkoukou, quartier du prince héritier avant l’interruption du processus par l’administration coloniale.
Article 16 : La désignation des autres dignitaires de la chefferie de Dosso reste sans changement, strictement régie par la coutume.
Article 17: ————————— et le Gouverneur de la Région de Dosso, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’application du présent arrêté qui sera publié au Journal Officiel du Niger.
Telle est ma contribution pour une juste et saine application de la loi portant statuts de la chefferie traditionnelle au Niger à la dévolution successorale de la chefferie de Dosso selon la coutume. Dans ce sens, Dosso a toutes les ressources intellectuelles, plus spécifiquement des juristes, des historiens e des sociologues, pour aider le ministère de l’Intérieur à sortir de l’impasse. En effet, la loi oblige ce dernier à fixer par arrêté « Les conditions de désignation et le déroulement du processus de désignation du sultan et du chef de province conformément à la coutume de la communauté considérée. », mais il n’a aucune compétence pour le faire sans vous, autorités coutumières et intellectuels dossolais. Depuis fort longtemps, la balle était en réalité dans votre camp. J’espère que vous allez enfin vous décider à la saisir et la renvoyer dans le camp de l’autorité de tutelle.