Un verdict inattendu
Le 6 octobre 2023, une sentence du juge des référés du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey a retenti comme un coup de tonnerre. Elle estime que Salem Bazoum, fils de l’ancien président Mohamed Bazoum, est victime d’un trouble manifestement illicite : en somme, une détention abusive. Cette décision, bien au-delà de la lettre de la loi, sonne comme un avertissement que le CNSP, la junte au pouvoir à Niamey, ferait mieux de prendre en compte.
Un signal fort contre le CNSP
Ce verdict pose, en effet, une série d’interrogations inquiétantes pour le CNSP. Cette reconnaissance juridique de la situation de Salem Bazoum, ne serait-elle pas une porte ouverte pour Hadiza Bazoum, sa mère, également retenue sans justification apparente ? Et si elle se tournait, à son tour, vers la justice pour faire valoir ses droits ? Un tel scénario, s’il venait à se réaliser, fragiliserait davantage le CNSP.
Une épine dans le pied du CNSP
Cette victoire judiciaire des Bazoum au Niger pourrait avoir des ramifications bien au-delà des frontières nationales. En effet, plusieurs procès ont été intentés par les Bazoum, notamment devant la cour de justice de la CEDEAO, institution régionale ouest-africaine où Bazoum jouit toujours d’un soutien considérable parmi ses homologues chefs d’État. Si, hypothétiquement, le président déchu l’emportait également devant cette instance, il pourrait solliciter l’intervention du Conseil de sécurité des Nations Unies en faveur de son rétablissement à la tête de l’État. Une éventualité qui compliquerait davantage la situation pour le CNSP.
Bien que l’Agence Judiciaire de l’État, représentant l’Etat Niger lors du procès intenté par Salem Bazoum, ferait appel sans doute du jugement surprenant, le mal est fait. Les choix qui s’offrent aujourd’hui au CNSP sont délicats : libérer Salem, avec toutes les implications que cela suppose, ou continuer à le détenir, en étant qualifié de transgresseur des lois, s’exposant ainsi à des critiques internationales virulentes.
La nécessité d’un changement de cap
Face à ces enjeux, le CNSP doit impérativement repenser sa stratégie. Premièrement, il lui appartient d’engager rapidement des poursuites judiciaires contre Mohamed Bazoum, conformément aux déclarations antérieures du CNSP. En effet, sa détention prolongée sans justification légitime ne ferait qu’entacher davantage la réputation de la junte sur la scène internationale. De plus, le remplacement des magistrats et une révision du système judiciaire implacable, hérité du régime déchu, s’impose. Sans ces changements drastiques, le CNSP pourrait bien être confronté à l’avenir à d’autres déboires judiciaires, aux conséquences potentiellement désastreuses.