Nos oreilles bruissent du silence assourdissant de nos formations politiques, toutes tendances confondues. Depuis le coup de force du 26 juillet 2023 du général Abdourahamane Tiani et de ses compagnons, personne n’a entendu la moindre déclaration d’un chef d’organisation politique sur un sujet quelconque. Il est vrai que les activités des structures politiques ont été suspendues d’autorité par les hommes en uniforme qui ont fait intrusion sur la scène politique. Ce qu’il fallait comprendre et que ces leaders politiques feignent de ne pas comprendre, c’est que la libre expression est toujours permise, mais pas les manifestations organisées par des partis politiques.
Quelque part, si l’on veut aller au fond des choses, les Pères Fondateurs (PF) ont senti du soulagement à ne plus être sollicités à tout moment, et à tout propos par des militants plus aptes à quémander qu’à militer. De bonne guerre, ils ont intégré l’interdiction du CNSP, comme un ultimatum leur interdisant même la liberté d’expression à titre individuel. Ce qui, il faut bien le dire, ne correspond pas du tout à la réalité. Portons notre regard ou plutôt tendons nos oreilles pour capter ce qui se passe autour de nous, dans les pays voisins placés dans les mêmes conditions. Des pays comme le Mali, le Burkina Faso et la Guinée.
Au Mali, les partis politiques se rebiffent
Ici, comme ailleurs, les tenants du pouvoir en kaki ne sont pas pressés de fixer une date limitant leur présence sur la scène politique. Autrement dit, le processus pouvant marquer, de façon explicite, la fin d’une Transitions militaire n’est pas très lisible, pour ne pas dire existant. Récemment, quelque quatre-vingt (80) partis politiques, dont l’ADEMA ( qui a porté Alpha Omar Konaré à la magistrature suprême) ont adressé une missive au Colonel Assimi Goïta, pour lui demander de bien vouloir fixer une date pour la fin de la Transition et un retour à l’ordre constitutionnel. A ce jour, ils n’ont obtenu aucune réponse. Et le pouvoir semble se complaire dans le dilatoire. Il fait dire, par ses séides, que le Conseil National de Transition a bien proposé une fourchette connue de la Transition, qui va de six mois à cinq ans. Donc, le problème ne se pose pas, tant qu’on a pas excédé les 5 ans. A vrai dire, cette explication paraît oiseuse aux yeux des requérants. Pour ces derniers, il devient impératif d’arrêter des échéances claires et nettes. Ce à quoi se refusent les hommes forts du régime.
Même scénario au Burkina Faso et en Guinée
Les partis politiques, dans ces deux pays, piaffent d’impatience, exigeant que le pouvoir fixe officiellement les dates des prochaines consultations électorales, qui signifieraient, de facto, la fin de la Transition militaire. Ici aussi, les tenants du pouvoir semblent louvoyer pour on ne sait quelle raison. Tout se passe comme si tout était en attente d’un feu vert mystérieux. En réalité, pas si mystérieux que ça. Il est évident que ni Assimi Goita, ni Ibrahim Traoré, ni Abdourahamane Tiani, ni Mamady Doumbiya ne veulent s’éclipser, sur la pointe des pieds, des allées du pouvoir. Ils affinent leur stratégie pour trouver une voie acceptable par la ‘’Communauté Internationale’’, pour perdurer au gouvernail de leurs États respectifs.
La solution vient du Tchad et du Gabon
Après son coup d’Etat constitutionnel qui l’a élevé au rang de président de la Transition de son pays, suite à la mort tragique de son père, Mahatmat Idriss Deby Itno s’est déclaré candidat à la prochaine élection présidentielle de son pays. Sans soulever le moindre tollé. De la même façon que le pouvoir lui a été dévolu, de la même façon le pouvoir restera dans ses mains, avec l’aval, à peine voilé, des pays occidentaux, la France en tête. Pareillement, pour le Gabon où Brice OliguiNguema entend briguer la magistrature suprême de son pays, après avoir perpétré un coup d’Etat en bonne et due forme contre Ali Bongo. Et personne ne bronche. Au contraire, en sous- main, il reçoit toutes sortes d’encouragements possibles. Quel message envoie-t-on aux autres auteurs de coup d’Etat ?
Soyez candidats aux élections présidentielles de vos pays respectifs et si, chemin faisant, vous êtes obligés de prendre quelques libertés avec l’orthodoxie démocratique ou électorale, eh bien, ce n’est pas trop grave. On ne fait pas des omelettes sans casser des œufs.
A quoi bon s’exposer ?
Les militaires ayant la possibilité, ou au moins la tentation de s’incruster au pouvoir, ne vont certainement pas se gêner pour le faire. Ce qui veut dire qu’ils seront présents sur la scène politique durant, au moins, une décennie. A quoi bon jouer aux héros en venant les provoquer sur le terrain qu’ils maîtrisent de bout en bout. La sagesse dicte l’expectative, faire le dos rond et rester en embuscade sur le qui-vive. On ne sait jamais. Pour le moment, motus et bouche cousue. C’est la meilleure alternative pour survivre à la bourrasque…