Depuis son accession à la magistrature suprême de notre pays, Bazoum Mohamed semble avoir adopté une approche de gestion centralisée du pouvoir, suscitant des inquiétudes quant à l’équilibre démocratique et au bon fonctionnement du gouvernement. Son omniprésence dans le fonctionnement de nombreux ministères, notamment les Finances, la Défense, a créé une dynamique où le président est perçu comme “ministre de tout”.
Il est indéniable que la centralisation du pouvoir peut, dans certains cas, permettre une prise de décision plus rapide et plus cohérente. Cependant, cette approche ne manque pas de susciter des critiques et des tensions, notamment parmi les titulaires de portefeuilles ministériels. Déjà invisibles et transparents pour beaucoup, les ministres peinent à exercer pleinement leurs fonctions en raison de l’empiètement du président sur leurs prérogatives.
Le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou se trouve ainsi dans cette position délicate. Son rôle, traditionnellement consacré à la coordination de l’action gouvernementale, est éclipsé par l’implication directe du chef de l’État dans la gestion des affaires courantes de l’État.
Cette situation pose un défi à l’intégrité et à la dignité de la fonction présidentielle elle-même. En se positionnant comme un “ministre de tout”, Bazoum Mohamed risque de rabaisser la fonction présidentielle à un niveau opérationnel plutôt que stratégique. Cette posture pourrait affaiblir l’autorité et le prestige associés à la fonction.
Pour mettre fin à ce dérèglement démocratique, il est essentiel que Bazoum Mohamed relise la Constitution qui détermine une répartition nette des pouvoirs : le gouvernement «détermine et conduit la politique de la Nation», le président de la République «assure, par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ». En clair, le chef de l’Etat ne décide pas, il arbitre. Bazoum doit donc renoncer à cette omniprésence dans tous les domaines et faire confiance à ses ministres pour gérer leurs portefeuilles respectifs. En leur accordant une plus grande autonomie, le président de la République renforcera non seulement l’autorité de son gouvernement, mais aussi la sienne propre. Un président doit savoir prendre de la hauteur pour une bonne respiration démocratique de son pays.