Le rapport 2023 de la Cellule d’Analyse des Politiques Publiques et d’Évaluation de l’Action Gouvernementale (CAPEG) est une véritable bible d’éloges immérités faits à l’Exécutif en place. La Renaissance III s’investit dans la culture du mensonge.
L’art du bricolage
Le président de la République a fait un vœu dont il espère la concrétisation avant la fin de son quinquennat : « Je serais moi-même si au bout des 5 prochaines années j’aurais agi de façon à sensiblement améliorer, entre autres, la sécurité, la qualité de l’éducation, l’accès aux soins, à une meilleure alimentation, à l’eau potable, à un meilleur habitat, au courant électrique et à de meilleures routes au profit de tous les Nigériens », a déclaré Bazoum Mohamed le jour de son investiture. Il y a loin de la coupe aux lèvres, dit l’adage. Entre le souhait du chef de l’État et sa matérialisation, il y a un fossé à traverser, des embûches à surmonter, des défis à relever. Deux ans après la mise en œuvre du programme de Renaissance III, où en sommes-nous ? Vaste question à laquelle ne saurait répondre l’intéressé lui-même, encore moins le chef du Gouvernement. Heureusement, il y a la Cellule d’Analyse des Politiques Publiques et d’Évaluation de l’Action Gouvernementale (CAPEG). Cette entité rattachée à la Primature s’est chargée de bricoler (c’est le terme) un document pompeusement intitulé : RAPPORT SUR LA PERFORMANCE DE L’ACTION GOUVERNEMENTALE 2021-2022. Des résultats largement surestimés dans presque tous les domaines.
Éloge du mensonge
« Le présent rapport est élaboré sur la base d’informations fournies par les départements ministériels relativement à la mise en œuvre de leurs Projets Annuels de Performance. Il fait le point des deux années de mise en œuvre du Programme de Renaissance III en termes notamment de réalisations physiques et financières ainsi que de l’évolution des principaux indicateurs sectoriels », lit-on dans le mot introductif du fameux rapport. En clair, les différents ministres se sont arrangés pour concocter des bilans souvent surestimés voire mensongers, chacun en ce qui le concerne, dans le but d’enjoliver leur travail. « Relativement à la gouvernance économique, en dépit d’un environnement caractérisé par des chocs successifs, l’économie nigérienne poursuit sa dynamique de croissance. En effet, le taux de croissance économique s’établirait à 11,5% en 2022, dépassant ainsi la cible moyenne annuelle de 8% fixée par le Programme de Renaissance III », rapportent les rédacteurs de la CAPEG. Et d’ajouter : « Sur le plan économique, la dynamique de création de la richesse a fait preuve de résilience face aux effets des chocs exogènes. En effet, le Niger a enregistré en 2022 le taux de croissance le plus élevé de l’espace UEMOA et l’un des plus élevés en Afrique ». On ne sait d’où est-ce que la CAPEG a sorti ces données, mais il est certain que cette prétendue ‘’croissance’’ n’a nullement profité aux Nigériens dans leur grande majorité. La pauvreté s’est étendue dans notre pays ces dernières années. Le Niger est même devenu ‘’exportateur de mendiants’’, pour dire combien le bilan dressé par la CAPEG est à mille lieues de la vérité.
Le printemps des marchés truqués
« L’amélioration de la situation sécuritaire a permis de faciliter le retour des populations déplacées internes dans leurs localités d’origine notamment dans les régions de Diffa et de Tillabéry », annonce la CAPEG. Cette assertion est la preuve patente de l’insincérité inouïe qui caractérise le régime en place. Plusieurs dizaines de villages nigériens sont purement et simplement inhabitables du fait des actions meurtrières des groupes terroristes. Des centaines de classes sont fermées (sinon détruites) singulièrement dans la région de Tillabéri. « D’autres mesures ont également été prises dans le cadre de l’amélioration de la qualité des dépenses publiques », dit le rapport de la CAPEG. Dans les faits, la bonne utilisation des deniers publics n’est jamais la priorité des tenants du pouvoir. Le printemps des ‘’marchés par entente directe’’ bat son plein sous la Renaissance III. C’est le cas aux ministères de la Défense nationale, des Finances, de l’Intérieur, qui sont de véritables cavernes d’Ali Baba où des fournisseurs et autres prestataires de services véreux viennent faire leurs emplettes avec la complicité d’agents de l’État. « En matière de jeunesse, les efforts se rapportent à l’amélioration des conditions d’apprentissage et à la promotion des valeurs citoyennes », selon la CAPEG. C’est certainement l’un des plus gros mensonges contenus dans ce rapport. Bazoum n’est pas le ‘’président des jeunes’’. Les artifices politiques n’effaceront pas un maigre bilan. Quatre jeunes sur cinq vivent toujours en dessous du seuil de pauvreté et nombre d’entre eux rencontrent d’importantes difficultés pour obtenir un emploi stable. En termes de politiques publiques dédiées à la jeunesse, la Renaissance s’inscrit plutôt dans une longue tradition de l’inefficacité. L’an 2 au pouvoir de Bazoum Mohamed est donc pas celui des promesses non tenues pour les jeunes. Incapable de prendre à bras-le-corps les problèmes des citoyens ce, après deux ans d’existence, le régime en place s’investit dans la culture du mensonge. Le rapport 2023 de la Cellule d’Analyse des Politiques Publiques et d’Évaluation de l’Action Gouvernementale (CAPEG) en est la preuve.
La Rédaction