Hier encore, la simple allusion à une improbable fédération de plusieurs Etats africains vous faisait passer pour un illuminé, ou, à tout le moins, à un rêveur impénitent. Non pas dans la tête de ceux qui nous ont dominé et exploité des siècles durant, mais bel et bien dans celle de quelques Africains complexés, issus, généralement d’une petite bourgeoisie compradore, c’est-dire celle qui a ses intérêts étroitement liés à ceux de l’extérieur. Hier encore, les membres fondateurs de l’Alliance des Etas du Sahel (AES), le capitaine Ibrahim Traoré, le colonel Assimi Goita et le général
Abdourahamane Tiani, étaient qualifiés par leurs pairs de la CEDEAO d’égarés qui ne devraient pas tarder à venir à résipiscence. Pour une fois, les rêveurs ne sont pas du côté que l’on croit. On a du mal à accepter que tous ces chefs d’Etats, ou presque tous, ontleur discernement oblitéré au point d’oublier, ou snober, toutenotion de dignité et de responsabilité, sans même parler du désir ardent de souveraineté qu’ils devraient, tous, avoir chevillé au corps. A moins que par une sorte d’inversion des valeurs, fruit de leur aliénation culturelle, ils s’imaginent que le sort du soumis, de l’esclave, vaut mieux que celui d’homme libre et responsable. A moins que, conscient de leur veulerie, ils ne cherchent à masquer gauchement leur nature profonde de larbin du néocolonialisme. Disons-le, et répétons-le. Il faut lutter contre certaines formes d’impérialisme, étant entendu que certains de ses aspects peuvent être positifs, mais le néocolonialisme, lui, est le mal absolu, sans une once d’odeur positive. Il doit être combattu, en tout lieu, de tout temps, et sans relâche.
Niamey, capitale du Niger, a accueilli le 06 juillet 2024 le 1ersommet des Etats de l’AES. Les observateurs espéraientlégitimement l’annonce d’une fédération, c’est-à-dire un Etat rassemblant le Mali, le Burkina Faso et le Niger. A défaut de ce grand bond, l’on a dû se contenter d’un succédané de confédération qui, de prime abord, n’apporte pas un plus significatif par rapport au statu quo ante. Du moins, c’est ce que pensent la plupart des observateurs, à tort ou à raison. Il reste qu’on a mis sur la table deux atouts majeurs : un dispositif sécuritaire unifié et une Banque Centrale d’Investissement. Cette dernière sera-t-elle encore tributaire de l’UEMOA ? Si, oui, la route est encore longue, si c’est non, une ébauche d’un rapprochement avec un autre organisme rival du FMI, dépendant du groupe des BRICS, est nécessaire. Cela changera tout. Dans l’incapacité d’être catégorique, essayons d’éviter tout procès d’intention. Retenons le cri ducœur du capitaine Ibrahim Traoré : la patrie ou la mort, Nous vaincrons !