Fin de vacances pour le président de la République. De retour de son terroir natal, Bazoum Mohamed est-il prêt à affronter la multitude de priorités qui l’attendent ? Cinq mois après son accession au pouvoir, le “temps de tâtonnement’’ est fini pour le chef de l’État.
Sortir du brouillard
Pendant deux longues semaines, Bazoum Mohamed a communié avec la région qui l’a vu naître. Ce n’est pas son premier retour vers ces terres qui lui sont si familières, sauf que cette fois-ci il y est retourné avec la plus haute fonction du pays sur les épaules. De belles ‘’images de cartes postales’’ ont fuité de ce séjour présidentiel. Mais les préoccupations des Nigériens sont à mille lieues des paysages verdoyants de Tesker et ses environs. C’est un euphémisme de dire que l’état de grâce est fini pour le chef de l’État. « Avec vous, pour vous, je serai un Président de la République au service de la paix, du progrès et du bonheur du peuple nigérien », a dit Bazoum Mohamed dans son discours d’investiture. Cinq mois plus tard, il a largement eu le temps de prendre toute la mesure de ses nouvelles fonctions afin de donner vie aux engagements qu’il a pris vis-à-vis de ses concitoyens. Après son repos annuel, le président de la République entre dans un ‘’moment de vérité’’. Le temps est venu pour lui de sortir du brouillard qui obstrue tout début de mandat.
Les dossiers décisifs
L’heure est venue pour Bazoum Mohamed de s’attaquer aux dossiers décisifs de son quinquennat. Avec un taux de réussite national de 20.50%, la session 2021 du Brevet d’Études du Premier Cycle (BEPC) est le reflet d’une école qui va à vau- l’eau depuis une décennie. La même tendance désastreuse est observée au niveau des résultats du Baccalauréat de cette année. « Pour mettre fin à cette situation, je ferai de l’éducation un domaine dont je m’occuperai personnellement (…) », a promis Bazoum Mohamed dans son discours d’investiture. Pour l’instant, le chef de l’État n’affiche à son actif qu’un seul internat dédié aux jeunes filles à Kellé dans la région de Zinder. Il ne fait aucun doute que Bazoum Mohamed a fort à faire dans le domaine de l’éducation. Notons que la rentrée académique 2021-2022, prévue pour ce 1er septembre 2021 dans les Universités publiques, est reportée au 13 du même mois. Il est à craindre que d’autres reports ne surviennent. L’autre défi de taille qui se dresse devant le chef de l’État est la menace sécuritaire. Les discours volontaristes et autres postures triomphalistes de l’Exécutif sont loin de constituer des réponses efficaces et pérennes à la montée en puissance des nébuleuses terroristes. Pendant que le président de la République se prélasse dans sa région natale, plusieurs dizaines de nigériens (civils et militaires) ont perdu la vie du fait d’attaques terroristes. De par ses fonctions, Bazoum Mohamed est comptable de cette hécatombe, il ne peut s’en dédouaner.
Convaincre et rassurer
Un autre dossier crucial qui attend le président de la République a pour nom la lutte contre la corruption. On peut féliciter Bazoum Mohamed d’avoir commandé les Inspections Générales d’État (IGE) ayant mis au jour l’affaire dite ‘’Ibou Karadjé’’. Seulement, cette démarche est voilée de scepticisme dans l’opinion publique nationale. Le Chef de l’État aura-t-il le courage politique de donner un coup de pied dans la fourmilière de la corruption ? Nombreux sont les Nigériens qui en doutent. « Mon objectif est (…) de réduire le taux de pauvreté de 43% à 25% en 2025 », a laissé entendre Bazoum Mohamed. Comment compte-t-il s’y prendre pour parvenir à ce résultat ? C’est toute la question. Jusqu’ici, le chef de l’État n’a pas cru utile d’actionner les leviers dont il dispose pour prendre des mesures sociales fortes (par exemple la baisse de prix dans le domaine alimentaire, de l’électricité, de l’eau, des hydrocarbures, etc.). À ce niveau, il y a une certaine déception au sein de la population en proie aux conséquences négatives de la crise sanitaire de la Covid-19. À propos justement de cette pandémie qui est loin de se tasser, entre des statistiques quelque peu imprécises et un taux de vaccination quasi nul, les Nigériens ont comme l’impression qu’ils sont abandonnés à eux-mêmes par le régime en place. Il est clair que Bazoum Mohamed se doit de convaincre et de rassurer ses administrés quant à ses capacités à diriger le pays, à faire face aux défis de tous ordres.
S. Tiégoum