Si l’on veut être honnête envers soi-même, on reconnaîtra que le choix de Lamine Zeine comme Premier ministre d’un gouvernement né du pronunciamiento du 26 juillet 2023 était loin d’être prévisible et encore moins souhaité par les grands Commis de l’Etat, tous indéniablement compétents, qui se bousculaient au portillon pour accéder à cette responsabilité de haut vol. Rien ne prédestinait Ali Lamine Zeine à assumer, en ces circonstances délicates, la lourde charge de conduire un gouvernement auquel est promis les pires difficultés, du fait de son isolement drastique et immédiat ( CEDEAO et UEMOA)
Pour l’observateur scrupuleux , la visite de Mahamat Idriss Deby Itno au Niger, en tant que médiateur (autoproclamé) de la CEDEAO et de l’UA a eu, incontestablement, un effet déclencheur sur le choix opéré par le général de brigade Abdourahamane Tiani et ses frères d’armes. Pour autant, peut-on dire que le Premier ministre du Niger est sorti, comme par enchantement, ex nihilo, du chapeau d’un prestidigitateur, au grand ébahissement du public ? Non ! Car l’homme ainsi distingué a des ressources indispensables, si l’on veut que la Transition en cours soit une réussite.
L’équation Lamine Zeine
A 59 ans, malgré des dehors affables, cet homme fait preuve en toutes circonstances d’un esprit fort, positif et persévérant. Il est né en 1965 à Zinder, ce qui lui confère une certaine assise au plan politique, et explique partiellement pourquoi le défunt président Tandja Mamadou l’a extirpé de l’anonymat pour le propulser ministre des Finances de 2002 à 2010.
Certes, il a un background solide de par sa formation à l’ENA de Niamey et au CEFED de Marseille, mais, c’est surtout sa personnalité de rassembleur, aux antipodes du diviseur, qui le distingue du lot, et dirige les regards scrutateurs sur son choix.
Dès sa nomination, le 09 Août 2023, au poste prestigieux de Premier ministre, il a immédiatement mis en exergue son souci d’apaiser les tensions latentes entre les différents acteurs sur le terrain politique. Il n’a pas fait d’ostracisme sur les mérites de tous ceux qui ont eu à diriger ce pays, le Niger, allant de Diori Hamani à Issoufou Mahamoudou et Mohamed Bazoum. Ce qui d’ailleurs, comme on l’a vu, n’a pas manqué de soulever quelques quolibets. Qu’importe. Droit dans ses bottes, il continue d’œuvrer dans la voie de la réconciliation de tous les Nigériens, appelés à dépasser le factuel, pour préserver le noyau dur de la cohésion sociale. Difficile dans ces conditions de ne pas prêter oreilles à un tel cheminement discursif. Il faut donc en conclure que nos prétoriens ont eu du flair en le nommant à la fonction qu’il occupe actuellement et qui lui sied comme un gant.
Certains pourraient déplorer son léger effacement, voire sa frilosité apparente sur la scène nationale. Erreur. Grossière erreur. Pour la simple raison que cet homme à la modestie proverbiale préfère travailler sans tambour ni trompette et, au bout du compte, finir par étonner ses vis-à-vis par l’ampleur du travail accompli, et bien accompli. Voilà, essentiellement, toute l’équation de Lamine Zeine, l’homme du Peuple.
Des grincements de dents prévisibles
Du fait de sa probité intellectuelle indéniable, Ali MahamanLamine Zeine est souvent amené à hérisser les poils de ses différents interlocuteurs, collaborateurs ou partenaires. Parce qu’il ne peut dissimuler de manière fourbe le fond de sa pensée. Il peut avoir des velléités de contester des orientations mal élaborées, inopportunes et même contre-productives, mais suivra la ligne impulsée par les tenants du pouvoir, par esprit de pure discipline de groupe. Quoi qu’il en soit, le général de brigade Abdourahamane Tiani sait, plus que quiconque, faire la part des choses, et discerner ce qui est néfaste pour le pays de ce qui, au contraire, peut booster ses intérêts à plus ou moins long terme. Et pour cela, Ali Mahaman Lamine Zeine est l’homme qu’il faut, à la place qu’il faut. Sans forfanterie.