Pour lutter contre la pauvreté, améliorer les conditions de vie des populations, offrir des infrastructures et des services de santé et d’éducation adéquats, le Gouvernement a besoin de ressources financières suffisantes, stables et prévisibles. C’est dire qu’une attention toute particulière doit être accordée à la mobilisation des ressources publiques fiscales intérieures. Malgré le recours à des experts français et au Projet d’Appui à la Mobilisation des Ressources Intérieures, PAMRI en abrégé, qui accompagnent les régies financières de notre pays (DGI, DGD, DGTCP) en termes de formation et de dotation en matériels notamment, ces ressources publiques intérieures sont loin d’être à la hauteur des attentes. Les recettes fiscales se sont repliées de 3% en 2020, après une baisse enregistrée en 2019. Elles sont ressorties à 760,1 milliards de francs CFA en 2020 contre 783,6 milliards en 2019 et 787,7 milliards en 2018. Conséquence : le Niger fait face à une situation de trésorerie très critique qui le maintient dans une position de précarité permanente.
Perspectives fiscales peu reluisantes
Le 05 septembre dernier, les administrations fiscales de notre pays étaient en atelier de formation sur l’élaboration des modèles de prévisions des recettes fiscales et douanières, avec le concours d’un consultant international payé par le PAMRI. Mais les réformes des finances publiques notamment dans le domaine de la mobilisation des ressources intérieures n’ont jusque-là pas permis au Gouvernement d’assurer, de façon durable, le financement de ses besoins au profit des populations. En cause, les grands écarts entre les prévisions de recettes et les réalisations. Depuis plusieurs années, le processus budgétaire est caractérisé par ces écarts. Outre une mauvaise allocation et répartition des crédits budgétaires et des choix économiques contestables (des investissements en infrastructures qui n’impactent pas la croissance économique), les réformes des finances publiques qui devaient permettre à l’économie nationale d’être résiliente face aux chocs n’ont pas toujours été concluantes. Au niveau de la Direction Générale des Impôts (DGI), sur 409 milliards de francs CFA de prévisions de recettes fiscales au titre du premier semestre 2022, il a été mobilisé 326 milliards, soit un gap de 83 milliards. Et sur la même période en 2021, sur 356 milliards attendus, il a été réalisé 341 milliards de recettes, soit un gap de 15 milliards. Et cette situation risque de se détériorer davantage au cours du deuxième semestre 2022. Les plus gros impôts, c’est-à-dire les impôts sur les bénéfices, ont déjà été payés (au plus tard à la fin du mois d’avril de chaque année). Par ailleurs, jusqu’à 70% des redressements fiscaux tombent en contentieux administratif.
Doutes autour du contrôle fiscal
Le système fiscal nigérien est déclaratif. Les déclarations fiscales du contribuable sont-elles de bonne foi ? Seul un contrôle fiscal pourrait le déterminer. Les services fiscaux ont récemment infligé un redressement fiscal d’environ 80 milliards de francs CFA au député et hommes d’affaires Halifa Abdourahamane dans le cadre d’activités liées à l’exportation d’or vers Dubaï. En matière fiscale, la preuve est matérielle. Et des documents douaniers, où figurerait le nom du député, attestent que de l’or a bien été exporté, et les quantités précisées. Mais pour l’homme d’affaires mis en cause, cet or ne lui appartiendrait pas, il n’aurait fait que raffiné cet or ici à Niamey pour ensuite l’exporter. Quoi qu’il en soit, le dossier est aujourd’hui en examen au niveau des services des contentieux de la DGI. Ce dossier connaitra-t-il un traitement rigoureux, impartial et définitif ? Ce n’est pas évident tant on prête à nos opérateurs économiques, surtout ceux qui sont proches du pouvoir, d’influencer sur certaines nominations au sein de l’Administration fiscale. Affaire à suivre…