Une balade dans les rues de Cotonou laisserait croire à l’étranger séjournant dans la capitale béninoise que les activités économiques ne sont pas tellement affectées par les sanctions ‘’illégales et criminelles’’ imposées au Niger par la CEDEAO depuis le 30 juillet 2023, en représailles au renversement du président Bazoum par l’armée 4 jours plutôt.
L’application desdites sanctions inhumaines, comme on le sait, s’est systématiquement traduite par une fermeture des frontières béninoise et nigériane ainsi que l’interdiction du port de Cotonou aux marchandises à destination du Niger par la suite.
Les populations nigériennes ont stoïquement souffert de cette fermeture des frontières, surtout celle béninoise, car ayant entraîné des difficultés d’approvisionnement du pays en denrées alimentaires, en médicaments et autres biens divers importés, le port de Cotonou étant notre principal corridor maritime.
Les populations béninoises ne sont pas en reste. Derrière l’animation fébrile dans les rues d’une ville où le commerce de proximité est très répandu [à la devanture de quasiment chaque maison y compris dans les quartiers résidentiels, on trouve un petit kiosque de vente de nourriture ou de boissonsou d’autres produits], l’amertume des commerçants est profond à cause de la rareté de la clientèle.
‘’Y a plus beaucoup de clients ; on se débrouille seulement, mais c’est très dur ! Vous êtes mon premier client de la journée, merci beaucoup, que Dieu vous bénisse’’, nous complimente une dame, gérante d’une boutique au quartier Védeko de Cotonou, pour juste l’achat d’un tube de pâte dentifrice et d’une brosse, à moins de 1.000 FCFA.
Et pourquoi la clientèle se fait-elle rare aujourd’hui ? La commerçante rétorque spontanément : ‘’C’est la fermeture de la frontière avec le Niger qui a tué notre port ! C’est une mauvaise décision, cette fermeture de la frontière avec le Niger acceptée par Talon parce qu’il n’y a plus d’affluence d’étrangers à Cotonou depuis lors. Et c’est ça qui fait qu’on n’arrive plus à faire de bonnes recettes aujourd’hui. C’est dur !’’
Du petit vendeur de babioles au gros boutiquier en passant par les hôteliers, les intermédiaires dans les transactions d’achat de véhicules, les vendeurs de nourriture, c’est le même refrain sur toutes les lèvres.
‘’Mon frère, laisse tomber seulement ! C’est une grosse bêtise, la fermeture de la frontière béninoise avec le Nigerpar nos autorités. C’est la galère que nous vivons aujourd’hui parce qu’il faut travailler dur toute la journée pour trouver l’argent de versement au propriétaire de la moto’’, confie un ‘’Djemijan’’ sollicité pour une course.
‘’Avant la fermeture de la frontière et ensuite du port aux marchandises nigériennes par nos autorités, la collecte du versement journalier ne me posait aucun problème parce que j’avais 5 abonnés nigériens réguliers qui venaient au moins une fois par mois pour des transactions commerciales et restaient une semaine, voire plus à Cotonou’’, déclare-t-il.
‘’Je gagnais suffisamment d’argent avec eux et je mangeais même aux frais de la princesse quand je les transportais au niveau de certains restaurants. Tout ça, c’est fini depuis la fermeture de la frontière parce qu’ils ne venaient plus’’, regrette-t-il.
Cette récession des activités économiques au Bénin, liée à la fermeture de la frontière, est vécue avec amertume dans toutes les villes et villages provinciaux du Bénin. Comme l’atteste le témoignage de cette vendeuse d’ignames, Gari, Atiéké et fruits divers très prisés par les consommateurs nigériens interrogée à Abomey-Calavi, à l’entrée de Cotonou.
‘’Ce sont les Nigériens qui nous prennent en quantité ces aliments-là, ceux qui l’achètent ne viennent plus à cause de la fermeture de la frontière. Nous voyons seulement lessaisonniers qui viennent aussi chercher de l’argent dans le commerce comme nous’’, dit la dame qui suit apparemment l’actualité.
‘’Avec la réouverture de la frontière suite à la réunion de la CEDEAO, nous espérons que les choses vont rapidement rentrer dans l’ordre, la fréquentation du port par les commerçants nigériens va reprendre pour nous permettre de souffler’’, souhaite-t-elle.
Du côté béninois, la réouverture officielle est effective ; mais ce n’est pas encore le cas au Niger où la population comme le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) craignent un piège pour tenter de déstabiliser le Niger, du fait de l’implantation de positions militaires françaises dans cette région du Bénin.