Tel un guerrier désabusé, harassé et éprouvé par des années de combats politiques ardus, Hama Amadou a, de toute évidence, remisé ses armes. Le leader du Moden FA Lumana est-il au crépuscule de sa carrière politique hors normes ?
En dents de scie
Les dieux de la politique (s’ils existent) n’ont pas été particulièrement tendres avec Hama Amadou. Ce dernier est aujourd’hui un homme meurtri, au sens fort du terme. Constamment en dents de scie, le destin politique de l’ancien président de l’Assemblée nationale a été maintes fois contrarié : « […] vous m’avez désigné comme votre candidat de 2021. Je serai, par la grâce de Dieu, candidat. Personne sur terre ne saurait l’empêcher ou il sera lui-même empêché », a-t-il promis à ses militants le 13 mai 2018. Ça été un autre rendez-vous manqué avec l’Histoire pour le leader du Moden FA Lumana. L’Histoire a aussi retenu le coup de poignard dans le dos que lui ont asséné certains de ses compagnons politiques du MNSD-Nassara. En 2008, Hama Amadou est arrêté pour détournement présumé du fonds d’aide à la presse quelques mois après la motion de censure de l’opposition et d’une partie de sa propre majorité l’ayant poussé à démissionner de son poste de Premier ministre de Tandja Mahamadou. Comme quoi, Hama Amadou a connu des vertes et des pas mûres, pour reprendre l’expression. À 73 ans, l’ancien allié d’Issoufou Mahamadou a-t-il encore les ressources physiques et psychologiques pour mener d’autres combats politiques ? C’est la question que se posent nombre d’observateurs de la scène politique nigérienne.
Le chant du cygne ?
Selon une croyance née dans la Grèce antique, le cygne, connu pour son chant dissonant, ‘’aurait un moment de grâce musicale juste avant de mourir’’. Si le cri du cygne existe en politique, Hama Amadou ne l’a-t-il pas entonné durant la dernière campagne électorale ? Loin du Niger, le leader du Moden FA Lumana n’est-il pas au crépuscule de sa carrière politique hors normes ? Un fait est certain, depuis qu’il a épaulé Mahamane Ousmane lors des dernières élections présidentielles, Hama Amadou a perdu le goût de la politique, pour ainsi dire. Désabusé, l’ancien ‘’homme de confiance’’ de Tandja Mamadou a pris l’option de prolonger indéfiniment son ‘’séjour médical’’ en France. Dans les rangs de l’opposition politique, d’aucuns trouvent le jeu de Hama Amadou et ses proches lieutenants pour le moins ambigu. Il se dit que l’ancien président de l’Assemble nationale et certains de ses ouailles ont un pied dans l’opposition politique et l’autre dans la majorité au pouvoir. Vrai ou faux, Hama Amadou est de plus en plus en déphasage avec ses troupes. Nombreux sont les Lumanistes qui ne se reconnaissent pas dans la posture adoptée par leurs dirigeants, Hama Amadou en premier.
Un paquet d’erreurs
Tout futé qu’il soit en politique, Hama Amadou a néanmoins commis un paquet d’erreurs. En apportant son soutien à Issoufou Mahamadou en 2011 a-t-il été bien inspiré ? En brisant l’alliance qui le lie au PNDS-Tarraya en 2013 a-t-il fait une lecture circonstanciée de la donne politique de l’époque ? Beaucoup d’analystes en doutent. Hama Amadou c’est aussi un ego politique quelque peu démesuré. En 2020, malgré ses immenses déboires politico-judiciaires, il a obstinément refusé de faire désigner un autre candidat pour défendre les couleurs du Moden FA Lumana lors de l’élection présidentielle. C’est connu de tous, le soutien accordé à Mahamane Ousmane n’a pas été une décision lumineuse de la part de Hama Amadou. Ce dernier et ses deux principaux lieutenants (Oumarou Dogari et Soumana Sanda) risquent d’être les perdants d’un jeu qu’ils sont en train de mener sans l’assentiment d’une très grande portion de leurs militants et sympathisants. Bien malin celui qui peut prédire la moisson du Moden FA Lumana à l’occasion des prochaines élections générales (2025-2026). Entre erreurs et egos politiques mal placés, Hama Amadou risque de précipiter le déclin de sa famille politique. C’est du moins l’avis de plus d’un observateur.