Quel tintamarre ! Quelle frénésie ! Pour le premier anniversaire de l’ « opération militaire spéciale » de Vladimir Poutine en Ukraine (24/02/22) que n’avons-nous pas entendu ? Un véritable matraquage qui frise le lavage de cerveau. La Russie agressive, belliqueuse, dépeinte sous les traits d’un nouvel Hitler, à qui, il ne faut rien céder pour ne pas renouveler les reculades honteuses des accords de Munich en 1939. On a pensé éviter la guerre quitte à assumer une honte ineffable, ineffaçable. On a eu la honte et la guerre.
Qu’à cela ne tienne ! L’Europe est à nouveau menacée, et tous les moyens sont bons pour ne pas tomber dans les mêmes errements. Toutes les formes de persuasion, voire de coercition seront les bienvenus pour s’assurer la maîtrise du péril qui pointe son nez. A cela, il n’y a rien à dire, ou à redire. C’est de bonne guerre.
Seulement, quand on s’évertue à vouloir culpabiliser les pays Africains qui traînent à adhérer à la dynamique occidentale, là, la conscience éveillée se braque. Qu’est-ce à dire ? Que veut-on de nous ? Jusqu’à preuve du contraire, l’Afrique et l’Europe ne sont pas des sœurs jumelles. Quand bien même elles le seraient, on ne peut en déduire qu’elles ont les même intérêts et les mêmes façons d’appréhender le réel. Des lectures différentes se prêtent à la compréhension du choc de la guerre Russe en Ukraine et de ses conséquences sur le plan planétaire. De ce fait, l’Afrique ne devrait avoir aucune propension à jouer au béni-oui- oui, envers qui que ce soit ! Ses yeux doivent être rivés sur ses intérêts intrinsèques à court, moyen ou long terme. Pour ce faire, il lui faut voir, analyser et comprendre les ressorts et enjeux soumis à sa sagacité. Rien de moins. Rien de plus.
Redistribution des cartes
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, a dit Lavoisier. Et l’astrophysicien complète la loi en précisant qu’une action sur un atome dans un coin de l’univers provoque instantanément une réaction sur son semblable à l’autre bout du cosmos, sans qu’on puisse expliquer ni pourquoi, ni comment. Tout est lié. Tout se tient. Ce qui se passe en Ukraine a nécessairement des répercussions au Sahel, et réciproquement. Peu ou prou, ici et maintenant, les quatre acteurs principaux concernés par l’évolution de la crise que sont l’Europe, la Russie, la Chine et les Etats-Unis d’Amérique, tous les quatre des puissances nucléaires, nous font penser irrésistiblement aux quatre cavaliers de l’Apocalypse, décrits dans l’Ancien Testament. Incontestablement, ils sont les maîtres du jeu, et détermineront inéluctablement le destin du genre humain. Que va-t-il se passer ? Un nouveau Yalta ou la fin de tout ? Qui le sait ? Toujours est-il que l’enjeu primordial demeure le sort de l’Europe, de l’Atlantique à l’Oural, configuration escomptée par le général Charles De Gaulle en son temps. L’Europe actuelle n’a pas son centre de gravité en elle-même. Elle a, semble-t-il, renoncé à se créer sa propre défense et doit donc se mettre sous la protection de l’Oncle Sam. Dérive impulsée par l’Allemagne et fermement combattue par la France. Induction ? Ailleurs, et notamment en Afrique subsaharienne, il faudra faire, nolens, volens, de la place en Afrique, aux Etats-Unis d’Amérique, en guise de compensation. Il n’en reste pas moins que l’Europe rêvée, de l’Atlantique à l’Oural est en train de s’affaiblir, laissant en tête à tête, deux géants, USA et Chine, pour les futures empoignades déjà programmées.
Egocentrisme
On peut soutenir l’Ukraine et espérer que la Russie mette un genou à terre. Pourquoi pas ? Mais pour quels avantages pour les Africains ? Pour que les Européens restent semi-indépendants chez eux ? Maintenir le statu quo pour les subsahariens, est-ce la meilleure option ? Les avis sont partagés pour le moins. Certains s’enthousiasment pour le combat Ukrainien, d’autres, par contre, décrient l’aide massive que ce pays reçoit au détriment des pays qui végètent dans la misère. Pour ces derniers, ventre vide n’a pas d’oreille. Nous avons subi un système depuis des siècles. N’a-t-il pas atteint ses limites ? Son seuil d’incompatibilité avec les dynamiques ambiantes ? Par principe, il faut toujours chercher à innover, à réorienter, à redéfinir de nouvelles perspectives. Encore faudrait-il que l’on vous laissât le temps de porter librement à maturation vos cogitations ! Soutenir l’Ukraine ? Soit ! Mais, ne nous bousculez pas ! Nous ne vous devons rien. C’est le contraire qui est avéré : Vous nous devez beaucoup.