Sur instruction du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), la junte militaire au pouvoir depuis le 26 juillet 2023, le ministre de la Justice, Garde des sceaux, a sonné la fin de récréation concernant les dérives graves constatées sur les réseaux sociaux notamment WhatsApp et Facebook.
Ces dérives qui ‘’portent atteinte à la quiétude, à la paix et la cohésion sociale’’ se traduisent par la diffusion sur les réseaux de documents divers (textes, audios, photos, vidéos), selon le ministre Alio Daouda. ‘’Les risques graves de division et d’incitation à la haine et la violence que ce comportement fait courir à notre pays nous a conduits à instruire les Procureurs généraux pour prévenir les auteurs de ces types d’agissements, à travers des points de presse au niveau des ressorts des cours d’appel de Tahoua, de Niamey et de Zinder’’, a-t-il rappelé.
Une initiative qui n’a, malheureusement pas, amené les gens à abandonner la pratique. Bien au contraire, le comportement persiste et ‘’s’assimile à une défiance à l’autorité de la loi’’, a déclaré le ministre de la Justice, annonçant la décision du CNSP et du gouvernement de transition de réprimer désormais sans faiblesse ces pratiques qui constituent des infractions prévues et punies par la loi pénale, celle sur la cybercriminalité et le code de justice militaire.
Pour sûr, ce sont des dérapages à ‘’à regretter et à condamner avec fermeté’’ mais surtout contre lesquels la justice doit sévir, selon lui.
Comme pour signifier qu’il ne s’agit pas d’une simple menace en l’air, le ministre a déclaré que ‘’les infractions au code pénal, à la loi sur la cybercriminalité et le code de justice militaire constatées ces derniers jours, à compter 1er août au 27 octobre, au niveau du tribunal de Grande instance de Niamey et du tribunal d’instance de Zinder, des tribunaux d’instance des autres départements sont au nombre de 27 procédures, ayant mises en cause une quarantaine de personnes’’.
Le ministre Daouda a décliné les différents types d’infractions à la loi relative à la répression de la cybercriminalité (production et diffusion de données de nature à troubler l’ordre public ou en porter atteinte à la dignité humaine, accès illégal à partie ou tout d’un système informatique, fraude, injures, diffamation, chantage, escroquerie, propos à caractère régionaliste, raciste, ethnique, religieux, xénophobe, atteinte à la défense nationale par des moyens électroniques, etc.) et les peines d’emprisonnement et amendes encourues par les auteurs desdites infractions.
Il a annoncé qu’une lutte implacable sera désormais engagée contre les contrevenants à la loi pour préserver la paix, la cohésion et l’unité nationale, reconnaissant toutefois les difficultés de la tâche. Les difficultés sont notamment liées au recours à de faux profils et les lieux de résidence des acteurs qui s’adonnent à ces pratiques répréhensibles.
C’est ce qui explique, selon lui, le faible taux de saisine des autorités de poursuite au regard de l’ampleur de cette criminalité qui menace la cohésion sociale et la paix. ‘’Ce faible taux peut être expliqué en partie par la durée souvent longue des investigations, due au fait que non seulement les criminels utilisent des faux profils mais aussi la plupart des auteurs résident à l’étranger’’, a souligné Alio Daouda.
Comment mener des investigations pour débusquer une personne malveillante qui insulte, vilipende, suscite la haine et incite à des affrontements ethniques, etc., sur les réseaux sociaux derrière un faux profil ? Comment remonter jusqu’à lui lorsqu’il vit même dans le pays à fortiori à l’étranger ? Même si le prévenu est retrouvé et condamné, qu’est-ce qui empêcherait les autres internautes de partager le post-incriminé ? A-t-on cependant mesuré les conséquences que ces poursuites auraient sur nos systèmes judiciaires ? Et combien de magistrats faudrait-il pour les instruire, et ce d’autant plus que des comptes fermés sous un certain pseudonyme rouvriraient immédiatement sous un autre ? Enfin, et surtout, peut-on contrer par la loi ces débordements insensés ?
Ce n’est pas du tout facile, pour ne pas dire que c’est quasiment mission impossible ! Malgré tout, il serait irresponsable de la part du CNSP et du gouvernement, confrontés à de difficultés multiformes, de croiser les bras et laisser le torchon continuer à brûler sur les réseaux sociaux sans rien tenter pour éteindre le feu.