Depuis son installation, Commission de lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale (COLDEFF), s’est organisée en quatre (4) commissions spécialisées, chacune axée sur un aspect spécifique de la délinquance économique et financière. Il s’agit de : la Commission Administration Centrale, la Commission Collectivités Territoriales, la Commission Sociétés publiques et Projets et enfin la Commission Dénonciation à laquelle un numéro vert sera incessamment dédié pour des dénonciations avec preuves à l’appui. Cette initiative, bien que louable dans son essence, soulève des préoccupations majeures, notamment avec la mise en place de la Commission Dénonciation.
1. La délation institutionnalisée
La Commission Dénonciation, qui sera dotée d’un numéro vert pour encourager les citoyens à rapporter des cas de délinquance avec preuves à l’appui, risque d’institutionnaliser la délation. Une telle approche menace non seulement le tissu social mais porte également atteinte à la confiance mutuelle entre les citoyens. La délation, historiquement, a souvent servi d’instrument pour régler des comptes personnels, créant un climat de suspicion et de peur.
2. Risques d’abus et de manipulation
Le risque d’abus dans l’utilisation de la Commission Dénonciation est inévitable. Il est aisé d’imaginer des scénarios où des individus ou groupes mal intentionnés utilisent cette plateforme pour diffamer, sans fondement réel, des adversaires politiques, économiques ou personnels. La possibilité de manipulations et de fausses accusations, potentiellement motivées par des vendettas ou des rivalités, est une réalité qui ne peut être écartée.
3. Atteinte aux droits fondamentaux
L’encouragement à la dénonciation anonyme peut également constituer une atteinte aux droits fondamentaux, notamment le droit à la présomption d’innocence et à la protection de la vie privée. La justice, pour être équitable, doit reposer sur des enquêtes approfondies et des preuves tangibles, non sur des accusations anonymes et potentiellement infondées.
4. La question de l’éthique et de la morale
Sur le plan éthique, l’existence de la Commission Dénonciation de la COLDEFF soulève des questions morales délicates. Encourager la population à surveiller et à rapporter les comportements des uns et des autres peut conduire à une société où la méfiance et la peur de l’autre prévalent sur la solidarité et la cohésion sociale.
5. alternatives et solutions
Plutôt que de promouvoir la délation, des mesures plus constructives pourraient être envisagées. Il serait plus judicieux de renforcer les systèmes de contrôle et d’audit interne au sein des ministères, des institutions, des sociétés d’Etat et des projets, des collectivités territoriales, d’améliorer la transparence dans la gestion des fonds publics, et de promouvoir une culture de responsabilité et d’intégrité à tous les niveaux de la société.
En conclusion, bien que la lutte contre la délinquance économique et financière soit une nécessité impérieuse, la création de la Commission Dénonciation au sein de la COLDEFF pourrait s’avérer contre-productive. Elle risque d’ouvrir la porte à des dérives graves, menaçant l’équilibre social et la confiance mutuelle dans la société. Il est crucial de réévaluer cette approche et de privilégier des méthodes plus respectueuses des droits fondamentaux et de l’éthique sociale.