Après son communiqué du 11 mars pour ‘’condamner sans réserve la signature de l’ordonnance portant dérogation à la législation relative aux marchés publics, aux impôts, taxes et redevance et à la comptabilité publique’’ et demander son abrogation, le Conseil exécutif national de Transparency International Niger n’entend pas abandonner la lutte.
Elle compte très prochainement, en collaboration avec d’autres organisations de la société civile, rendre publique une déclaration fournie sur l’ordonnance, qui ‘’ constitue une grave atteinte aux principes de transparence, de redevabilité et de bonne gouvernance dans un Etat’’ et définir la conduite à tenir pour faire échec à son application.
Selon Maman Wada, président du Conseil exécutif national de l’organisation, ‘’les concertations sont déjà en cours avec les associations identifiées pour la déclaration, à la suite de laquelle seront identifiées les actions à mener dont possiblement l’attaque de l’ordonnance devant la justice.
Il s’agit d’un acte grave, car prenant déjà en charge ‘’le scandale de l’achat des 160 véhicules de marque Toyota Fokker sur l’argent mobilisé par le Fonds de solidarité pour la sauvegarde de la patrie (FSSP)’’, a déclaré Wada, soulignant que lesdits véhicules n’ont pas fait l’objet de commande à l’étranger.
‘’Ce sont des voitures qui ont été achetées sur place auprès de quelques fournisseurs et nous comptons mener des investigations pour débusquer le pot aux roses’’, a-t-il ajouté, abasourdi par le prix d’achat d’un Toyota Fokker à l’état neuf qui s’établirait à 28 millions Fcfa si l’on fait le rapport.
Concernant le scandale relatif à l’importante quantité d’or en provenance de Niamey saisie à l’aéroport d’Addis- Abeba (Ethiopie) qu’on cherche apparemment à noyer à Niamey, Wada rassure que la constitution de leur plainte en justice pour faire la lumière sur l’affaire est en très bonne voie.
‘’Nous sommes très avancés dans le travail avec l’avocat pour la constitution du dossier, très bientôt la plainte sera déposée’’, a-t-il affirmé, doutant de la réelle volonté et de la sincérité du régime militaire en place quant à son engagement de lutter contre la corruption, à la lumière du scandale de l’or et de cette ordonnance controversée de Tiani.
Selon le communiqué de l’Association nigérienne de lutte contre la corruption-section locale de Transparency International (ANLC/TI), ‘’cette ordonnance confère aux autorités, le pouvoir discrétionnaire de passer des marchés publics sans appel d’offres ni contrôle préalable, de dispenser certains opérateurs économiques (du reste connus de tous) du paiement des impôts, taxes et redevances, et de soustraire certaines dépenses publiques au contrôle des services compétents et des citoyens nigériens’’.
Sur la base de ce constat, Wada pense que la lutte contre la corruption les dérange même parce qu’ils ne veulent pas de la réouverture du dossier MDN qui n’a pas connu de jugement. ‘’En s’accaparant du pouvoir, ils ont dit que c’est pour restaurer la bonne gouvernance dans le pays. Mais on ne peut pas établir cette gouvernance là où il y a des passe-droits, là où on peut dépenser l’argent public sans rendre compte, là où on peut échapper à la loi, à la comptabilité publique’’, estime le président du Conseil exécutif national de l’ANLC/TI.
Et d’ajouter : ‘’C’est même pire que le premier dossier MDN parce que lui avait au moins des garde-fous qu’on a contournés. Mais ici, c’est une licence qu’on donne à des gens pour s’adonner à la corruption et au détournement des deniers publics’’ sous le manteau d’une ordonnance hautement ‘’corruptogène’’. Cela prouve, selon lui, ‘’un manque flagrant de respect pour les biens publics’’ et met à mal les professions de foi du général Tiani quant à son engagement maintes fois réitéré de lutter résolument contre la corruption et les détournements des deniers publics.
‘’Je pense que de la façon dont les choses sont engagées aujourd’hui, les gens ne sont pas prêts à partager les priorités, les préoccupations du peuple avec le peuple. De ce point de vue, le retour à la démocratie est devenu comme la ligne d’horizon où le ciel semble toucher la terre, mais il recule’’, constate-t-il. Et de conclure : ‘’Mais une certitude demeure, la démocratie survivra. C’est un processus qui connait des crises, des hauts et des bas, mais qui finira par se stabiliser durablement‘’.