Le 28 janvier 2024 restera gravé comme une journée de volte-face pour l’équilibre géopolitique en Afrique de l’Ouest. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, tous sous la férule de régimes militaires, ont proclamé leur retrait “sans délai” de la CEDEAO. Cette annonce, orchestrée simultanément sur les chaînes nationales, n’est pas simplement un acte de résilience, c’est une fronde légitime contre une institution autrefois pilier de la coopération régionale.
Mais au-delà de protester contre des sanctions qualifiées d'”illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables”, ces régimes militaires pourraient cacher une réalité plus sombre. La crise apparente avec la CEDEAO pourrait masquer en réalité une manœuvre plus inquiétante : celle de se soustraire aux contraintes démocratiques et de prolonger indéfiniment un pouvoir militaire.
L’impact social et économique de ce retrait, bien que sévère, pâlit face à l’audace politique de ce geste. L’augmentation des tarifs douaniers et les perturbations commerciales ne sont que des dommages collatéraux dans une stratégie insidieuse bien plus vaste de consolidation du pouvoir.
L’enjeu le plus alarmant restera la gouvernance interne de ces pays. En s’affranchissant des engagements démocratiques électoraux de la CEDEAO, ces juntes s’ouvrent un boulevard pour perpétuer leur règne. Le report sine die de la présidentielle malienne et la réticence burkinabè et nigérienne à honorer les calendriers électoraux ne sont pas de simples coïncidences, mais révèlent une stratégie délibérée pour s’accrocher au pouvoir.
Ce retrait de l’Alliance des États du Sahel (AES) de la CEDEAO, présenté faussement comme un acte souverainiste, est en réalité un jeu dangereux. Il trahit une ambition obscure des régimes putschistes de s’ancrer au pouvoir en se drapant dans le manteau de la souveraineté nationale, tout en faisant fi des principes démocratiques. Cette démarche surnoise pose une question cruciale : assistons-nous à la naissance d’une ère d’autocraties militaires, habillées de souveraineté mais vidées de leur substance démocratique ?
Cette question mérite d’être posée, tant elle soulève des inquiétudes quant à l’avenir de la démocratie et de la stabilité en Afrique de l’ouest.