L’Alliance des États du Sahel (AES), composée du Mali, du Burkina Faso et du Niger, envisage la création d’une monnaie commune, soulignant une aspiration à l’émancipation économique face au franc CFA, héritage de l’époque coloniale. Cette initiative représente un défi majeur pour ces pays, tant au niveau économique que logistique.
En janvier 2023, l’entrepreneur camerounais William Elong a souligné l’importance de l’autonomie monétaire pour le développement de l’Afrique, affirmant que la majorité des jeunes africains aspirent à se défaire du franc CFA. Cette perspective est renforcée par la signature, le 16 septembre 2023, de la Charte du Liptako-Gourma, instituant l’AES sans mention explicite de ce projet monétaire mais avec un engagement pour l’émancipation économique des trois (3) pays.
Le premier pas vers cette ambition a été fait le 1er décembre 2023, lorsque les ministres des Finances des trois (3) pays se sont réunis à Bamako, évoquant la création d’un fonds de stabilisation et d’une banque d’investissement de l’AES, ainsi qu’un comité pour approfondir la réflexion sur l’union économique et monétaire. Bien que timide, cette étape démontre une volonté de progresser dans ce projet complexe.
La faisabilité de cette monnaie commune est cependant nuancée par la situation économique des trois (3) pays. Avec des taux d’endettement et des déficits publics variés, ils doivent relever le défi de respecter les critères de convergence pour une politique monétaire commune. En outre, ils doivent considérer des défis logistiques et financiers, tels que la fabrication des pièces et des billets, la garantie de la convertibilité, le choix du régime de change, et potentiellement la création d’une Banque centrale.
La future monnaie commune suscite un débat animé, reflétant celui du franc CFA. D’un côté, les partisans de l’indépendance monétaire voient en elle une opportunité pour une plus grande autonomie économique. De l’autre, les défenseurs du franc CFA mettent en avant la stabilité que procure l’arrimage du franc CFA à l’Euro. La décision de la FED en septembre 2022 d’augmenter ses taux directeurs a accentué la dépréciation de plusieurs monnaies nationales africaines, y compris le franc CFA, soulignant sa dépendance aux fluctuations de l’euro.
En conclusion, la création d’une monnaie commune par l’AES représente une ambition louable mais complexe, requérant une coordination étroite afin de surmonter de nombreux défis économiques et logistiques. Si elle peut potentiellement offrir une plus grande autonomie économique, la route vers sa concrétisation est semée d’obstacles et nécessite de débats profonds sur son impact et sa viabilité.