Le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) a pris les rênes du Niger. Trois jours après l’annonce de la destitution du président Mohamed Bazoum, le CNSP a désigné, le vendredi 28 juillet 2023, le général Abdourahmane Tchiani à la tête de la junte militaire.
Lors d’une allocution télévisée, le général Tchiani a mentionné “la dégradation de la situation sécuritaire” et “la mauvaise gouvernance politique, économique et sociale” comme les catalyseurs de l’action des Forces de défense et de sécurité (FDS). Il a en outre dénoncé des décisions de l’ancien régime, comme “la libération de chefs terroristes armés” et “l’absence de coordination” avec le Mali et le Burkina Faso, pays voisins aux prises avec les mêmes problèmes de sécurité.
“L’approche sécuritaire actuelle n’a pas permis de sécuriser notre pays, malgré les sacrifices des Nigériens et le soutien appréciable de nos partenaires extérieurs”, a-t-il déclaré lors de sa première intervention publique.
La CEDEAO sous le feu des critiques : appels à la résistance
Malgré la réussite du coup d’État, les partisans de Bazoum Mohamed multiplient les déclarations, appelant à sa libération et à la restauration de l’ordre constitutionnel. Ces appels sont restés vains.
Face à la crise politique qui secoue le Niger, la CEDEAO a tenu une réunion extraordinaire ce dimanche 30 juillet au terme de laquelle elle a décidé d’imposer des sanctions financières avec effet immédiat à notre pays. Elle a également lancé un ultimatum d’une semaine pour le rétablissement de Bazoum Mohamed dans ses fonctions de chef d’Etat. Une perspective perçue par les Nigériens comme un chantage inacceptable. Le CNSP doit résister. Le président déchu ne doit jamais retrouver son fauteuil présidentiel. Lors d’une manifestation à Niamey le dimanche 30 juillet, des milliers de Nigériens ont fermement réaffirmé le rejet de Bazoum Mohamed, un président mal élu et dépourvu de légitimité.
Les enjeux des puissances occidentales : manipulations et intérêts égoïstes
De plus, il est crucial que le CNSP ne cède pas aux pressions de la CEDEAO qui tente de rétablir Bazoum à la tête du Niger. Les puissances occidentales, en particulier les États-Unis et l’Europe (la France en tête), manipulent la CEDEAO pour durcir la position contre le Niger, dans le seul but de sauvegarder leurs propres intérêts.
En effet, le coup d’État contre le président Bazoum a ébranlé une position stratégique en Afrique pour les Occidentaux. Washington a beaucoup à perdre alors que l’armée américaine dispose de plusieurs bases au Niger, dont une à Niamey et une à Agadez, abritant entre autres des drones et dans lesquelles mille soldats américains sont prépositionnés et dont nul aujourd’hui ne connaît les raisons de leur présence ni le rôle exact qu’ils jouent au Niger. Quant à la France, dont la réaction est passée du flottement à la fermeté, elle dispose de quelque 1. 500 militaires de la défunte opération Barkhane – hors forces spéciales –, essentiellement à Niamey.
Le Niger est aussi considéré par les Européens comme une zone de forte circulation migratoire. Il a été le premier pays à accueillir des centres de transit pour migrants hors Union Européenne (UE) en 2015, sous l’égide de l’UE et de l’Organisation internationale pour les migrations. L’autre source d’inquiétude pour Paris est l’approvisionnement de la France en uranium dont es centrales nucléaires sont dépendantes pour 10 % du minerai nigérien.
Le coup d’État contre le président Mohamed Bazoum, qui a fait du Niger un vassal de la France et des Etats-Unis, est donc perçu comme un défi majeur pour ces puissances occidentales.
Un revers pour la stratégie occidentale au Sahel
Le coup d’État orchestré par le CNSP est un sérieux coup dur pour la stratégie de coopération mise en place par les Occidentaux pour tenter de contrôler la crise au Sahel. L’hostilité croissante des partenaires africains et l’enchaînement des coups d’État dans la région remettent en question l’ingérence des puissances occidentales, en particulier de la France.
Ce coup d’État au Niger montre qu’au Sahel, être l’ami de la France n’est plus une garantie pour les régimes en place. Au contraire, cela peut même devenir un obstacle. La révolution en cours au Niger pourrait bien sonner le glas de l’ordre établi, au bénéfice des intérêts nationaux et de ceux du peuple nigérien.
La Rédaction