Depuis plusieurs années, la Chine, par le biais de ses entreprises d’État, étend son influence en Afrique à travers d’importants investissements dans les infrastructures. Ces initiatives, souvent présentées comme des opportunités de développement, cachent parfois des réalités plus complexes, notamment en termes de gestion financière et de corruption. C’est le cas de China National Petroleum Corp (CNPC), l’opérateur des champs pétroliers d’Agadem au Niger, dont les pratiques controversées soulèvent des inquiétudes quant à sa désignation pour vendre la part du brut revenant à l’État du Niger.
La stratégie chinoise en Afrique et ses implications pour le Niger
La Chine, cherchant à sécuriser ses approvisionnements en matières premières et à accroître son influence mondiale, investit massivement en Afrique. Cela inclut des projets d’infrastructure tels que des ponts, ports, barrages, aéroports, autoroutes, et lignes de chemin de fer. Un exemple emblématique est la construction du pipeline Niger-Cotonou, confiée à la CNPC pour un montant colossal de 2.400 milliards de FCFA. Bien que ces projets semblent avantageux, ils sont souvent accompagnés de conditions de financement non concessionnelles, avec des taux d’intérêt élevés et des flux financiers qui contournent les systèmes bancaires locaux.
Cette approche a des conséquences directes sur la capacité des pays africains à gérer leurs ressources et à développer leur expertise locale. En effet, dans des projets livrés “clés en main”, comme celui du pipeline Niger-Cotonou, tout est géré par l’entité chinoise : on ne maîtrise rien, ni la conception, ni le suivi, ni la maintenance, ni les coûts et la qualité. Cela prive le Niger de la possibilité d’acquérir un savoir-faire crucial et d’assurer une autonomie à moyen terme.
Pratiques corruptives et manque de transparence de CNPC
Les contrats obtenus au Niger par la CNPC sont entourés d’opacité. Les conditions exactes de ces accords, et en particulier la manière dont la valeur des prêts a été fixée, ne sont pas clairement divulguées. Cette opacité est d’autant plus inquiétante que la CNPC a déjà été impliquée dans des affaires de corruption. Le cas de Wang Yilin, cadre du parti communiste chinois et ex-responsable de CNPC, arrêté pour des soupçons de corruption, en est un exemple flagrant.
La tendance à la corruption au sein de CNPC n’est pas un cas isolé, mais s’inscrit dans un contexte plus large de pratiques douteuses au sein des entreprises étatiques chinoises. Malgré les efforts de lutte contre la corruption initiés par le président Xi Jinping, ces pratiques perdurent et affectent la crédibilité des projets menés par ces entreprises.
La nécessité d’une alternative pour le Niger
Face à ces enjeux, il est impératif pour le Niger de rechercher des alternatives pour la vente de sa part du brut d’Agadem. Laisser cette responsabilité à CNPC, c’est non seulement courir le risque de s’engager dans des pratiques opaques et potentiellement corruptives, mais aussi de perdre un contrôle essentiel sur ses propres ressources naturelles.
La venue de négociants privés de brut à Niamey, tels que Jas Grewall de BB Energy ou le négociant turc BGN International, témoigne de l’intérêt et de la possibilité d’explorer d’autres options. Ces alternatives pourraient permettre au Niger de bénéficier de conditions plus favorables et de gérer plus efficacement les revenus pétroliers.
En résumé, la désignation de la CNPC pour vendre la part du brut revenant à l’État du Niger n’est pas une option viable etserait une décision préjudiciable à l’intérêt national. Les antécédents de corruption et le manque de transparence de cette entreprise chinoise représentent des risques majeurs pour l’économie et la souveraineté du Niger. Il est donc crucial pour Niamey d’explorer d’autres voies, plus transparentes et éthiques, pour la commercialisation de ses ressources pétrolières. Cette démarche est fondamentale pour instaurer une gouvernance responsable et assurer une exploitation pétrolière qui bénéficie réellement au peuple nigérien.