Partiront sans atermoiements ! Ne partiront pas facilement ! Nul ne saura dire actuellement quand et comment sera fera le retrait des troupes américains de notre territoire. Seule certitude, ils sont obligés de se retirer à partir du moment où l’accord de coopération militaire liant depuis 2012 les Etats Unis d’Amérique et notre pays est unilatéralement remis en cause par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP). Ce retrait concerne quelque 1.100 soldats, pour l’essentiel cantonnés à la base aérienne 201 d’Agadez érigée sur une superficie de 25 km² pour servir de centre opérationnel aux drones américains.
La rupture brutale de l’accord de défense avec effet immédiat par Niamey, invoquant son caractère illégal pour justifier sa décision, a abasourdi Washington qui était loin de s’attendre à un tel scenario catastrophe.
Les premières réactions à chaud du Département d’Etat Américain et du Pentagone [ministère de la Défense] par rapport à la décision du CNSP sont teintées d’un certain optimisme, qui incite à croire qu’ils refusent encore d’en prendre acte et tiennent coûte que coûte à rester dans notre pays. Nous en voulons pour preuve, cette divergence de vue entre l’ambassadrice des Etats- Unis au Niger, Kathleen Fitzgibbon, et le porte-parole le Pentagone, Pat Ryder, sur le sujet.
User de la diversion
Alors que l’Ambassadrice annonçait la présentation très bientôt par son pays d’un plan de ‘’retrait’’ de leurs troupes de notre territoire lors d’un entretien avec le ministre de l’Intérieur Mohamed Toumba, le porte-parole du Pentagone a laissé entendre que la décision de retrait n’est pas encore actée, n’excluant toutefois pas un éventuel désengagement de leurs soldats, à l’occasion d’un point de presse qu’il a animé dans la même période. ‘’Pour autant que je sache, les discussions se poursuivent à l’heure actuelle (…) Aucune décision n’a été prise à ce stade concernant le déplacement des troupes américaines’’, a martelé Ryder.
Ces discussions dont parlent les autorités américaines se poursuivent où ? Avec qui et sur quels aspects du sujet, sommes-nous en droit de nous interroger ? D’autant que la décision de révocation de l’accord de défense semble irrévocable, au regard notamment de l’adhésion massive et spontanée dont elle bénéficie au sein des populations.
En notre connaissance, elle n’a à ce jour enregistré aucune voix dissonante. Même les autorités coutumières et les Ulémas du pays l’ont accueillie avec soulagement, encourageant les autorités de la transition à ne pas revenir sur la décision. Elle a été peut-être prise sur un coup de frustration par le CNSP, mais c’est une requête réitérée constamment par les populations depuis la révocation des accords de défense avec la France.
Mais devant la réticence manifeste de Washington [qui cherche visiblement à gagner du temps] pour acter la décision de révocation de l’accord de défense par Niamey, il y a fort à craindre un long bras de fer pour obtenir le désengagement des soldats américains de notre sol. D’ores et déjà, les Ulémas ont entrepris d’accompagner la lutte avec des prières et des ‘’Al’Qunuts’’ permanentes dans les mosquées et à l’occasion de différentes cérémonies religieuses jusqu’à l’obtention de leur départ. Parallèlement aux mobilisations citoyennes de rue qui ne manqueront pas d’être au rendez-vous dans toutes les régions du pays, comme lors de la lutte visant à chasser les militaires français du pays.
La Cour d’Etat à la rescousse ?
Mieux, il n’est pas exclu que l’institution judiciaire soit sollicitée dans la gestion du dossier lorsqu’on apprend l’initiation d’un projet de modification des textes régissant la saisine de la Cour d’Etat pour notamment permettre à la société civile de jouir de ce privilège. Qu’est-ce qui a pu susciter cette initiative pour le moins étrange ?
Elle ne peut pas être en tout cas fortuite. Car comme on l’a constaté, aussitôt la dénonciation de l’accord de défense portée à la connaissance de l’opinion nationale, avec une insistance prononcée sur son illégalité et son caractère totalement défavorable à notre pays, des acteurs de la société civile ont formulé le souhait de voir l’ancien président de la République, Issoufou Mahamadou, et son ministre des Affaires étrangères, Bazoum Mohamed, à l’époque des faits, être poursuivis en justice pour crime de haute trahison.
Mieux, lesdits acteurs associatifs ont carrément décidé de porter l’affaire eux-mêmes devant les tribunaux, s’activant à ficeler le dossier au plus vite, selon certaines indiscrétions. Une telle action de la société civile devant la Cour d’Etat mettra l’Etat nigérien à l’abri d’éventuels représailles de l’Oncle Sam et contribuera certainement à accélérer le désengagement des soldats américains de notre territoire.
S’il se réalise, l’accès à la Cour d’Etat par les organisations de la société civile est une avancée notoire en matière de promotion de la justice dans notre pays. Mais c’est un couteau à double tranchant que ces dernières pourront, demain, retourner contre l’Etat. ‘’