Le discours du colonel Ibro, membre éminent du CNSP, à la Place de la Concertation à Niamey à l’occasion de la marche de la société civile contre le départ des troupes US au Niger, révèle une fois de plus la dangereuse trajectoire que prend le CNSP. En proclamant haut et fort, un mantra de “suivez ou subissez”, le colonel, loin de rassembler, divise profondément.
Dans ses paroles, il y a un écho inquiétant de cet “avec nous ou contre nous” qui a historiquement servi à justifier les pires excès des régimes autoritaires. Comme l’avait brillamment souligné George Orwell dans son immortel 1984, “le pouvoir consiste à déchirer les esprits humains en morceaux et à les recomposer ensuite dans des formes nouvelles de votre propre choix.”. Ibro, par son discours, semble prêt à déconstruire la société nigérienne pour la recomposer selon les desseins flous du CNSP, une approche qui transforme le dialogue en monologue et la critique en hérésie.
Le colonel défend la “sauvegarde de la patrie” avec un zèle qui dissimule mal les questions qu’il refuse d’aborder : Qui définit les objectifs de cette sauvegarde ? D’où vient cette prétendue légitimité alors que le CNSP lui-même est le fruit d’un coup d’État, loin de toute élection ou consensus populaire ? La prétention d’agir sous une directive divine ne fait qu’ajouter une couche de fanatisme à une stratégie déjà critiquable.
Plus alarmant encore, Les menaces voilées contre ceux qui s’interposent entre le CNSP et “les populations”, et l’affirmation que toute autre voie que celle du CNSP entraînera des “ennuis”, sont des signes révélateurs d’une gouvernance par la peur et l’intimidation, transformant ainsi potentiellement, chaque opposant en ennemi de l’État. Ainsi, sous couvert de patriotisme, le CNSP s’arroge le droit de redéfinir le bon et le mauvais citoyen.
Ce discours du colonel Ibro ne doit pas passer inaperçu ni être pris à la légère. Il est un signal d’alarme pour tous ceux qui chérissent les valeurs démocratiques et aspirent à une gouvernance transparente et inclusive au Niger. Il est impératif de rappeler que le pouvoir doit émaner des aspirations du peuple, et non d’une poignée d’hommes en uniforme. La véritable légitimité ne se construit pas sur la coercition ou le divin droit, mais sur le consentement et la participation active des citoyens dans la construction d’une société juste et équitable.