La Commission de Lutte contre la Délinquance Économique, Financière et Fiscale (COLDEFF), instituée par l’ordonnance N°2023-09 du 13 septembre 2024, représente une avancée notable dans la lutte contre la corruption et les malversations financières au niveau de l’État. Dotée de pouvoirs considérables, cette entité a pour mission de lutter contre la corruption en procédant à des investigations rigoureuses.
Récemment, conformément à l’article 21 de l’ordonnance portant sa création qui stipule que : ‘’La CoLDEFF peut procéder à des perquisitions conformément aux dispositions du Code de procédure pénale. Dans ce cadre, tous documents, objets ou substances pouvant servir de pièces à conviction, ainsi que tous objets, valeurs ou marchandises liés aux actes de délinquance économique, financière et fiscale peuvent être saisis et placés sous scellés.’’, la COLDEFF a franchi un pas notable en procédant à une perquisition au domicile d’Albadé Abouba, président de MPR-Jamhuriya, suite à un rapport de l’Inspection Générale d’État concernant le Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage ainsi que le Fonds de Sécurisation de l’Élevage (FOSEN). Cette action, bien qu’elle s’inscrive dans le cadre légal des prérogatives de la COLDEFF, soulève néanmoins des questions éthiques et morales considérables.
La perquisition, en tant que telle, est un acte intrusif qui doit être justifié par une nécessité impérieuse et des indices concrets. Il est légitime de s’interroger sur la nature exacte des éléments que la COLDEFF espérait découvrir chez AlbadéAbouba. Était-ce une recherche de preuves matérielles ou une tentative de saisir des biens liés aux actes présumés de délinquance ? La nature exacte des saisies, si saisies il y a, reste à éclaircir.
Cependant, au-delà de la légalité de la démarche, c’est le respect de la dignité humaine qui est ici en jeu. AlbadéAbouba, figure éminente de l’arène politique nigérienne de longue date et ancien serviteur de l’Etat, méritait-il un tel traitement ? Cette action, bien que légale, pourrait être perçue comme un acte d’humiliation plutôt que comme une démarche judiciaire objective. Elle jette une ombre sur le respect des droits individuels et sur la présomption d’innocence, piliers de tout Etat de droit.
Il est crucial que la COLDEFF, dans sa quête légitime de justice, opère avec discernement et mesure. L’objectif de purger l’État de la corruption ne doit pas conduire à des actions qui pourraient être interprétées comme des règlements de comptes ou des actes de vendetta politique.
En conclusion, si la lutte contre la délinquance économique est une nécessité impérieuse pour le bien-être de la nation, elle doit s’accompagner d’une vigilance constante quant au respect des droits fondamentaux des individus. La perquisition au domicile d’Albadé Abouba, bien que légale, soulève des interrogations quant à son opportunité. Une balance délicate doit être maintenue entre la rigueur de la loi et la préservation de la dignité humaine.