Une commande publique sèmerait-il la fâcherie entre le ministre de l’Enseignement Supérieur, son homologue des Finances et le chef du Gouvernement ? Ahmat Jidoud et Ouhoumoudou Mahamadou auraient-ils fait un bébé dans le dos de Mamoudou Djibo ?
Violation des textes
Au Niger, comme dans nombre de pays, le cadre réglementaire des marchés publics est très strict. Plusieurs textes fondamentaux, dont le décret n° 2022-743/PRN/PM du 29 septembre 2022 portant Code des marchés publics et des délégations de service public, encadrent ce domaine. Seulement, ces textes ne sont pas toujours (pour ne pas dire jamais) respectés par ceux-là même qui sont censés les faire appliquer à la lettre, à savoir les gouvernants.
Tenez, l’arrêté N°0018/PM/ARCOP du 18 Janvier 2023 fixant les seuils dans le cadre de la passation des marchés publics est constamment violé par l’Exécutif notamment en son article 13 qui dit : « Tout achat public dont le montant est égal ou supérieur à trois cent millions (300.000.0000) de francs CFA hors taxe sur la valeur ajoutée doit faire l’objet d’une communication préalable en conseil des ministres de la part du ministre en charge du secteur concerné. La communication est faite à titre d’information et porte sur : l’objet du marché, le mode de passation utilisé, le montant, le délai d’exécution et le nom de l’attributaire provisoire. Cette communication doit intervenir avant l’approbation du marché ». Dans les faits, les communications relatives aux marchés publics s’enchaînent d’un conseil des ministres à l’autre en toute opacité. C’est dans ce flou sciemment créé et entretenu que le ministère des Finances (Direction Générale des Moyens Généraux) a attribué par entente directe, à la société HASCO-SARL, un marché de dix (10) bus aux universités publiques du Niger. Dans quelles conditions ce marché a-t-il été octroyé ?
Les passations par entente directe : un mode d’attribution controversé
Il y a de cela quelques semaines, un marché par entente directe a été attribué à la société HASCO-Sarl pour la fourniture de dix (10) bus au profit des Universités publiques du Niger. Aucune communication en conseil des ministres n’a été faite au sujet de cette commande d’un montant de 1.306.140.000 FCFA TTC (Toutes Taxes Comprises), soit l’unité à 130. 614.000 F CFA. Est-ce au dernier moment que le ministre en charge du département bénéficiaire, en l’occurrence Mamoudou Djibo, a-t-il été mis au courant du marché ?
L’entente directe est une procédure de passation de marché public sans mise en concurrence, où l’acheteur public choisit directement l’opérateur économique avec lequel il souhaite conclure le marché. Cette méthode peut être justifiée dans certains cas, notamment en cas d’urgence impérieuse (l’achat de bus aux universités n’en est pas une) ou d’absence de concurrence pour des raisons techniques. Toutefois, elle présente plusieurs risques majeurs pour l’État :
- Des coûts plus élevés : l’absence de concurrence empêche l’acheteur public de bénéficier des offres les plus avantageuses, ce qui peut conduire à des surcoûts importants pour l’État.
- Des risques de corruption et de favoritisme : l’entente directe peut favoriser les relations personnelles ou politiques entre les acteurs publics et les entreprises, au détriment de l’intérêt général.
- Une moindre qualité des prestations : en l’absence de mise en concurrence, les opérateurs économiques sont moins incités à innover et à proposer des solutions de qualité, ce qui peut nuire à l’efficacité de la dépense publique.
C’est pourquoi, pour limiter les pertes financières liées aux marchés par entente directe, l’Exécutif doit prendre plusieurs mesures : renforcer la transparence des procédures pour un meilleur encadrement, développer l’usage des appels d’offres ouverts et restreints afin de stimuler la compétitivité entre les entreprises et garantir un meilleur rapport qualité-prix pour les prestations fournies, mettre en place des contrôles et des sanctions en cas de manquements aux règles de concurrence qui peuvent dissuader les comportements frauduleux et favoriser la bonne utilisation des deniers publics.
La Rédaction