Comme vous le savez, les militaires présentés comme les principaux cerveaux et acteurs de la tentative de coup d’État de mars 2021, au nombre de six (6), ont été condamnés en février dernier à 20 ans d’emprisonnement ferme chacun. Ils purgent leur peine à la prison de haute sécurité de Koutoukalé, située à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Niamey. Ils n’ont pas accès au téléphone, à la télé, et les visites n’ont lieu que le mardi.
Pour rappel, il s’agit du colonel-major Djibo Hamadou, du capitaine Sani Saley Gourouza, du lieutenant Abdourahamane Morou Idrissa, des adjudants-chefs Adamou Seyni dit Adams et Issaka Hamadou, et de l’adjudant Mahamadou Halilou dit ‘’Étudiant’’. Hamadou, Gourouza et Abdourahamane étaient déjà détenus à Koutoukalé bien avant leur jugement. Ils y côtoient aujourd’hui de nombreux membres du groupe nigérian Boko Haram et de groupes terroristes sahéliens. « Ici, à Koutoukalé, c’est une prison qui accueille des prévenus et des détenus dont la dangerosité doit être prise en compte. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle est appelée ‘’la maison centrale de haute sécurité’’ », avait déclaré le président de la Commissions nationale des droits humains (CNDH), Maty Elhadj Moussa, en visite sur les lieux le 28 décembre 2022 pour s’enquérir des conditions de détention. Mais ce n’est pas ce ménage avec des dangereux terroristes qui préoccupe tant le lieutenant Abdourahamane Morou Idrissa, et sa famille avec lui, mais bien son état de santé. Il souffre en effet des yeux depuis plusieurs années. Et on lui refuse toute consultation ophtalmologique.
Le 26 février 2023, le lieutenant Abdourahamane Morou Idrissa a adressé une correspondance au président du tribunal militaire de Niamey relativement à son état de santé. « Placé sous mandat de dépôt le 13 mai 2021 (alors même que j’étais à Koutoukalé depuis le 5 mai), je n’ai depuis lors jamais eu accès à un médecin ophtalmologue alors que j’ai une conjonctivite chronique de niveau 3, raison pour laquelle j’ai quitté les forces spéciales en 2016 ». Mais lors de la visite de la délégation de la CNDH à Koutoukalé, ci-dessus évoquée, le président Maty Elhadj Moussa avait demandé à l’ex-lieutenant des FAN de saisir son institution par écrit relativement à son état de santé. Ce que Abdourahamane fera très rapidement, sans se faire prier. La CNDH saisit à son tour le Ministre de la Justice et le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal militaire. Mais trois (3) mois après, la demande de transfèrement du détenu malade vers un autre lieu de détention, d’où il pourrait avoir des soins de santé appropriés, reste toujours sans suite. Pendant ce temps, l’état de santé de Abdourahamane Morou Idrissa ne pouvait que se détériorer faute de suivi par un médecin ophtalmologue. Avec son statut de détenu politique, il a, à ce titre, droit à certains égards. La Constitution dispose en son article 11 : « La personne humaine est sacrée. L’Etat a l’obligation absolue de la respecter et de la protéger ». L’article 13, alinéa 1, du même texte dit : « Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé physique et morale ». Et il n’y a pas d’honneur à condamner un détenu au désespoir. Affaire à suivre…