Suite à des informations récentes selon lesquelles la police algérienne maltraite physiquement et dépouillede leurs biens précieux les migrants subsahariens en situation irrégulière parmi lesquels de nombreux compatriotes en instance de refoulement, le ministère des Affaires étrangères a convoqué, mercredi 3 avril2024, l’ambassadeur d’Algérie pour lui exprimer le mécontentement de Niamey relativement à ces agissements inhumains et dégradants.
En l’absence du ministre Bakary Yaou Sangaré empêché, c’est son secrétaire général adjoint, Oumarou Ibrahim Sidi, qui a reçu l’ambassadeur Bekhedda Mehdi pour protester contre les exactions auxquelles s’adonneraient les forces de l’ordrealgériennes, à l’occasion des rafles entrant dans le cadre des opérations d’expulsion des migrants irréguliers sur leur territoire.
Cette réaction du ministère des Affaires étrangères est consécutive à des alertes en provenance de la ville algérienne de Tamanrasset, frontalière avec notre pays, où des opérations d’expulsion en cours ces jours-ci donneraient lieu à des actes de violence et de spoliation de biens contre des migrants nigériens en situation irrégulière. Il s’agit en vérité d’une pratique régulière ne datant pas d’aujourd’hui, mais qui a surtout pris de l’ampleur à partir de l’an 2014, lorsque notre pays a signé avec les autorités algériennes un accord d’expulsion systématique de nos compatriotes sans papiers vivant sur leur territoire. C’est le président déchu Bazoum Mohamed, à l’époque ministre des Affaires étrangères, qui a paraphé le document avec son homologue algérien.
L’accord visait à lutter contre le phénomène de la mendicité exporté par des compatriotes dans les pays de la sous-région et était intervenu quelque temps après la découverte en plein désert de plus de 80 cadavres humains dont de nombreux enfants et femmes décédés de soif et de faim, suite à une panne de leur véhicule.
Depuis lors, les autorités algériennes ont intensifié les rafles et les expulsions régulières de migrants subsahariens [de diverses nationalités], qu’elles faisaient refouler systématiquement vers notre pays, à destination de la localité d’Assamaka, distante de 15km de la frontière algérienne, où des organismes humanitaires internationaux (OIM, MSF, COOPI, etc.) leur fournissent une assistance multiforme à travers des centres de transit temporaire.
Depuis lors, malgré les difficultés qu’éprouvent les autorités d’Agadez pour gérer les flux ininterrompusde migrants refoulés et en partance vers le Maghreb,les expulsions à partir de l’Algérie, qui a fait de notre pays un déversoir, ne connaissent pas de répit. Parce que tout simplement le régime déchu des Renaissants n’a pas eu l’audace de taper du poing sur la table pour y mettre fin. Niamey se contentait juste de formuler des supplications à l’endroit des autorités algériennes pour une cessation de la pratique sans succès. Les autorités de la transition parviendront-elles à faire entendre raison à leurs homologues algériennes ?
Une première étape
La préoccupation à l’ordre de jour de la convocation de l’ambassadeur Bekhedda Mehdi au ministère des Affaires étrangères n’a pas, en tout cas, porté sur la cessation des opérations d’expulsion des migrants irréguliers en direction de notre pays, il s’agit plutôt de mettre fin aux exactions commises sur nos ressortissants sur le territoire algérien lors des rafles opérées par les forces de l’ordre algériennes.
Le secrétaire général adjoint du ministère s’est juste contenté de signifier à l’ambassadeur algérienne ‘’les protestations du gouvernement et des plus hautes autorités nigériennes contre le caractère violent du mode opératoire utilisé par les services de sécurité algériens pour mener ces opérations’’.
L’attente de Niamey à travers cette convocation de l’ambassadeur d’Algérie au Niger, c’est de voir celui-ci ‘’intercéder auprès des autorités compétentes de son pays afin que les opérations de rapatriement et de refoulement des migrants subsahariens décidées par le gouvernement algérien puissent s’effectuer dans le respect de la dignité, de l’intégrité physique et morale des ressortissants nigériens ainsi que la protection de leurs biens par les autorités algériennes compétentes. Et ce conformément aux relations de fraternité et de coopération qui ont toujours existé entre les deux pays et les deux peuples’’.
De nombreux migrants refoulés arrivent à Assamaka avec des blessures et souvent même des fractures occasionnées par les violences dont ils sont victimes et sans argent et aucun bien de valeur, selon un travailleur humanitaire en poste dans la localité.
‘’Les migrants malchanceux, qui sont raflés dans la rue, laissent tout ce qu’ils possèdent derrière eux,car ils sont directement acheminés dans les centres de parcage à partir d’où ils sont embarqués dans des camions à destination du point zéro où ils sont abandonnés, sans eau et sans nourriture’’, déplore le travailleur humanitaire.
Pour lui, ce haussement de ton de Niamey pour que les violences policières à l’encontre des migrants cessent lors des rafles est une première étapeméritoire. ‘’Mais le gouvernement doit aller plus loin dans sa revendication en imposant aux autorités algériennes le respect des termes de l’accord qui concernent exclusivement le refoulement de nos compatriotes en situation irrégulière vers le Niger, pas les migrants irréguliers de toutes les nationalités subsahariens’’, souhaite-t-il.