Certes, jusqu’à ce jour, la résilience du peuple, (aussi bien au Burkina Faso, au Mali et au Niger), semble irréfragable, et l’on peut continuer ainsi le bras-de-fer, ad vitam aeternam. Sauf, si un contrecoup d’Etat vient rebattre les cartes d’un côté, ou, si la CEDEAO et ses va-t’en guerre se rendent compte de la vanité de leur option, manifestement contreproductive, et décident de composer intelligemment avec les patriotes de l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Avant que l’une ou/et l’autre de ces deux probabilités n’advienne, beaucoup d’eau, aura coulé sous le pont Kennedy. Ce temps indéterminé, peut enfanter des orientations décisives, profondes, et peut-être, irréversibles, mais, à coup sûr, préjudiciable pour les intérêts des précités, et leurs mentors. Ces derniers ont déjà perdu leur positionnement exclusif de rente, c’est un fait, mais, ne faut-il pas arrêter l’hémorragie ? Faut-il jouer son va-tout sur un coup de tête ? Un ego hypertrophié ? Un autisme insidieux ?
L’autisme évident de Macron
Quand l’armée française a réussi à bloquer la déferlante djihadiste en route pour Bamako, la capitale du Mali, c’est très sincèrement que les Maliens ont mis les Français sur un piédestal de sauveurs du pays. Cette sympathie, aurait pu perdurer des décennies durant. Mais, face à l’anomalie-Kidal, les sauveurs se sont retrouvés dans le rôle de l’âne de Buridan, qui avait également soif et faim, et qui, placé à mi-chemin entre un seau d’eau et une botte de foin, n’a pas pu faire un choix et a fini par mourir sur place. Pour n’importe quel observateur des évènements, l’option était claire : c’était Kidal ou le Mali, mais pas les deux en même temps. La première mauvaise appréciation du président français est née du fait qu’il s’est entêté à imposer cette contradiction fondamentale et irréaliste « aux gens du sud » avec, à la clé, la ‘’menace’’ de s’en aller si l’on rechignait à lui faire confiance. Du « retenez moi, ou je m’en vais ! ». Pour Hama Amadou politicien nigérien chevronné, il ne faut jamais faire comprendre cela à un Sahélien, quel qu’il soit. Dans sa simplicité, toute innocente, celui-ci optera pour attendre l’alternative de la menace. Ne serait-ce que par pure curiosité. Les Maliens qui n’avaient pas au départ, une idée préconçue, ont tout simplement acquiescé : « si vous voulez partir, ne vous gênez pas ! ». Là-dessus, une tentative de contre coup d’Etat a avorté au Mali, mais a réussi au Burkina Faso où Damiba a essayé de dévoyer les vraies aspirations du peuple. D’où la rectification. Au Niger, c’est carrément le pompon. On ne reconnaît ni le CNSP, ni l’effectivité du putsch, ni l’injonction faite à l’ambassadeur de France et aux troupes françaises de quitter le pays. Aucune personne sensée, n’est censée adopter une telle posture saugrenue, contraire à toutes les conventions internationales. Autisme, avions-nous dit ?
Dangers immédiats
Après la deuxième guerre mondiale (39-45), le monde occidental n’avait qu’une seule hantise : voir le Communisme déferler sur toute la planète. Naissance de la guerre froide. Le même affrontement Est-Ouest renait, cette fois ci, sous une forme économique, et non guerrière. Des analystes comme Abba Seidick, sont persuadés que si la France maintient mordicus son attitude de vouloir punir le Niger, elle n’aboutira qu’à une seule chose : pousser ce pays, aussi sûrement que deux et deux font quatre, dans les bras des ogres de l’Est, notamment, Chine, Russie, Iran. Plus l’on tardera à lever les sanctions illégales, illégitimes et inhumaines contre le Niger, plus s’enfoncera dans l’ADN du peuple la conviction que l’on ne peut rien faire de bon avec ceux qui vous font souffrir aussi cyniquement. Si l’on peut connaître, mathématiquement, les effets des sanctions sur un pays, en revanche, nul ne peut savoir quelles sont les limites de la résistance d’un peuple qui se sent agressé. Plutôt que de tout perdre, ne vaudrait-il pas mieux essayer de sauver quelques meubles ? Le statu quo ante étant impossible, irréversible, n’est-il pas mieux de s’accommoder de ce qui est encore jouable ? Si ce bras-de-fer s’éternise, la bascule sera faite en faveur de la Russie et de la Chine. C’est couru d’avance. Il est temps de laisser son égo au vestiaire et de reprendre langue avec les autorités habilitées à débloquer une crise artificielle qui n’a que trop duré.