Le 26 janvier 2023, le Conseil des Ministres, présidé par le Président Mohamed Bazoum, a adopté, au titre du Ministère de la Justice, un projet de loi portant refonte de la loi n° 2011 – 24 du 25 octobre 2011 qui régit le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), lequel a été soumis à l’Assemblée nationale qui l’a largement adopté ce vendredi 12 mai. L’objectif visé est d’assurer une meilleure efficacité dans le fonctionnement du CSM. Mais les principes de la séparation des pouvoirs sont-ils respectés ? L’indépendance du pouvoir judiciaire est-elle devenue une réalité ?
Des insuffisances du CSM
La loi n° 2011 – 24 du 25 octobre 2011 fixe la composition, les attributions, l’organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature. Il se révèle que le CSM connait aujourd’hui certaines insuffisances liées à son mode de fonctionnement. Il s’agit, entre autres, de l’absence de délégation de pouvoirs en cas d’empêchement du président du CSM, qui n’est autre que le Chef de l’Etat, de l’insuffisance des ressources humaines qualifiées pour épauler le Secrétariat permanent du CSM dans l’accomplissement de ses attributions. Par rapport à la composition du CSM, il a été relevé que la présence des personnalités désignées par le Président de la République et le Bureau de l’Assemblée nationale est en porte-à-faux avec la Constitution en son article 116, alinéa 1, qui dispose : « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ».
Des correctifs apportés
Il ressort de la nouvelle loi sur le CSM (25 articles au total) que le Président de la Cour de cassation, la plus haute juridiction en matière judiciaire, vice-président du CSM, supplée désormais le Président du CSM, c’est-à-dire le Président de la République, en cas d’absence ou d’empêchement (article 6 de la nouvelle loi). Pour renforcer le Secrétariat permanent du CSM, il est prévu dans la nouvelle loi (article 16) la nomination de deux (2) conseillers qui sont des magistrats du deuxième grade au moins, qui ont rang et avantages de directeur technique national au Ministère de la Justice. Il est également prévu un personnel d’appui nommé par arrêté du Ministre de la Justice ainsi que des agents venant d’autres administrations à titre de détachement. En ce qui concerne la composition du CSM, les personnalités désignées par le Président de la République et le Bureau de l’Assemblée nationale en sont désormais exclues.
Le Chef de l’Etat reste le président du CSM
De tous les pouvoirs, l’Exécutif demeure le plus tenté de contrôler la Justice. Aussi, le Président de la République est un membre de droit du CSM (article 3 de la nouvelle loi) et il en est le Président (article 5). Dans ces conditions, l’efficacité recherchée dans la refonte de la loi n° 2011 – 24 du 25 octobre 2011 pourrait-elle être atteinte ? Lors de la réunion du CSM du 27 septembre 2021, le Chef de l’Etat n’avait-il pas peser de son poids politique dans la nomination de certains magistrats, notamment du Parquet ? Pour une indépendance effective de la Justice, celle-ci doit effectivement être distincte de l’Exécutif. A ce niveau, l’on peut dire que le Syndicat autonome des magistrats est resté sur sa faim. L’on se rappelle en effet que lors de son 9ème congrès statutaire tenu à Niamey les 3 et 4 mars 2018, le SAMAN avait dans une résolution exigé une réforme du CSM afin que la présidence de cet organe ne soit plus assurée par le Président de la République mais par le 1er Président de la Cour de cassation. L’indépendance de la magistrature est loin d’être gagnée.