« Ce qui se passe à Vegas, reste à Vegas », les Tarrayistes auraient dû adopter ce célèbre slogan tant leurs forfaitures restent couvertes, impunies. Plongée au cœur d’un parti qui fonctionne comme une bande, un clan.
“Qui s’y frotte s’y pique”
« J’ai commencé mon combat politique dans la clandestinité en 1980. Mohamed Bazoum a composé un autre groupe clandestin, trois ans plus tard. Nous avons fusionné nos deux groupes en 1990 pour fonder, à l’avènement du multipartisme, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), non pas sur une base ethnique, communautariste ou régionaliste mais autour de valeurs fondatrices », a déclaré Issoufou Mahamadou moins d’un mois après son retrait du pouvoir en avril 2021. La genèse de la création du parti au pouvoir est bien connue, mais son fonctionnement l’est nettement moins. Comme dans les sectes, Issoufou Mahamadou a très longtemps joué le rôle du ‘’gourou’’ au sein du PNDS-Tarraya. Sa parole est dominante, son ascendant incontestable. C’est « qui s’y frotte, s’y pique ». C’est aussi connu de tous, le leader historique du parti présidentiel a plusieurs facettes. Les Nigériens ont découvert le ‘’père fouettard’’ qui sommeille en lui avec l’éviction fracassante de Hassoumi Massaoudou du gouvernement ce 31 janvier 2019. « Il n’y a plus de problème Massaoudou Hassoumi. L’heure n’est plus aux états d’âme, encore moins aux rancœurs », a déclaré Issoufou Mahamadou après avoir mis sèchement fin aux dévorantes ambitions politiques de l’ancien ministre des Finances.
Impunité à tous les étages
Le PNDS-Tarraya ce n’est pas que la discipline de fer. En octobre 2016, quelque 492 containeurs ont mystérieusement disparu de la SORAZ. Il s’agit en réalité d’un vol organisé estimé à plusieurs milliards FCFA. Un larcin à grande échelle impliquant des fonctionnaires de l’administration douanière et la clientèle politique du régime. L’affaire a été vite étouffée. Issaka Assoumane, DG de la Douane aux moments des faits, s’en est tiré à bon compte. Tout comme Kalla Ankouraou et Ouhoumoudou Mahamadou n’ont jamais été inquiétés pour avoir attribué des marchés de gré à gré à un député en fonction (en violation de l’article 52 de la Constitution). Le scandale des marchés publics truqués au ministère de la Défense nationale (MDN) a été définitivement enterré laissant aux Nigériens un arrière-goût de déception. Pourquoi l’État a-t-il renoncé à se constituer partie civile dans ce dossier ? Pour, bien évidemment, épargner les pontes du régime et autres hommes d’affaires proches du PNDS-Tarraya impliqués dans ce vaste détournement de deniers publics. Preuve que le parti au pouvoir est une véritable ‘’bande’’ au sein de la laquelle les membres savent se serrer les coudes, se faire la courte echelle quand il le faut. C’est l’impunité à tous les étages.
S’entendre sur l’essentiel
« Le deuxième mandat de Mahamadou Issoufou sera plus propice à la lutte contre la corruption », avait prédit Bazoum Mohamed (alors ministre de l’Intérieur) peu avant la présidentielle de 2016. Rien ne s’est réalisé dans ce sens. Au contraire, le fléau s’est amplifié de façon inouïe. Dans la galaxie tarayyiste, l’enrichissement illicite a atteint son paroxysme depuis belle lurette. Au contact du pouvoir suprême, la bande que forme le PNDS-Tarraya s’est davantage soudée. Les forfaitures, les unes plus grosses que les autres, restent couvertes, impunies. Et ce n’est pas demain la veille que la justice sévira contre ceux qui confondent les deniers publics à leurs épargnes personnelles. Il peut y avoir des divergences et autres frictions dans les rangs des Tarrayistes, mais ils sont toujours d’accord sur l’essentiel : assujettir les Nigériens et préserver le pouvoir, leur pouvoir. La lutte contre la corruption attendra. « La quasi-totalité des partis fondés au début des années 1990 sur des bases tribales ont disparu, et, si le PNDS a pu prospérer jusqu’à devenir le plus grand parti du Niger, c’est précisément parce qu’il a su dépasser ces clivages et prôner le rassemblement », a déclaré Issoufou Mahamadou. C’est surtout parce que le ‘’clan-Tarraya’’ sait préserver les intérêts de ses membres au détriment de ceux du peuple.
La Rédaction