Le procès de la tentative de coup d’État intervenue dans la nuit du 30 au 31 mars 2021 se poursuit activement devant le tribunal militaire de Niamey. Les plaidoiries des avocats se sont poursuivies ce mercredi 15 février. Une nouvelle occasion pour les robes noires de relever les nombreuses zones d’ombre qui entourent cette nouvelle tentative de coup d’Etat qui n’en serait pas une.
Des règles de procédure
Les différents avocats qui se sont succédés à la barre ont dénoncé une procédure judiciaire anormale. Le dossier intégral sur cette affaire n’aurait pas été mis à leur disposition. Ils ont dénoncé des abus tant au niveau des PV d’enquête (qui auraient été tronqués) que de l’instruction qui a été uniquement à charge. Les droits de la défense ont été malmenés. Et l’obstruction à ces droits a été constatée jusqu’au niveau de la chambre de contrôle de l’instruction militaire, ont déploré les avocats. Ces derniers ont rapporté que c’est dans l’arrêt de renvoi qu’ils ont découvert que certaines infractions ont été mises sur le compte de leurs clients, des infractions qui n’apparaissaient pas auparavant dans le PV d’enquête. A la barre, il a été refusé aux avocats de pouvoir faire entendre des témoins. Par ailleurs, d’après certains accusés à la barre, ils auraient été contraints de signer les PV d’interrogatoire les concernant.
Un montage grotesque
Selon des avocats, leurs clients avaient raison lorsqu’ils qualifiaient les événements du 31 mars 2021 de « cinéma » ou de « farce ». Pour Maître Yayé Mounkaila, ancien bâtonnier, ceux qui sont présentés comme les cerveaux de cette tentative de coup d’Etat ont en réalité été manipulés, ils sont tombés dans un piège en les poussant à agir pour atteindre et nuire à des frères d’armes. Le capitaine Gourouza et le lieutenant Morou étaient en colère contre la gestion de la crise sécuritaire et des mains invisibles ont utilisé cette colère à leur insu et contre eux et contre d’autres militaires. « Il ne s’agit pas d’une vraie tentative de coup d’Etat, et on s’est précipité pour radier des innocents au lieu de les suspendre en attendant que leur culpabilité soit légalement établie », a déploré Maître Yayé. Parlant de « cinéma », Me Niandou Karimoun s’est interrogé sur le fait que la garde présidentielle n’ait pas tiré sur les assaillants alors qu’elle avait une puissance de feu très supérieure à celle de l’’’ennemi’’.
Des accusations battues en brèche
Les différents avocats qui se sont succédés à la barre ont tenté de démontrer, par des arguments juridiques imparables, que le ministère public n’avait pas fait la démonstration rigoureuse des faits reprochés à leurs clients. Pour Maître Moumouni Hachirou, conseil du colonel de la Garde nationale Issa Na-Allah, son client est l’objet d’une cabale montée de toutes pièces. D’après cet avocat, dans l’arrêt de renvoi, le juge d’instruction avait dit : « L’implication du colonel Issa Na-Allah s’explique par la présence de trois (3) gardes nationaux, le 27 mars 2021, dans le jardin du colonel-major Djibo Hamadou ». Or, il a été démontré à la barre que cette présence n’avait rien à avoir avec le colonel Na-Allah. Le ministère public avait d’ailleurs requis son acquittement pur et simple. « Le bon juge d’instruction cherche la vérité des faits de manière impartiale, il est celui qui admet que les enquêteurs pouvaient tronquer les faits. Or, dans ce dossier, les PV d’enquête de gendarmerie ont été changés, repris », a déclaré Me Hachirou. Ce dernier a demandé une reconstitution de carrière pour son client pour avoir été « injustement poursuivi et emprisonné ».