Le rapport général public 2022 de la Cour des comptes est connu. Une fois de plus, les personnalités assujetties à la déclaration sur l’honneur des biens ont fait montre de cachoteries. C’est du mensonge à tous les étages.
La cuvée 2022
La Cour des Comptes ‘’exerce un contrôle sur la gestion des administrations en charge des programmes et dotations. Elle émet un avis sur les rapports annuels de performance. Elle est chargée du contrôle de la gestion et de l’exécution du budget’’. Elle est investie à cet effet du pouvoir de contrôle sur : ‘’la gestion de toutes les collectivités publiques et s’assure notamment, du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l’État et par les autres personnes morales de droit public; l’exécution des lois de finances ; tout projet de développement financé sur ressources extérieures ; tout organisme ou fonds alimenté par un appel au public ou à la solidarité nationale ou internationale; tout organisme qui bénéficie d’un concours financier de l’État ou d’une autre personne morale de droit public, ainsi que tout organisme bénéficiant du concours financier des entreprises publiques et de leurs filiales’’. Voilà l’essentiel de la mission de la Cour des Comptes. « La loi organique sur la Cour des Comptes exige à ce que la Cour établit chaque année un rapport général public qui doit être remis au Président de la République, au Président de l’Assemblée Nationale et au Premier Ministre avant d’être rendu public », a déclaré le patron de la Cour des Comptes, Narey Oumarou, reçu ce 19 avril 2023 par le président de la République. Comme chaque année, c’est le contrôle des déclarations des biens des personnalités assujetties qui intéresse le plus les citoyens.
Mensonges à tous les étages
Le contrôle de la déclaration des biens repose sur plusieurs textes dont le plus important est la Constitution du 25 novembre 2010 en son préambule et en ses articles 41, 51,78 et 79. Pour 2022, il est à noter qu’au niveau de l’Exécutif ‘’tous les ministres ont respecté l’obligation de déclarer leurs biens, sauf Monsieur Gado Sabo Moctar, Ministre de l’Équipement’’. Au niveau du Législatif, ‘’seuls M. Seini Oumarou, Président de l’Assemblée Nationale, quelques membres du bureau (M. Kalla Hankouraou, M. Alkabouss Djalaoui, M. Oumarou Yahaya, M. Soumana Sanda, M. Alio Namata) et M. Lamido Harouna, Directeur de cabinet du Président de l’Assemblée Nationale, ont transmis leurs déclarations des biens à la Cour’’. À la Cour constitutionnelle, ‘’seul le Premier Président, Monsieur Bouba Mahamane, s’est soumis à l’obligation de déclaration des biens’’. On le voit, des personnalités qui sont censées voter, respecter et faire respecter la loi, n’hésitent pas à la violer. Le comportement des députés est tout simplement inadmissible. De plus, quel crédit peut-on accorder à ces déclarations quand on sait que la plupart des personnalités assujetties n’ont pas joué franc-jeu ? Cela ne fait aucun doute, c’est du mensonge à tous les étages. Un exemple parmi tant d’autres illustrant ce fait : comment comprendre qu’un ministre ayant régné sur le pétrole nigérien 10 ans durant déclare des biens estimés à seulement 195.995.071 FCFA alors que son successeur (avec juste 2 ans de fonction) se retrouve avec 1.174.567.654 FCFA de biens ? Il est évident que Foumakoye Gado n’a pas transmis le vrai montant de ses avoirs.
Droit à la transparence
Le système actuel qui consiste à transmettre à la Cour des Comptes des déclarations bidonnées arrange toute la classe politique, singulièrement les tenants du pouvoir. À part les personnalités qui mentent ouvertement sur leurs avoirs, il y a celles qui font un pied de nez aux textes en refusant carrément de s’y soumettre. D’un point de vue juridique, la Cour des comptes n’est pas suffisamment armée pour mener à bien ses missions notamment celle du contrôle des biens de personnalités assujetties à cet exercice. Le peuple du Niger a droit à la transparence, à la vérité. Telle qu’elle fonctionne, la Cour des Comptes ne répond pas aux attentes du peuple. Des reformes s’imposent à ce niveau. n
La Rédaction