« Le G5 Sahel a du plomb dans l’aile. Peut-être a-t-il été mal conçu ? » Ainsi s’exprimait le président Mohamed Bazoum lors d’un entretien qu’il avait accordé le 2 avril 2022 à TV5Monde. Un mois plus tard, après l’annonce du Mali de son retrait de la Force conjointe G5 Sahel pour protester contre des « manipulations » extérieures, le même Mohamed Bazoum enfonçait le clou dans un entretien accordé au quotidien français La Croix en déclarant littéralement que « le G5 Sahel est mort ».
Le désormais ex – chef d’Etat nigérien n’avait jamais caché son scepticisme sur l’utilité de cette organisation créée en 2014 et qui vise à mutualiser les efforts du Mali, du Tchad, du Burkina Faso, du Niger et de la Mauritanie pour combattre le terrorisme et l’insécurité dans la région. Fortement dépendant du financement extérieur, le G5 Sahel n’a jamais atteint une vitesse de croisière dans la mise en œuvre concrète de sa réponse sécuritaire à la crise qui menace de déstabiliser le Sahel. Les opérations de sa force conjointe, lancée en 2017, sont restées peu nombreuses. Cette force n’aura apporté aucune plus-value spécifique en matière de sécurité. La signature par les présidents Assimi Goïta du Mali, Ibrahim Traoré du Burkina Faso et Abdourahamane Tiani du Niger, ce samedi 16 septembre 2023, de la charte portant création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) sonne le glas du G5 Sahel qui était dans une longue léthargie depuis la mort du président tchadien, Idriss Déby Itno, en avril 2021. Réduite à désormais deux pays, cette organisation est aujourd’hui en état de mort cérébrale. Confrontés aux mêmes défis dont le terrorisme, le Mali, le Burkina Faso et le Niger entendent désormais privilégier l’intérêt collectif pour garantir leur sécurité. « L’objectif visé est d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle aux Parties contractantes », dit l’article 2 de la Charte. L’article 4 dit que « Les Parties contractantes s’engagent à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et la criminalité en bande organisée dans l’espace commun de l’Alliance. » La Charte dispose en son article 5 : « Les Parties contractantes œuvreront en outre à la prévention, la gestion et au règlement de toute rébellion armée ou autre menace portant atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté de chacun des pays membres de l’Alliance, en privilégiant les voies pacifiques et diplomatiques et, en cas de nécessité, à user de la force pour faire face aux situations de rupture de la paix et de la stabilité. » Quant à l’article 6, il dit que « Toute atteinte à la souveraineté et à l’intégrité du territoire d’une ou plusieurs Parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres Parties et engagera un devoir d’assistance et de secours de toutes les Parties, de manière individuelle ou collective, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité au sein de l’espace couvert par l’Alliance. » Nous osons espérer qu’il sera effectivement posé les jalons d’un vaste chantier de mise en place de mécanismes de sécurité collective.