Une rencontre d’échanges sur la hausse du prix du litre du gas-oil à la pompe a regroupé, mardi 2 août 2022, les acteurs sociaux en général et ceux intervenant dans la lutte contre la vie chère en particulier autour du ministre du Commerce dans la salle des banquets de la Primature. Il s’agit au cours de cette rencontre initiée par le gouvernement d’expliquer aux partenaires sociaux les raisons qui ont entraîné l’augmentation du prix du litre de gas-oil à la pompe qui est passé de 538 à 668 F CFA soit une hausse exceptionnelle de 130 F CFA d’emblée, dans un pays qui produit et raffine le pétrole depuis novembre 2011. Première fausse note, c’est après coup seulement, après avoir procédé à l’augmentation du prix, que le gouvernement a jugé nécessaire d’approcher les partenaires sociaux. Ce n’est pas fortuit, il a subodoré l’explosion d’une grogne sociale latente liée au renchérissement inévitable du coût de la vie, la flambée de pratiquement tous les produits alimentaires et non alimentaires mais aussi des prestations de services comme l’électricité, le transport, etc. C’est pour cela qu’il s’est empressé de prendre les devants dans le but de désamorcer rapidement la bombe. Quand même la Confédération démocratique des travailleurs du Niger (CDTN), une centrale syndicale supposée être proche du régime de la Renaissance, n’a pas mis du temps pour exiger du gouvernement ‘’l’annulation pure et simple de cette augmentation injustifiée et inopportune’’ du prix à la pompe du gas-oil, l’on comprend pourquoi l’Exécutif s’est vu dans l’obligation d’initier cette rencontre d’échanges avec les partenaires sociaux. Dans le communiqué qu’elle a publié le 2 août dernier, la CDTN a d’abord dénoncé le caractère ‘’unilatéral de l’augmentation’’ du prix du litre de gas-oil ‘’en dépit de l’existence d’un cadre de concertation en la matière’’. Selon la centrale syndicale, ‘’cette augmentation vient encore fragiliser le développement d’un secteur déjà en proie à de multiples difficultés et qui ne manquerait d’impacter négativement sur les coûts des denrées alimentaires qui connaissent de plus en plus une hausse vertigineuse’’. Elle ne saurait donc être acceptée alors que ‘’l’augmentation du salaire des travailleurs n’a connu aucune augmentation depuis 10 ans et malgré la flambée généralisée des prix des produits de consommation de première nécessité’’. La CDTN se met désormais aussi dans une logique de contestation après plus d’une décennie d’hibernation
Arguments ‘’fallacieux’’
Lors de la rencontre avec les acteurs sociaux, le ministre du Commerce, Alkache Alhada, a d’abord décliné ‘’les raisons profondes’’ pour lesquelles le gouvernement s’est vu contraint d’augmenter le prix du litre de gas-oil à la pompe. C’est le moins qu’on puisse dire lorsqu’il parle d’imposition, pour un pays qui produit et raffine sur place son pétrole brut. ‘’C’est une décision qui s’est imposée au gouvernement. Compte tenu de notre environnement économique qui a exercé une forte pression sur nous, le gouvernement a dû prendre cette mesure pour prévenir et anticiper sur les risques sur le pays’’, a déclaré Alkache, agitant la pénurie de gas-oil comme risque principal. Lorsqu’on est confronté à ce risque, pourquoi ne pas suspendre momentanément l’exportation à l’extérieur pour couvrir le besoin local en attendant le rétablissement de la situation au niveau mondial à partir du moment où nous n’importons pas ? ‘’La subvention sur les produits essentiels que sont le gaz domestique mais aussi l’électricité’’ constituent les deux autres arguments qu’il a avancés pour légitimer la hausse. ‘’(…) Il revenait au gouvernement de prendre des mesures afin de permettre à ce que l’électricité que nous consommons puisse également continuer à être produite dans les meilleures conditions. L’intervention des différentes chaînes de production des hydrocarbures participent largement au maintien du prix de l’électricité, un prix qui permet à l’ensemble des Nigériens d’en bénéficier’’, a-t-il indiqué. Une affirmation d’abord mensongère parce que tous les Nigériens n’ont pas actuellement encore accès à l’électricité. Comment se fait cette subvention ? Il ne le dit pas dans sa synthèse des échanges de la rencontre. M’enfin, Alkache est tout de même satisfait d’avoir été compris par son auditoire qui n’a pas manqué toutefois de formuler des doléances qui risqueront d’être ensevelies dans les tiroirs.
Doléances sans suite ?
Les acteurs sociaux à la rencontre ont exposé comme doléances pour avaler la couleuvre ‘’l’approvisionnement régulier du gas-oil’’, selon le ministre Alkache, qui présente d’ailleurs cette doléance comme ‘’principale raison pour laquelle ils ont pris la décision’’. ‘’Nous nous engageons à assurer l’approvisionnement régulier du gas-oil’’, a-t-il promis. Le maintien de l’électricité à son prix actuel a constitué la deuxième doléance sur les 6 formulées par les acteurs sociaux présents à la rencontre. Sur ce point, Alkache ne s’est pas clairement prononcé dans sa synthèse, tout comme d’ailleurs sur les autres doléances relatives notamment au renchérissement du coût du transport des marchandises, à la priorisation des transporteurs locaux dans l’acheminement des marchandises, à l’intervention de l’Etat dans la facilitation de renouvellement du parc automobile. Idem pour ce qui concerne la spéculation sur les coûts de transport marchandises, celui des passagers et des denrées alimentaires. Le ministre a promis que toutes ces préoccupations seront examinées par le gouvernement. Ce qui n’est pas sûr ! La couleuvre étant avalée à l’issue de cette rencontre, les consommateurs nigériens doivent resserrer la ceinture pour affronter un renchérissement débridé du coût de la vie avec leurs maigres revenus financiers. Pour sûr, ces différentes doléances risquent de rester sans suite.