La saison des pluies est terminée. Les attaques terroristes, qui ont considérablement baissé d’intensité ces trois derniers mois en raison des difficultés de mobilité liées à l’impraticabilité des routes et l’apparition des cours d’eau dans la région, ont repris de plus bel. C’est le moins qu’on puisse dire avec ces trois attaques meurtrières enregistrées entre samedi et ce lundi 24 octobre dans la région. La première, c’est celle qui a visé, samedi 22 octobre 2022, un convoi de trois camions transportant des passagers et des marchandises entre la localité de Tizégorou et celle de Banibangou, dans le département de Ouallam. Les assaillants armés ont intercepté les camions et ont fait descendre les passagers [des commerçants] pour les abattre froidement avant d’incendier deux camions et leurs chargements, emportant le troisième lors de leur repli. Le bilan macabre de l’attaque s’établirait à onze (11) morts dont les chauffeurs et les apprentis. Le choc a dû certainement être profond pour les familles des victimes, qui ne s’attendaient pas à cette perte brutale de leurs proches. Les habitants du Zarmaganda viennent à peine de débuter le deuil de leurs disparus lorsqu’on a appris cette autre attaque terroriste qui a visé, ce dimanche 23 octobre, le site d’orpaillage semi-industriel de M’Banga (département de Gothèye) exploité par une société chinoise. La protection du site étant assurée par un détachement des forces de défense et de sécurité (FDS), les assaillants venus à motos et en voitures lourdement armés ont trouvé une résistance sur place, a-t-on appris de source locale. ‘’Les affrontements ont duré de l’aube jusqu’à la mi-journée. Mais la supériorité numérique des assaillants leur a permis de prendre le dessus contraignant le détachement à appeler Niamey pour l’envoi de renforts’’, selon une autorité communale de la zone que nous avons contactée. Là aussi, le bilan qui est encore provisoire est choquant : l’on parle de sept (7) morts dont deux ressortissants chinois, mais aussi des portés disparus parmi lesquels des civils. Les corps des victimes ont été acheminés à la morgue de l’hôpital national de Niamey. Selon le gouverneur de la région, contacté par les proches d’un porté disparu dans l’attaque, ‘’ les opérations militaires de ratissage sont en cours dans la zone depuis l’attaque pour rattraper les assaillants et rechercher les personnes portées disparues’’ dont le nombre n’est pas connu. Une des proches, qui a fait le déplacement de la morgue ce lundi matin pour vérifier si leur parent ne se trouvait pas parmi les morts, nous a rapporté que les corps des deux Chinois tués ont été incendiés par les assaillants avant qu’ils ne se replient.
Ce qui laisse supposer qu’ils ont pu pénétrer le site d’orpaillage et ont fait beaucoup de dégâts. Nous en sommes là, quand ce lundi 24 octobre nous avons appris l’attaque par des hommes armés du poste de contrôle de police de Tamou, dans le département de Say. Laquelle attaque s’est soldée par la mort de trois (3) agents, pour alourdir le bilan macabre de la reprise des activités terroristes dans la région de Tillabéri.
Les limites d’une politique sécuritaire Ces trois attaques successives enregistrées dans la région appellent ces questionnements. Où est le dispositif sécuritaire dont le gouvernement se targue d’avoir mis en place pour sécuriser les populations ? L’on apprend qu’une première attaque terroriste contre la police de Tamou a été déjà repoussée samedi 22 octobre, qu’est-ce qui s’est réellement passé pour permettre aux assaillants armés de réussir leur deuxième tentative ? Est-ce lié à une baisse de la vigilance, qui ne saurait, du reste, se justifier dans une zone d’insécurité ? Ces interrogations sont également valables par rapport à l’attaque du site d’orpaillage des Chinois. C’est un site potentiellement exposé aux attaques terroristes pour avoir déjà essuyé une attaque qui s’est soldé par l’enlèvement de deux employés chinois en juin 2021. Lequel enlèvement a été imputé à un commando de l’Etat Islamique pour le Grand Sahara (EIGS). Le détachement militaire chargé de la sécurisation du site, s’apprêtait à être relevé le même jour lorsqu’il a été attaqué ce dimanche 23 ocobre2022, apprend-on. Comment expliquer cette troublante coïncidence ? Ses éléments se sont farouchement battus des heures durant, malgré la fatigue, pour tenter de repousser les assaillants. Les renforts sont arrivés sur place à quel moment ? Concernant enfin l’attaque du convoi de camions reliant Tizégorou et Banibangou, l’on a suivi le préfet de Ouallam soutenir un raisonnement biscornu sur France 24, tendant à faire endosser une part de responsabilité aux commerçants de la zone. Il a dit en substance que ‘’ce sont eux qui ne demandent pas l’escorte militaire’’ qui peut leur être assurée. Savent-ils d’abord qu’ils ont la possibilité de se faire escorter par l’armée ? Les a-t-on sensibilisés sur les modalités et qu’ils font délibérément la sourde oreille ? Au demeurant, toute la région n’est-elle pas aujourd’hui fortement militarisée avec la présence effective de plusieurs places fortes de l’armée nigérienne, mais aussi de la force militaire française Barkhane ? Comment dans un tel environnement sécuritaire, des Jihadistes de pacotille à motos parviennent-ils à se mouvoir pour perpétrer leurs forfaits et réussir à s’évanouir dans la nature ? Les Nigériens sont désemparés face à cette situation.