L’ordonnance N°2023-09 du 13 septembre 2024 a vu la création de la Commission de lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale (COLDEFF), une structure chargée de mener des investigations approfondies sur de tels délits à l’échelle nationale. Avec des responsabilités étendues, allant de la réception et du traitement des rapports d’inspection à la formulation de recommandations pertinentes, et du pouvoir de transiger, la COLDEFF semblait promise à un rôle crucial dans la restructuration de l’intégrité économique du pays.
Premiers pas et contestations
Depuis son installation, la COLDEFF s’est organisée en quatre (4) commissions spécialisées, chacune axée sur un aspect spécifique de la délinquance économique et financière. Il s’agit de : la Commission Administration Centrale, la Commission Collectivités Territoriales, la Commission Sociétés publiques et Projets et enfin la Commission Dénonciation à laquelle un numéro vert sera incessamment dédié pour des dénonciations avec preuves à l’appui.
Cependant, après trois (3) mois d’activité, la COLDEFF a dû faire face à des critiques, notamment avec la décision controversée de refuser l’assistance d’avocats aux personnes convoquées. Cette mesure, critiquée par le Barreau de Niamey, a soulevé des questions épineuses sur les droits de la défense et l’équité des procédures menées par la COLDEFF.
Le limogeage controversé du Vice-Président
Le véritable séisme est intervenu avec le limogeage inattendu du vice-président de la COLDEFF, le magistrat Issoufou Yacouba, le 2 février 2024. Ce limogeage, dépourvu de toute explication claire, aussi bien pour l’intéressé que pour le ministère de la Justice (son ministère de tutelle) auprès duquel il a cherché à comprendre les raisons de son éviction. Madame Laminou Sadé Tchiroma, jusqu’alors Commissaire à la Commission Dénonciation, a été nommée pour le remplacer, ajoutant une couche supplémentaire d’incertitude et d’incohérence dans la gestion de la COLDEFF.
Un acte révélateur d’une gestion autoritaire
Ce limogeage abrupt du vice-président Issoufou Yacouba, connu pour sa rigueur et son attachement aux principes, soulève de sérieuses interrogations sur les méthodes de gouvernance du CNSP, notamment en ce qui concerne la COLDEFF. Yacouba, avait-il critiqué les méthodes du président de la COLDEFF, notamment la création de commissions spécifiques pour traiter les affaires et le refus d’assistance légale aux accusés ?
Le limogeage du vice-président de la COLDEFF, est en tout cas révélateur d’un caprice autoritaire, un acte qui souligne une fois de plus, le réflexe d’autoritarisme soft et puéril du CNSP.
Cette décision, prise sans justification transparente, met en lumière un mode de fonctionnement où le caprice et l’arbitraire semblent prévaloir sur la rationalité et l’équité.
Le général Tiani, en orchestrant une telle décision, a montré que c’est lui qui décide qui, quand et pourquoi les membres des structures sont nommés ou remerciés sous la Transition, sans égard pour la transparence ou la justification. Ce cas particulier met en lumière une contradiction flagrante entre les objectifs affichés de la COLDEFF et ses pratiques internes, questionnant ainsi son efficacité.
En définitive, ce limogeage, loin de renforcer l’efficacité de la COLDEFF, risque plutôt de saper sa crédibilité. Il dénote une vulnérabilité face à la critique interne et au questionnement et révèle une prédisposition à privilégier la conformité sur l’efficacité. Pour une entité comme la COLDEFF, dont la mission est cruciale dans la lutte contre la corruption et la délinquance économique, une telle approche est non seulement contre-productive, mais aussi dangereusement myope.