Au cours des dernières années, le Niger a été le théâtre d’une escalade d’attaques terroristes meurtrières. Ces agressions se déroulant sous les gouvernements successifs de Mahamadou Issoufou et de Bazoum Mohamed n’ont pas seulement persisté ; elles ont ébranlé profondément la stabilité du pays. Cette situation délicate a culminé avec le coup d’État du CNSP survenu en juillet 2023, inaugurant une transition militaire qui remet en question les stratégies antérieures de lutte contre le terrorisme et de préservation de la gouvernance démocratique.
La proposition controversée du président de l’Association Islamique du Niger (AIN)
C’est dans ce contexte, le président de l’Association Islamique du Niger (AIN) a prononcé une déclaration surprenante, voire controversée. Il préconise que les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) demeurent au pouvoir jusqu’à ce que le terrorisme soit complètement éradiqué du Niger, voire de l’ensemble de la région du Sahel. Cette position, assez inhabituelle pour un leader religieux, suggère une préférence pour une approche de sécurité prolongée délaissant les principes de transition démocratique, plongeant le pays dans une incertitude quant à la durabilité et aux implications de cette transition militaire.
Entre réalisme et idéalisme
La proposition du président de l’AIN peut sembler pragmatique dans le contexte actuel marqué par des menaces sécuritaires graves. Cependant, cette approche entre en contradiction flagrante avec les principes démocratiques fondamentaux. Elle risque de créer un précédent dangereux, où le pouvoir militaire deviendrait la norme, inhibant ainsi le développement démocratique à long terme du Niger.
De plus, l’objectif d’une éradication totale du terrorisme, bien que louable, semble presque utopique à court terme. Cette exigence risque de justifier une prolongation indéfinie du pouvoir militaire, empêchant potentiellement le retour à un gouvernement civil élu.
Cette tactique, si elle était adoptée, pourrait également influencer d’autres pays du Sahel confrontés à des défis similaires – c’est déjà le cas au Mali et au Burkina Faso -. La propagation d’une telle doctrine pourrait ébranler les fondements de la démocratie dans des nations africaines déjà fragilisées.
Commentaire
Tout en reconnaissant la nécessité impérieuse de la sécurité, la proposition du président de l’AIN pourrait gravement compromettre les principes démocratiques et les droits humains fondamentaux. La lutte contre le terrorisme exige un équilibre délicat entre des mesures de sécurité efficaces et le maintien de structures démocratiques robustes. Une approche exclusivement militarisée, bien qu’offrant des solutions immédiates, pourrait engendrer des problématiques à long terme, notamment concernant la légitimité du gouvernement, le respect des droits de l’Homme, et le développement socio-économique.
Il devient donc impératif d’explorer des solutions holistiques qui conjuguent des mesures de sécurité rigoureuses avec le respect des principes démocratiques. Parallèlement, il est crucial de s’attaquer aux causes profondes du terrorisme et de l’instabilité dans la région. Seule une telle démarche, alliant fermeté sécuritaire et respect de la démocratie, peut garantir la stabilité et le progrès durable au Niger et dans le Sahel.