Issoufou Mahamadou ne fait pas partie de la race des grands hommes d’État dont il se réclame à cor et à cri. Par contre, on peut lui concéder un certain ‘’génie politique’’ en ce sens qu’il a su dompter (c’est le mot) l’ensemble de ses camarades du PNDS-Tarraya. Dans son discours d’investiture, Bazoum Mohamed a subtilement rappelé la grande partition qu’il a jouée dans la création du parti au pouvoir. Un fait que ne nie point Issoufou Mahamadou : « J’ai commencé mon combat politique dans la clandestinité en 1980. Mohamed Bazoum a composé un autre groupe clandestin, trois ans plus tard. Nous avons fusionné nos deux groupes en 1990 pour fonder, à l’avènement du multipartisme, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya) », a-t-il déclaré. Mais la vérité présente est que, quand on évoque le PNDS- Tarayya, tout se rapporte fatalement à l’ancien président de la République, absolument tout. Moins d’un mois après avoir quitté le pouvoir, Issoufou Mahamadou a cru utile de préciser les nouveaux rapports qu’il entend installer entre lui et Bazoum Mohamed : « Je ne serai pas là pour le gêner mais notre complicité va se poursuivre car je tiens à ce que cette alternance réussisse. Lui et moi ferons tout pour cela », a-t-il affirmé. Dans les faits, l’ex chef de l’État ne se contente pas de gêner son dauphin, il s’évertue à régner à sa place. C’est du moins l’avis dominant au sein de l’opinion nationale.
Le sentiment confus de bicéphalisme au sommet de l’État devient une certitude qui s’épaissit de jour en jour. « Analyse du comportement de l’ancien président M. Issoufou Mahamadou vis-à-vis du pouvoir du président en exercice M. Bazoum Mohamed », tel est le thème du débat public que projette d’organiser (ce 5 novembre 2022 à Zinder) un parti politique proche du chef de l’État. L’initiative peut prêter à rire, sauf qu’elle traduit l’état de profonde frustration dans laquelle sont prolongés les soutiens de Bazoum Mohamed. Ce dernier essaye d’exister face à un mentor qui veut le confiner dans l’inauguration des chrysanthèmes. C’est bien cela l’intention d’Issoufou Mahamadou qui ne s’en cache pas du tout. Plus d’un an et demi après sa prise de fonction, Bazoum Mohamed n’a toujours pas la pleine et entière possession des rênes de l’État. On ne parle plus d’un flottement, mais d’une absence évidente de pouvoir. Jusqu’où ira la mainmise du camarde Issoufou sur la Renaissance 3 ? D’aucuns préfèrent reformuler la question sous un autre angle : Bazoum Mohamed a-t-il les moyens de se soustraire de l’emprise de son mentor ? À chacun son opinion.