En annonçant la création par Ordonnance de la Commission de Lutte contre la Délinquance Économique, Financière et Fiscale (COLDEFF) dans un communiqué, qu’il a lu en début de soirée du mercredi 20 septembre 2023, à la télévision nationale, le porte-parole du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) a laissé entendre que l’initiative ‘’matérialise l’un des engagements forts pris’’ par le Général Tiani ‘’lors de son message adressé à la Nation le 28 juillet 2023 en vue de lutter contre la corruption, l’impunité, le détournement des biens publics et la mauvaise gouvernance’’.
‘’La COLDEFF constitue une réponse aux attentes légitimes du peuple nigérien à la justice, avec pour mission principale le recouvrement de tous les biens publics illégalement acquis et/ou détournés’’, a déclaré Colonel-major Abdramane Amadou, ajoutant que le président de la transition a engagé le CNSP, le gouvernement et les membres de la COLDEFF à ‘’travailler sans faille en gardant à l’esprit, seule la noble mission de défense des intérêts du Niger’’.
Cette nouvelle structure dont la composition n’est pas officialisée, dispose ‘’de tous les pouvoirs nécessaires pour mettre en œuvre les orientations du CNSP et du gouvernement relatives à la lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale, dans le respect des lois et règlements de la République’’, selon le communiqué.
Contrairement à la HALCIA qui est une structure permanente de lutte contre la corruption et les infractions assimilées créée par l’ancien président Issoufou Mahamadou qui a donné des résultats mitigés du fait notamment de sa transformation en instrument de chantage politique, les missions de la COLDEFF sont circonscrites dans le temps, la structure va devoir plier sa natte à la fin de la transition comme les autres.
Le porte-parole du CNSP a dit qu’elle a été créée pour répondre à l’attente forte de la population nigérienne à la justice sociale.
La tête des dignitaires du régime déchu de la Renaissance impliqués dans des actes de prédation sauvage des deniers publics et le bradage des ressources du sous-sol sont surtout exigés par les manifestants dans les mobilisations pacifiques de soutien au CNSP qui sont organisées quasi-quotidiennement depuis bientôt deux mois dans toutes les régions du pays.
Plus précisément, ils tiennent fermement au ‘’scalp’’ de l’ancien président Issoufou Mahamadou qui est considéré comme étant le principal artisan de la prédation sans commune mesure des deniers publics et de l’aliénation des ressources naturelles et du patrimoine de l’Etat.
Le même jour où la création de la COLDEFF a été rendue publique, l’on a assisté au placement sous mandat de dépôt dans différentes prisons du pays de plusieurs dignitaires du régime déchu dont l’ancien ministre de l’Intérieur Hamadou Adamou Souley [Kollo] et l’ancien ministre du pétrole Mahamadou Abba Issoufou [Filingué] par ailleurs fils de l’ancien président Issoufou Mahamadou.
Ce jeudi 21 septembre 2023, c’est au tour de Foumakoye Gado, président du PNDS Tarayya et ancien Haut représentant du président déchu Bazoum Mohamed d’être également privé de sa liberté, arrêté et déposé à la maison d’arrêt de Niamey. Est-ce sur décision de la COLDEFF qui vient d’être créée ou d’un acte judiciaire ? Nous ne saurons le dire pour l’instant ! La seule certitude, c’est la crainte des Nigériens d’être déçus par cette nouvelle structure qui est créée pour restaurer l’Etat dans ses droits en traquant sans ménagement les auteurs des malversations multiformes des biens publics qui ont eu cours ces 12 dernières années sous la renaissance.
Une crainte somme toute légitimes au regard des déceptions amères qu’ils ont connues avec les commissions similaires créées sous les transitions précédentes, de la Conférence nationale de 1991 à la transition du Général Salou Djibo.
D’une transition à une autre, les structures qui ont été créées pour traquer et faire rendre gorge aux prédateurs des biens publics se sont vite transformées en des officines d’affaires au profit des acteurs en charge de leur fonctionnement.
Par le truchement de compromis souterrains, les personnalités politiques soupçonnées de malversations multiformes parviennent à s’en tirer à bon compte et se remettre en selle. Au bout du compte, il n’y a aucun résultat tangible ni sur le plan de la restauration de l’Etat dans ses droits ni sur celui de la moralisation durable de la sphère publique. Et les mêmes pratiques néfastes reprennent dès que le pays revient sur les rails de la démocratie.’’